La dernière tonne de déchets chimiques présente dans la décharge de Bonfol a été excavée le 29 août. « C’est avec une grande satisfaction que je vous annonce que l’excavation des déchets, pour ainsi dire le « challenge principal » de cet assainissement, est terminée, a annoncé sur place Michael Fischer, directeur de la bci Betriebs-AG, consortium regroupant les entreprises de la chimie bâloise chargées de planifier et réaliser l’assainissement du site. Il reste néanmoins de nombreux travaux pour terminer l’assainissement.
Entre 2010 et 2016, 202.200 tonnes de déchets chimiques dangereux et matériaux mélangés ont été excavés, avant d’être incinérés à l’étranger. En parallèle, environ 84.000 tonnes de matériaux de sol faiblement à moyennement contaminés ont été éliminés dans des filières adaptées, en Suisse et aux Pays-Bas. Parmi ces déchets hautement toxiques en mélange, on retrouve des colorants, des pesticides, des solvants, des produits pharmaceutiques et des métaux lourds. Ces déchets avaient été entreposés à ciel ouvert dans une ancienne carrière d’argile par les géants de l’industrie chimique et pharmaceutique de Bâle – Novartis, Roche, BASF, Clariant ou Syngenta… – entre 1961 et 1977. Il aura fallu attendre l’an 2000 pour que le Gouvernement du Canton jurassien somme la chimie bâloise d’excaver les déchets et d’assainir la décharge, à leurs frais. Et 16 années supplémentaires pour étudier, préparer le projet et excaver les déchets.
Derniers déchets à évacuer et un suivi à mettre en place
Pour mener à bien les travaux, une halle d’excavation a été aménagé en surface, de manière à éviter toute pollution. L’excavation a débuté en mars 2010, mais s’est arrêtée entre juillet 2010 et mai 2011, après une explosion dans la halle. Le déblai s’est fait grâce à des pelles mécaniques reliées à un pont-roulant télécommandé. Les déchets étaient ensuite broyés, avant d’être placés dans des conteneurs destinés à l’incinération.
Avec la fin de l’excavation des déchets chimiques, les risques diminuent considérablement, notamment les risques d’explosion et d’incendie. « A ce jour, il reste 4.000 tonnes de déchets chimiques, déjà analysés et préparés pour leur transport, ainsi qu’environ 4.000 tonnes de matériaux de sols contaminés », précise la bci Betriebs-AG, dans un communiqué. Ils sont sur le point d’être mis en conteneurs pour être évacués début de novembre vers trois sites spécialisés en Allemagne et en Belgique où ils seront incinérés.
« L’encaissant argileux, contaminé par contact avec les déchets et les lixiviats de la décharge, a déjà été en grande partie nettoyé. Les surfaces restant encore à contrôler seront échantillonnées et décapées si nécessaire jusqu’à atteindre les valeurs limites définies par les autorités », fait savoir la bci Betriebs-AG. Par ailleurs, l’entreprise examinera la contamination des lentilles sableuses, des corps sableux enclavés dans les argiles de Bonfol. Bien qu’aucun impact sur les nappes phréatiques ou les eaux de surface n’a été observé, l’objectif est de vérifier que cette contamination ne présente pas de risque pour l’environnement. Les eaux souterraines et de surface seront monitorées pendant une dizaine d’années. Ceci pour vérifier que les sables de la décharge industrielle de Bonfol ne contaminent pas l’environnement.
3 ans pour décontaminer, démonter et réaménager
En plus des surfaces ayant été en contact avec les déchets, il conviendra de décontaminer l’ensemble des installations. La qualité de l’air sera suivie pour déterminer le moment propice à la levée du confinement de la halle. « La majeure partie des travaux de décontamination et de démontage des infrastructures d’assainissement sera terminée d’ici fin 2017 », annonce la bci Betriebs-AG. L’entreprise procédera ensuite au reboisement de 15 hectares du site d’ici 2019. Parallèlement, elle réfléchit à un projet de réaménagement avec l’association Escale Bonfol et l’architecte Mario Botta.
La dépollution des sols suisses ne fait que commencer. Le pays compte encore aujourd’hui près de 38’000 sites pollués – comme des anciennes décharges, des sites industriels ou des stands de tir (dont 4000 sont contaminés et nécessitent donc un assainissement), rapporte RTSInfo. Parmi ces sites figurent quelques décharges dont le nettoyage est estimé à plus de 91 millions d’euros.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique