Inspirée par la création du DOGE, le fameux pseudoministère de l’efficacité gouvernementale aux États-Unis qu’elle qualifie de « comité de la hache antibureaucratique », Valérie Pécresse estime qu’il est nécessaire de faire sauter le tabou de la performance publique.
Certes, on ne peut pas lui donner tort lorsqu’au micro de France Inter elle met en avant « qu’il y a du gaspillage, il y a de la sur-normes. » Selon elle, il faudrait tout réorganiser. Elle va même jusqu’à demander aux ministres de devenir des « chasseurs de gaspillage ». Rien de choquant jusqu’ici, surtout dans le climat actuel d’économie sur la dépense publique.
Mais pourquoi choisir l’ADEME comme exemple – ou plutôt comme cible – en proposant sa suppression pure et simple ? Parce que, selon la présidente de la région Île-de-France, « l’ADEME représente 5 milliards de budget et plus de 1 000 agents » et que le travail fourni par l’agence ferait doublon avec celui de la Caisse des territoires et des régions. La solution semble alors évidente, bien que radicale, pour réduire la note : supprimer l’agence pour supprimer tous les frais fixes et frais de structure.
Le président de l’ADEME contre-attaque
Présentées comme cela, les choses sont simples. Mais la réalité est bien différente, car ce procès qui est fait à l’ADEME est injuste. La ministre de la Transition écologique va même plus loin : pour elle, les propositions de la droite seraient teintées de populisme et de démagogie.
En réponse aux critiques de plusieurs élus, Sylvain Waserman, président de l’ADEME, a donc tenu à rappeler quelques faits concernant l’agence.
- À propos des 5 milliards d’euros de budget : en 2024, le budget alloué à l’ADEME était de 3,4 milliards d’euros, pas de 5 milliards !
- 92 % de ce budget est alloué à des aides directes aux collectivités locales et aux entreprises : ces sommes permettent aux collectivités et aux entreprises de financer des actions bien réelles en faveur de la transition écologique (réseaux de chaleur, rénovation énergétique des bâtiments, mobilité durable, valorisation des déchets, etc.)
- Les frais de fonctionnement de l’ADEME : ils représentent seulement quelques % de ce budget et servent notamment à payer les 1 000 ETP (coût de 100 millions d’euros) et les loyers.
L’ADEME, une agence utile et performante
Contrairement à ce que laissent entendre ses détracteurs, l’ADEME n’est donc pas une agence inutile, qui dilapiderait l’argent public. C’est même tout l’inverse, puisque l’Inspection Générale des Finances a récemment salué la rigueur de gestion de l’ADEME, à l’issue d’un audit de quatre mois.
Encore mieux : l’IGF recommande même d’augmenter les effectifs de l’agence, ce qui prouve l’utilité de ces postes. Car, comme le rappelle Sylvain Waserman, l’ADEME « fournit des outils, de l’expertise, avec notamment 150 chercheurs et 500 ingénieurs, en suivant une méthodologie scientifique pour opérer la transition. »
L’ADEME propose donc une expertise technique précieuse, sur laquelle s’appuient ses partenaires, notamment les régions et la Banque des territoires. Il est donc faux de dire que l’ADEME fait doublon !
Enfin, l’idée de supprimer l’ADEME tout en conservant ses effectifs, en les répartissant dans d’autres administrations, semble assez peu réaliste, car l’ADEME est constituée à 98 % de salariés du privé.
La remise en question de la transition écologique : le véritable débat derrière la polémique
Pour Sylvain Waserman, ces attaques soulèvent aussi une question fondamentale. Veut-on juste revoir la gouvernance de l’ADEME ou plutôt « couper l’argent public que l’État consacre à la transition écologique ? »
Nous en saurons plus fin janvier, à l’issue des auditions de l’ADEME, mais aussi de l’Office Français de la Biodiversité et de l’Agence Bio par la commission du développement durable à l’Assemblée nationale.
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