Alors que s’ouvre la Semaine de la chaleur renouvelable, le président du Comité interprofessionnel du bois-énergie, Mathieu Fleury, expose les dynamiques en cours dans la filière biomasse solide, en particulier pour les gros projets industriels et collectifs.
Pilier incontournable de la transition énergétique, le bois-énergie est en cours de développement, comme d’autres ressources qui seront mises en avant lors de la Semaine de la chaleur renouvelable.
Techniques de l’Ingénieur : Quels sont les avantages du bois-énergie ?
Mathieu Fleury : Cette ressource énergétique a été historiquement et est toujours la première des énergies vertes en France (cf. encadré) comme le montre le panorama de la chaleur renouvelable réalisé chaque année par les professionnels du secteur. Le bois-énergie a l’avantage d’être assez bien réparti sur le territoire, il crée de l’emploi local et il est disponible sous différentes formes (bois-bûches, plaquettes forestières, broyats de recyclage, briquettes, granulés, etc.). Il peut être utilisé individuellement, de préférence avec des appareils performants labellisés Flamme verte, ou bien collectivement par des chaudières et des réseaux de chaleur urbains. Le développement de la biomasse solide fait partie de la stratégie nationale bas-carbone, avec l’objectif ambitieux que la chaleur renouvelable représente 38 % de la consommation finale de chaleur en 2030. Mais en 2020, on était à moins de 23 %, soit une augmentation de seulement 7 points par rapport à 2010. Le rythme doit s’accélérer si on veut tenir l’objectif.
Pourquoi cette difficulté à être en phase avec l’objectif ?
Depuis plusieurs années, le bois-énergie était concurrencé par le gaz fossile dont le prix était bas. Il n’était pas évident de convaincre les collectivités et les industriels d’engager des projets de chaufferies bois. Ils permettent pourtant de créer de gros volumes de chaleur renouvelable à un coût abordable grâce au soutien public du Fonds Chaleur de l’Ademe. De plus, ce sont des projets dont il faut sécuriser l’approvisionnement en bois sur le long terme, ce qui nécessite de bien structurer la filière amont de récolte, de préparation et de livraison de la biomasse. Le CIBE que je préside élabore un suivi des prix des différents types de bois-énergie. De toutes les ressources, c’est la moins chère, son prix est stable (même orienté à la baisse actuellement, ce qui est problématique) alors que toutes les autres énergies voient leurs prix augmenter ! La conjoncture actuelle nous est donc favorable et l’industrie, en particulier, identifie mieux l’intérêt du bois-énergie grâce aux nouveaux soutiens gouvernementaux pour la décarbonation.
Ces soutiens sont-ils durables ?
Dans le cadre du plan de Relance, et des appels à projets lancés par le Gouvernement pour décarboner l’industrie, on a une stimulation forte. Elle est nécessaire pour commencer à rattraper le retard des années précédentes, surtout si les collectivités actent aussi des projets. Encore faut-il ensuite qu’ils sortent bien de terre ! On a d’ailleurs besoin d’avoir accès au suivi des projets sélectionnés pour savoir quels territoires vont effectivement mobiliser de la biomasse. Sur le long terme, le Fonds Chaleur est néanmoins le meilleur outil de soutien public ; c’est pourquoi nous militons pour que sa dotation soit augmentée l’an prochain. L’accélération serait aussi plus forte si un nouvel appel à projets de cogénération biomasse était lancé.
Existe-t-il des freins à la multiplication des projets de bois-énergie ?
Il faut tout d’abord qu’on aide les exploitants forestiers à avoir la capacité (et la rémunération qui va avec) de collecter plus de bois dans des parcelles peu utilisées. Comme beaucoup d’entreprises, nous avons des soucis de recrutement, alors que de nombreux emplois attractifs sont recherchés dans la filière bois-énergie. Et il y a aussi une contrainte actuelle sur l’accès aux pièces de rechange pour la maintenance des machines. C’est ponctuel, mais cela nous fait réfléchir à s’orienter vers plus de réparation, ce qui aurait du sens dans le cadre de la transition écologique.
Huit grandes techniques de chaleur renouvelable
Le bois-énergie est la première des sources de chaleur renouvelable en France. Sur les 152,7 TWh produits en 2020, le bois domestique représente 49 % et les chaufferies au bois (collectif, industriel, tertiaire) 16 %. Le reste est assuré par sept autres solutions technologiques. Les pompes à chaleur aérothermiques sont les plus importantes en volume (22 %) avec 8,5 millions d’équipements installés. La géothermie de surface (plus de 206 000 pompes à chaleur) et la géothermie profonde (77 installations, principalement dans les bassins parisien et aquitain) cumulent 5 % de la production de chaleur renouvelable. Les unités de valorisation énergétique des déchets (4 %) et les gaz renouvelables (3 %) complètent le tableau, tandis que le solaire thermique ne compte que pour 1 %. Enfin, la valorisation de chaleur fatale commence tout juste d’être développée, mais son potentiel a été estimé à 118 TWh.
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