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La filière bois énergie entre soutien, dynamisme et controverse

Posté le 2 janvier 2020
par Joël Spaes
dans Énergie

La filière bois énergie reste au milieu du gué. D’une part, Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, vient de désigner 14 projets lauréats du troisième appel d’offres en faveur de la cogénération biomasse, représentant un volume de 74,1 MW, qui bénéficieront du soutien de l’Etat. D’autre part, cette troisième période d’appel d’offres avec soutien pourrait bien être la dernière ; la version connue de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ne prévoit plus en effet d’aider cette filière à l’avenir.

La troisième période de l’appel d’offres lancé en février 2016 portant sur 180 MW au total et acté mi-décembre porte, en détail, sur un volume annuel de 50 MW de nouvelles installations «bois énergies» de plus de 300 kW et de 10 MW pour de nouvelles installations de méthanisation de plus de 500 kW. Les installations lauréates produiront de l’électricité renouvelable pour un volume total de 600 GWh par an et de la chaleur renouvelable à hauteur de 2 800 GWh par an.

Les 14 projets lauréats de cette troisième période disposeront d’un contrat de complément de rémunération de l’électricité garanti pendant 20 ans avec un tarif de 113 €/MWh en moyenne. Pour les installations «bois énergie» de plus de 3 MW, le prix moyen atteint 109 €/MWh.

Besoin de soutien

Les professionnels de la filière bois énergie, de l’amont à l’aval, représentés au sein du CIBE (Comité Interprofessionnel du Bois- Energie), de FBF (France bois forêt), de la Fedene (Fédération des services énergie environnement, spécialiste des réseaux de chaleur notamment), de la FNB (Fédération nationale du bois) et du SER (Syndicat des énergies renouvelables) se sont réjouis des bons résultats de cet appel d’offres qui traduit le dynamisme du secteur et qui confirme la pertinence de cette énergie pour accompagner la transition énergétique et l’objectif de neutralité carbone que s’est fixé notre pays. Cependant, à l’aune de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), ils rappellent que cette troisième période de l’appel d’offres pourrait marquer la fin du soutien public à la production combinée de chaleur et d’électricité à partir de bois énergie.

Pourtant, les cogénérations bois énergie présentent de nombreux atouts, insistent les professionnels. Tout d’abord, avec un niveau d’efficacité énergétique supérieur ou égal à 75%, ces cogénérations à haut rendement produisent plus de 2,5 MWh de chaleur renouvelable pour 1 MWh d’électricité. Elles sont, en effet, en mesure de fournir de l’électricité en période de forte demande tout en maintenant leur capacité à produire majoritairement de la chaleur tout au long de l’année.

«Le soutien public à la production d’électricité renouvelable constitue donc également une aide à la production de chaleur renouvelable», martèlent les syndicats professionnels, «en complément du Fonds chaleur, et contribue à l’atteinte des objectifs de chaleur renouvelable que la France s’est fixés.»

La PPE se donne comme objectif de porter la part d’origine renouvelable (biomasse, pompes à chaleur, géothermie, biogaz, solaire thermique) de 22% en 2017 à 33% en 2023 et à 38% en 2028. La production de chaleur renouvelable devrait ainsi passer de 154 TWh en 2016 à 196 TWh en 2023, pour la première période de la PPE 2019-2023 puis entre 157 TWh et 169 TWh en 2028. Mais sur ces chiffres, la biomasse solide pèse lourd, avec 123 TWh produits en 2016 et 145 TWh prévus en 2023, puis de 157 TWh à 169 TWh en 2028. Certes, la PPE veut porter à 9,5 millions le nombre de foyers équipés d’un chauffage au bois labellisé, et raccorder 3,4 millions de logement à un réseau de chaleur… Mais les professionnels estiment que la place de la cogénération bois doit exister dans la PPE. Ils soulignent en effet que : «Cette production d’énergie tout au long de l’année, qui nécessite des approvisionnements constants et pas seulement en période hivernale, permet à la filière amont de production de bois énergie de se structurer et d’investir dans des outils d’exploitation, de production et de transformation grâce à des contrats de fourniture qui s’inscrivent dans la durée. Elle permet à l’industrie française du bois de gagner en compétitivité et d’améliorer la création de valeur du fait d’un investissement qui autorise à la fois la production d’une énergie décarbonée et la valorisation de la chaleur dans un dispositif de séchage des bois, préalable indispensable au développement d’unités de deuxième et troisième transformation.»

Et les particules ?

Enfin, chaque année au moment des pics de pollution hivernaux, revient sur la table la question des émissions de particules des chaudières au bois des particuliers, accusées de tous les maux. Côté grosses chaudières, elles sont en effet plus récentes et souvent avec des flux largement maîtrisés.

Une fois encore les professionnels du secteur, SER en tête, montent au créneau, rappelant que 82% de ces particules proviennent de chauffage au bois avec «foyers ouverts» (l’âtre par lequel le Père Noël passe…) installés depuis des années chez les particuliers.  Des aides financières existent pour renouveler le parc de la prime à l’achat de chaudières performantes – notamment grâce au travail des industriels du secteur et de la R&D menées avec l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) – au Fonds Air Bois mis en œuvre par les collectivités territoriales.

La profession du bois énergie rappelle que les émissions de particules seront divisées par deux en huit ans grâce au remplacement des foyers ouverts et des appareils anciens, dès 2020. En poursuivant cette tendance, une nouvelle réduction par deux, voire plus (avec du combustible de qualité), est accessible dès 2030.

Ainsi, comparé aux autres énergies non renouvelables, le bois rejette très peu de gaz à effet de serre (26g/kWh contre autour de 220 g/kWh pour le gaz) grâce à la gestion durable des forêts, le CO2 rejeté lors de la combustion étant absorbé par la croissance des arbres.


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