L’année 2023 s’annonce riche, mais aussi difficile côté lanceur, pour l’Europe spatiale et le Centre national d’études spatiales (CNES). Pour partager cette actualité, l’association des journalistes de l’environnement (AJE) a invité Philippe Baptiste, président-directeur général du CNES, à s’exprimer lors d’un webinaire en ligne le 13 mars. Ainsi, avec trois ans de retard, le premier lancement d’Ariane 6 devrait finalement bien avoir lieu fin 2023. À condition évidemment que les futurs essais de la fusée et de son pas de tir au Centre spatial guyanais se déroulent sans encombre majeur.
Une année difficile pour les lanceurs en Europe
Philippe Baptiste, président-directeur général du CNES, reconnaît la difficulté actuelle de l’accès autonome de l’Europe à l’espace, alors qu’elle devait recourir, en période de transition entre les deux lanceurs Ariane, au lanceur moyen russe Soyouz. Une voie abandonnée depuis l’invasion de l’Ukraine. En parallèle, le nouveau lanceur léger européen Vega-C, qui devait effectuer son premier vol commercial avec à son bord deux satellites d’Airbus, s’est perdu après son décollage depuis Kourou, le 20 décembre 2022. « C’est un moment difficile pour les lanceurs en Europe avec beaucoup de projets en attente d’être lancés », reconnaît-il. Mais il l’assure : « Ariane 6 va arriver, c’est notre priorité n°1 ! ».
Si l’Europe accuse un certain retard sur la réutilisation des lanceurs par rapport notamment à SpaceX et Blue Origin, Philippe Baptiste rappelle que le CNES travaille sur le sujet avec l’agence spatiale allemande et japonaise. Le démonstrateur Callisto, une fusée mono-étage expérimentale, entièrement réutilisable, « d’une quinzaine de mètres de haut » fera « ses premiers essais en 2024 », assure-t-il.
Les missions Juice, Euclid et SVOM
La toute prochaine mission d’exploration de l’Agence spatiale européenne (ESA) à quitter la Terre est Juice (JUpiter ICy moons Explorer). Elle s’envolera depuis le site de Kourou en Guyane française en avril 2023, lancée par l’avant-dernière Ariane 5. Cette sonde spatiale rejoindra la sonde Juno de la Nasa, en orbite de Jupiter depuis 2016. « Il a sept ans de trajet avec pour but d’observer Jupiter et ses 3 grandes lunes glacées (Ganymède, Callisto et Europe, ndlr), détaille Philippe Baptiste. On est très intéressé par ces lunes glacées parce qu’il peut y avoir des traces de vie, en particulier dans les océans souterrains des satellites de Jupiter. » Sept laboratoires français sont impliqués dans le développement des instruments scientifiques de Juice.
Euclid, le télescope spatial de l’ESA, quittera également la terre en 2023. Philippe Baptiste explique le but du projet. Direction le point de Lagrange L2 du système Soleil-Terre, situé à 1,5 million de kilomètres de la Terre à l’opposé du Soleil, où il entrera en orbite pour effectuer ses observations. « Il a comme mission de cartographier en trois dimensions des centaines de millions de galaxies pour essayer de comprendre à la fois l’énergie sombre qui déforme la lumière et comprendre les mécanismes d’accélération de l’expansion de l’univers », explique Philippe Baptiste. La mission embarque encore une fois plusieurs instruments développés par la communauté française et par le CNES.
Enfin, la mission franco-chinoise SVOM doit décoller en décembre 2023 depuis la base de lancement de Xichang, en Chine. Elle placera un satellite en orbite basse de la Terre, à une altitude de 650 km. Cette collaboration entre le CNES et l’administration spatiale nationale chinoise (CNSA) doit étudier les plus lointaines explosions d’étoiles, les sursauts gamma. Il s’agit de « gros paquets d’énergie qui rayonnent dans l’univers et qui permettent d’indiquer qu’il y a une explosion d’étoiles ou de la fusion d’objets très compacts, très énergétiques », précise Philippe Baptiste. Les observations depuis l’espace seront complétées par un important segment au sol.
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