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L’efficacité des vers de terre face à l’antibiorésistance des bactéries

Posté le 28 juin 2024
par Romain FOUCHARD
dans Chimie et Biotech

Quelle innovation biotechnologique ne doit-on pas rater en juin ? Le lombricompostage comme moyen de lutte contre les gènes de résistance aux antibiotiques...

La résistance des bactéries aux antibiotiques est devenue une inquiétude globale. Déjà en 2021, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) la classait parmi les dix plus grandes menaces pour la santé publique mondiale auxquelles l’humanité était confrontée. Des gènes de résistance aux antibiotiques sont présents chez les bactéries naturellement résistantes ou produisant ces mêmes antibiotiques. Or, ces gènes peuvent passer d’une bactérie à une autre par leurs plasmides, ou mini-chromosomes circulaires, des éléments génétiques mobiles. Ces derniers peuvent également transférer les gènes de résistance directement au sol et aux parties internes des plantes. Aujourd’hui, les centrales de traitement des eaux usées reçoivent et concentrent ces gènes en provenance des usines et des installations d’élevage. Malheureusement, les processus de traitement ne parviennent pas à les supprimer, ce qui conduit à leur accroissement dans ces eaux et les boues qui en résultent. Dans l’optique d’une solution naturelle, des chercheurs des universités chinoises de Tongji à Shanghai et de Guilin se sont tournés vers des organismes discrets, mais qui grouillent pourtant sous nos pieds : les vers de terre…

L’action 2-en-1 des vers de terre

Un individu d’Eisenia fetida, plus connu sous le nom de ver rouge. Crédits : P. Gourdain/MNHN.

Les vers de terre sont connus pour jouer un rôle crucial en limitant la dissémination des gènes de résistance aux antibiotiques. Reste à savoir de quelle manière… Pour ce faire, les scientifiques ont mis en place une expérience de microcosme avec lombricompostage. Ce processus de décomposition biochimique des déchets organiques pourrait en effet offrir une voie durable dans la lutte contre l’antibiorésistance dans les déchets solides, notamment la boue tirée des eaux usées et le fumier. Pour leur étude, les universitaires chinois ont sélectionné la bactérie du sol Pseudomonas putida comme donneuse de gènes et l’ont associée à la bactérie intestinale Escherichia coli. Niveau vers de terre, le lombricompost abritait des spécimens de vers rouges (Eisenia fetida). Le suivi de l’évolution des gènes de résistance et des plasmides bactériens s’est fait à l’aide de la métagénomique (génomique environnementale) et de la PCR (polymerase chain reaction) quantitative.

Après 63 jours d’expérience, les résultats ont finalement été analysés et présentés en juin 2024 dans le journal Bioresource Technology. Au total, l’abondance relative des gènes de résistance aux antibiotiques a diminué de 74,5 % du fait du lombricompostage, et plus particulièrement de la disparition de 92 % des bactéries donneuses. L’action des vers rouges a également empêché 94 % des transmissions du plasmide RP4, qui était surveillé par fluorescence. Un effet qui s’explique par la chute de 25 % de l’abondance relative de l’ensemble des plasmides bactériens. Selon les chercheurs, par leurs différentes actions (ensevelissement, ingestion, excrétion), les vers de terre modifient profondément les caractéristiques physico-chimiques et les populations microbiennes de leur environnement. En cela, ils influencent fortement les altérations causées aux gènes de résistance et aux plasmides. Une invitation à généraliser encore davantage le lombricompostage !


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