Les solutions pour traiter les déchets existent. Mais cela ne suffit pas. Une démarche cohérente, en termes de collecte des déchets, de choix du type de valorisation, entre autres, permettra de gérer de manière optimale la production mondiale, croissante, de déchets. Explications.
Les solutions pour traiter les déchets existent. Mais cela ne suffit pas. Une démarche cohérente, en termes de collecte des déchets, de choix du type de valorisation, entre autres, permettra de gérer de manière optimale la production mondiale, croissante, de déchets. Les pays développés disposent, actuellement, d’un arsenal de technologies de très bon niveau. La France est un pays qui est, potentiellement, tout à fait capable d’assumer les tâches liées au retraitement de ses déchets toute seule.
La deuxième chose, qu’il faut bien avoir à l’esprit, est la nécessité d’avoir une chaîne de traitement des déchets la plus complète possible. En effet, les déchets complexes doivent être triés et suivre des chaînes de traitement complètes si l’on veut les valoriser efficacement.
Troisième difficulté, la multiplicité des choix en matière de déchets. Il faut décider comment on traite le déchet : va-t-on privilégier tel ou tel type d’action selon les principes de rationalité économique, de préservation de l’écologique, de facilité technologique ? Beaucoup d’éléments entrent en jeu lorsque ce choix doit être fait.
Pour certains éléments, comme le verre, le choix s’impose tout seul. Le verre ne peut être transformé ou valorisé efficacement, on utilise donc les déchets à base de verre pour produire… du verre. Même chose pour le papier, bien que les spécialistes se demandent actuellement si il n’est pas plus écologique, finalement, de brûler le papier plutôt que de le recycler.
» Les possibilités en termes de recyclage sont importantes «
» Lorsque l’on a des objets riches (matières plastiques, caoutchouc…), les possibilités en termes de recyclage sont importantes : pour le caoutchouc, on dénombre une vingtaine de possibilités de recyclage « , ajoute Alain Navarro, Directeur scientifique du réseau coopératif de recherche sur les déchets.
A l’heure actuelle, les autorités se perdent dans cette étendue de choix et aucune politique claire ne se fait ressentir. Il est vrai que les problématiques sont cornéliennes. Vaut-il mieux fabriquer des produits recyclables ? Où alors des produits biodégradables ? Doit-on laisser le plastique se dégrader dans la nature ou doit-on le récupérer pour le recycler ?
Ces problèmes sont à l’heure actuelle peu tranchés, et restent plus que jamais d’actualité. Si on en revient à la problématique des déchets en général, la problématique actuelle est plutôt simple : doit-on valoriser ou éliminer nos déchets ?
Pour répondre à cette question, le plus simple est de pratiquer des éco bilans. Ainsi, la valorisation de certains déchets peut revenir très cher. Aussi, la valorisation, peut, dans certain cas, être un processus qui va consommer trop d’énergie ou d’argent. L’éco bilan va permettre aux spécialistes d’avoir une idée précise des avantages et des inconvénients (au niveau financier, environnemental, au niveau de la faisabilité…) de chaque type de recyclage appliquée à un produit donné. Par un système de coefficients, on peut choisir ensuite de faire des éco bilans prenant en compte les préférences des acteurs de ce recyclage, en fonction des priorités requises.
Social, économie et environnement
Les ingénieurs travaillant dans le recyclage des déchets sont face à des choix cornéliens : ils doivent, dans leurs choix, pondérer trois exigences primordiales : l’économie, le social et l’environnement. Aujourd’hui, la problématique environnementale est incontournable dans les choix des décideurs pour le traitement des déchets. L’épuisement des ressources devient un problème de plus en plus pressant. Il prend quatre formes qui sont toutes, pour différentes raisons, d’épineux problèmes :
- épuisement des ressources non renouvelables, non recyclables (valorisation énergétique) ;
- épuisement des ressources non renouvelables, recyclables (recyclage métaux et matières minérales) ;
- épuisement des ressources non renouvelables (gestion rationnelle des déchets biomasse)
- épuisement de l’espace (décharges et maîtrise des rejets dans les milieux naturels).
Depuis quelques années la donne est simple. Le pétrole, dont les réserves sont ponctionnées aujourd’hui, sera bientôt épuisé, de même que le gaz et le charbon. Ces matières font l’objet d’une valorisation énergétique. Aussi, on voit que la gestion et le stockage des déchets sont une des sources principales de pollution et de nuisance. Quelques exemples :
- l’effet de serre et le réchauffement climatique ;
- destruction de la couche d’ozone stratosphérique ;
- la toxicité ;
- l’éco toxicité ;
- acifidification (pluies acides) ;
- formation de photo-oxydants ;
- eutrophisation des milieux aquatiques ;
- stockage et gestion des déchets ;
- radioactivité ;
- pollution thermique ;
- bruit ;
- odeurs.
Les déchets apparaissent à deux niveaux. Le stockage des stocks de déchets a un effet négatif sur l’environnement, cela est une certitude. Ensuite, à partir des déchets, quand on veut recycler, se pose le problème de la création de nouveaux déchets. C’est là que les choix doivent se faire. Jusqu’à peu, le critère strictement économique a toujours prévalu, mais petit à petit les hommes commencent à murir ces choix au-delà d’un aspect économico économique.
Organiser une chaîne de traitement des déchets cohérente et efficace
Mais Alain Navarro va plus loin : » nous avons eu un gros problème de relation entre déchet et santé. Effectivement, un certain nombre de pratiques (mise en place de décharges sauvages, valorisation mal conduite…) ont des conséquences catastrophiques, et notamment sur la santé. Aujourd’hui, la multiplication des produits devient un véritable casse-tête de santé publique. La déshumanisation des installations, et notamment au niveau des décharges, est un fait vraiment dommageable. Même si l’exemple paraît insignifiant, il est révélateur de la nécessité d’organiser une chaîne de traitement des déchets cohérente et efficace. » Tout est dit.
Les solutions en ce qui concerne le traitement des déchets sont légion. Toutes peuvent être bonnes, selon le contexte, à conditions d’être mises en œuvre dans des conditions correctes. Il est donc primordial d’avoir des stratégies de gestion des déchets cohérente. Quatre voies sont suivies :
- l’élimination ;
- l’élimination écologique (prise en compte des phénomènes de santé publique) ;
- la gestion plus durable : le recyclage ;
- les non-déchets.
La priorité pour les citoyens est d’éliminer les déchets, on ne peut bien sûr pas les laisser. Maintenant, il s’agit donc de rendre l’élimination de ces déchets plus écologique, plus sanitaire : cela n’est pas simple. Il faudrait prendre en compte tout le système, en partenariat avec les producteurs de déchets, pour arriver à la meilleure solution. Le cheminement entre la production, l’approvisionnement en ressources et la fabrication elle-même d’un produit rend parfois l’analyse presque impossible, et les choix qui suivent sont forcément sujet à caution.
» Actuellement, pour les déchets de nos villes, je suis persuadé qu’éviter de mettre un certain nombre de choses dans nos poubelles serait plus utile que d’essayer de trier ce qu’on y a mis. Si on avait la possibilité de faire sortir de ce système tout ce qui le pollue et le tue, ce serait plus souhaitable que de privilégier la matière utile. Cependant, on imagine mal installer des réceptacles au coin de chaque rue pour récolter les éléments dangereux « , rapporte Alain Navarro.
Des incohérences entre les attentes de chacun
Le choix du recyclage est également très en vogue aujourd’hui. Que ce soit en énergie, que ce soit en matière, il faut que l’industrie du recyclage devienne une industrie à part entière, un véritable service public. Il faut avoir conscience que les déchets ne sont pas des marchandises comme les autres. Ils constituent en quelque sorte » l’envers du décor « , et doivent donc être appréhendés autrement.
Par exemple, en ce qui concerne les pots catalytiques. On fixe des métaux précieux sur les pots catalytiques, dans la matrice, pour rendre le produit de meilleure qualité. En bout de chaîne, il devient très difficile de récupérer ces métaux précieux. De même, également dans l’automobile, on rêve de voitures pouvant se démonter par clipage, mais personne ne fabriquera des voitures selon ce principe, pour des raisons évidentes de sécurité.
Pour résumer, les incohérences entre les attentes des uns, en début de chaîne, et celle des autres, en fin de chaîne, ne sont pas les mêmes. Et rien n’existe, ou si peu, pour faire collaborer ces acteurs et trouver des compromis. Les logiques d’un côté et de l’autre ne sont pas les mêmes, et les concessions paraissent souvent relever d’une douce utopie.
L’idéal, ce sont les non déchets. Ce sont les non déchets qui permettent d’aborder le problème sous une dimension plus économique. En matière de gestion des déchets, le consommateur n’est qu’un acteur en bout de chaîne. Sa marge de manœuvre existe (tri, choix de consommation…), mais elle reste assez faible. C’est vers l’amont de la consommation et de la production qu’il faut se tourner si on veut réellement agir sur un levier important de la chaîne de production des déchets.
Par Pierre Thouverez
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