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Interview

Industrie, la RSE indispensable pour la « pérennité » des entreprises

Posté le par Matthieu Combe dans Entreprises et marchés

Les entreprises industrielles prennent de plus en plus en compte les enjeux RSE (responsabilité sociétale des entreprises). Il reste notamment de nombreux défis à relever concernant les enjeux sociaux. Sandrine Grumberg, fondatrice de Viasourcing, nous explique l’évolution du secteur.

Sandrine Grumberg est fondatrice de Viasourcing, cabinet de conseil et de formation, spécialisé en RSE (responsabilité sociétale des entreprises). Elle accompagne les entreprises dans leur mutation et regrette le manque d’anticipation de certaines entreprises. Elle voit les achats durables comme une application pratique permettant de réconcilier l’humain et l’environnement dans l’entreprise. Surtout, elle estime que les entreprises qui attendent les lois pour prendre à bras le corps le sujet de RSE perdent peu à peu du terrain par rapport à celles qui agissent. Entretien.

Techniques de l’Ingénieur : Est-ce que la RSE est une thématique bien ancrée dans le domaine industriel ?

Sandrine Grumberg

Sandrine Grumberg : La RSE est un sujet largement abordé, mais il reste plusieurs progrès à faire. Toutes les grandes entreprises ont au moins un agenda RSE à plusieurs niveaux, mais le déploiement effectif de cet agenda est une autre question. Il y a encore de nombreux paradoxes à gérer, notamment concernant les projets de court terme par rapport à l’agenda environnemental à long terme.

Les rapports extra-financiers des entreprises deviennent de plus en plus fournis et de plus en plus précis. On parle de supply chain, de chaîne de valeur et de transparence de supply chain. Cela signifie que les fournisseurs des fournisseurs des fournisseurs vont aussi devoir montrer où ils en sont concernant les questions environnementales et sociales. Si les grandes entreprises s’engagent, il reste de nombreuses interrogations concernant les petites et moyennes entreprises françaises.

Dans la supply chain, jusqu’où remonte la RSE ?

Cela dépend des secteurs. Par exemple, l’automobile a toujours eu l’habitude de situer telle ou telle entreprise par rapport aux constructeurs. On parle de fournisseur de rang 1, 2 ou 3. Dans les grandes entreprises, on commence à avoir une cartographie des fournisseurs. Je pense à Ecovadis par exemple, qui propose des mapping de supply chain, pour cartographier les fournisseurs d’une entreprise.

Les grandes entreprises ont de nouveaux risques à gérer : des risques géopolitiques, dus au tarissement des sources de certaines matières premières, ou à l’augmentation des prix de certaines matières. Cette tendance est apparue très clairement pendant le confinement. On s’est rendu compte que l’on avait perdu la main sur certains approvisionnements. Les pays se sont rendu compte qu’ils ne pouvaient pas dépendre de pays très lointains et qu’il fallait diversifier leurs sources.  Mais cela pose d’autres questions : le secret d’une fabrication peut-il encore exister ?

Quels axes d’amélioration reste-t-il dans l’industrie concernant les droits des travailleurs ?

Il y a eu énormément de progrès sur les gestes et postures. Les responsables QHSE (qualité, hygiène et sécurité, NDLR) sont à l’écoute. Lorsque les entreprises respectent les réglementations concernant le bruit et les équipements de protection individuels, le confort est assez bon pour les employés. Les troubles musculosquelettiques sont aussi bien pris en charge. Mais concernant la sphère sociale de l’entreprise, il reste des progrès à faire sur la mixité, la diversité, les questions de genre et le handicap, notamment sur la discrimination à l’embauche. La question de la transition des métiers est aussi un sujet sous le radar.  Les entreprises n’ont pas pris le tournant de la formation et des futurs métiers industriels.

Il faut aussi être un peu plus regardant sur les fournisseurs éloignés, situés dans des zones à risques. Dans certains pays asiatiques, par exemple, on peut se poser des questions sur le travail des enfants, le travail des femmes, l’inclusion des femmes, l’éducation, le droit syndical. On peut s’interroger notamment sur la Chine qui n’a jamais ratifié les accords internationaux du travail mais qui est pourtant l’usine du monde.

Qu’est-ce qui pourrait pousser l’ensemble des acteurs à s’engager dans la RSE ?

La réglementation est une bonne motivation, mais les lois prévoient souvent peu de moyens pour les contrôler. C’est une limite importante. Par exemple, le décret imposant le tri des déchets en 5 flux dans les entreprises n’est pas un franc succès.

Aujourd’hui, les entreprises qui attendent les lois pour faire bouger les choses sont en train de perdre du terrain par rapport à celles qui agissent. À l’international, on parle de « people profit prosperity ». Lorsqu’on parle de « prosperity » dans le monde de l’entreprise, on aborde sa pérennité. Une entreprise cherche à gagner de l’argent mais surtout à être encore là dans 10 ou 20 ans. Les entreprises engagées dans ces questions auront une chance de l’être, moins les autres.

Les entreprises peuvent signer la Charte de la diversité ou le Global Compact. Il s’agit d’engagements gratuits. Il y a des certifications ou labellisations comme B Corp. L’engagement le plus complet concerne la démarche ISO 26000. Ensuite, on peut aussi entrer sur une certification plutôt environnementale ou sociale, selon la vision de l’entreprise.

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Posté le par Matthieu Combe


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