Depuis 10 ans, les scientifiques se cassaient la tête sur la caractérisation des propriétés des électrons à la surface des isolants topologiques : les deux méthodes utilisées ne donnaient jamais les mêmes résultats. Le mystère est maintenant résolu !
Le isolants topologiques sont des matériaux isolants en volume mais dont la surface peut pourtant devenir conductrice. Ces nouveaux matériaux, découverts il y a une dizaine d’années, présentent un grand intérêt tant pour la recherche fondamentale que pour des applications notamment en électronique des spins (spinélectronique) et informatique quantique. Cependant depuis 10 ans les chercheurs ne s’expliquaient pas pourquoi les mesures des bandes d’énergie des électrons à la surface ne concordaient pas selon que l’on utilisait une méthode basée sur le magnétotransport ou sur la photoémission résolue en angle (ARPES) – un type de spectroscopie utilisant de la lumière ultraviolette (UV) pour étudier les propriétés des électrons (énergie, vitesse, bandes de conduction…).
C’est la lumière qui est fautive !
Dans un article de Physical review X, une équipe internationale (Pays-Bas, France, Suisse, Allemagne) explique comment résoudre cette énigme et comment utiliser les méthodes de mesure par photoémission de manière fiable. En effet, bien que les deux méthodes expérimentales pour déterminer les propriétés des électrons soient précises et habituellement fiables, elles donnent systématiquement des résultats différents pour les isolants topologiques ; la méthode de photoémission tendant à placer les bandes d’énergie à des niveaux plus bas. Certains avançaient que cette dernière était plus sensible aux impuretés de surface dues à des atomes de gaz de l’environnement qui seraient présents mais cette explication semblait fragile face au fait que la photoémission se déroule sous vide et sous des pressions bien plus élevées que la méthode par magnétotransport. Les résultats de ces études montrent que c’est l’exposition à la lumière ultraviolette qui est en réalité responsable d’un changement dans la structure électronique du matériau observé. Il s’avère que dès le premier flash de lumière UV, le point de Dirac descend et que toute la structure des bandes d’énergie se déforme vers des valeurs d’énergie plus basses.
Rien ne se fait au hasard
Les expériences menées ont aussi permis de dévoiler que la déformation des structures de bandes sont prédictibles et dépendent notamment de l’état de pureté de la surface, des caractéristiques du flux de photon et du temps d’exposition. Alors, faut-il jeter à la poubelle toutes les expériences faites en photoémission ? Non ! Les chercheurs ont pu établir des protocoles permettant d’obtenir des données avec la photoémission, qui sont en concordance avec celles obtenues par la méthode de magnétotransport. Ils se sont notamment aperçus que ces valeurs étaient disponibles soient avec des temps d’exposition extrêmement courts soit très longs. Ils ont réussi à expliquer les différents états traversés par les électrons à la surface sous l’influence de la lumière UV (phénomènes de photoionisation, photodissociation, désorption de surface etc) expliquant l’évolution des bandes d’énergie au cours du temps. Des phénomènes qui pourraient même trouver des applications dans des systèmes basés sur les isolants topologiques où l’on se serviraient de cette déformation des bandes d’énergie.
Par Sophie Hoguin
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