L'Alliance nationale de recherche pour l'environnement a publié une étude prospective sur les conséquences environnementales, sociales et économiques du réchauffement climatique sur le littoral. A partir de plusieurs hypothèses, elle projette les différentes stratégies d'adaptation et anticipations possibles.
L’Alliance nationale de recherche pour l’environnement a publié une étude prospective sur l’élévation du niveau de la mer à l’horizon 2100 afin d’alerter et fournir des outils pour anticiper et gérer les risques. A travers huit scénarios, du plus optimiste au plus pessimiste, elle analyse les conséquences environnementales, sociales et économiques du réchauffement climatique sur le littoral.
Des politiques coordonnées à l’échelle mondiale
Classées en trois familles, la première appelée «Adaptation littorale» part de l’hypothèse qu’une coopération internationale entre les États sera menée rapidement pour décarboner les activités. Dans le même temps, des actions seront réalisées au niveau local pour protéger le littoral. Cette famille regroupe quatre scénarios. Ce sont les plus vertueux de cette projection.
Le plus positif, nommé « Maîtrise climatique », décrit des villes côtières se transformant progressivement mais sans pour autant remettre en cause le modèle actuel de développement urbain. Elles seront malgré tout confrontées à des événements climatiques extrêmes. Et ponctuellement, d’importants impacts seront observés sur certains littoraux les plus exposés aux aléas.
Dans le scénario « Villes résilientes », là encore, l’élévation du niveau de la mer sera relativement limitée. Face aux événements climatiques extrêmes, des barrières artificielles ou naturelles seront construites le long des zones urbaines littorales. Ces dernières anticiperont aussi ces événements grâce aux technologies numériques. Les infrastructures énergétiques, de communication et de transport seront renforcées pour faire face aux aléas. Cependant, les zones à faible densité de population, délaissées et peu concernées par les mesures d’adaptation, seront très exposées aux risques de submersion.
La réaction sera plus marquée dans les scénarios « Sobriété et anticipation ». On assistera en effet à une stratégie de repli à l’intérieur des terres. Grâce au développement d’une culture de la sobriété dans l’ensemble des domaines d’activité économique, les émissions de gaz à effet de serre se réduiront. Au final, le niveau d’élévation de la mer sera limité.
Quant au scénario « Adaptation prioritaire et atténuation tardive », il se déroulera en deux temps. Jusqu’en 2060, chaque État agira isolément et concentrera ses efforts à l’adaptation de son littoral. Ensuite, face à l’intensité des conséquences du changement climatique, de fortes politiques seront coordonnées à l’échelle mondiale et permettront de limiter la hausse du niveau de la mer à 1m.
Un demi-siècle d’inaction
La famille nommée « Déni » regroupe trois scénarios. L’étude part des hypothèses que les États n’agiront pas avant 2050. Puis, les politiques publiques réagiront enfin face à la recrudescence des catastrophes. Le scénario du « Déni à la réaction » se traduira ainsi par une l’élévation du niveau marin et des événements extrêmes et dévastateurs. Face à cette réalité, la prise de conscience sera alors collective. Décideurs, société civile, citoyens jugeront que la lutte contre les conséquences du dérèglement climatique devient une priorité absolue. Bien que tardives, des actions d’atténuation du changement climatique seront engagées de manière durable. Et d’ambitieuses stratégies d’adaptation du littoral se développeront à l’échelle du globe.
Dans le scénario « Abandon du littoral », les élites organiseront un repli systématique de leurs intérêts les plus stratégiques vers l’arrière-pays. Elles délaisseront les franges littorales les plus vulnérables. Dépendantes des ressources locales et de l’accès aux terres, les populations les plus pauvres de ces territoires demeureront livrées à elles-mêmes. A la toute fin du siècle, face à la répétition des catastrophes humanitaires, des efforts minimaux d’adaptation du littoral seront consentis. L’objectif étant de prévenir des phénomènes de migrations massives vers l’intérieur des terres.
Le scénario « Passivité » conduit à des conséquences extrêmes. Face à l’inaction, des flux migratoires importants s’intensifieront au fur à mesure de l’élévation du niveau de la mer. Sous l’effet de l’emballement du moteur climatique, les écosystèmes se dégraderont de façon souvent irréversible. Et la vitesse de recul du trait de côte s’accélérera progressivement. La situation deviendra catastrophique. Des crises environnementales, économiques et humanitaires se répéteront. Les rapports sociaux se brutaliseront.
Une logique du « chacun pour soi »
Une dernière famille, « Monde fragmenté », se traduit par des politiques locales et nationales menées de manières différentes et parfois contradictoires. Elles conduiront à une dynamique à plusieurs vitesses selon la logique du «chacun pour soi». Cette famille regroupe un scénario unique nommé « Fragmentation persistante » dans lequel les États les plus riches mèneront de front une politique de lutte contre l’élévation du niveau de la mer. Ils réaliseront un retrait stratégique progressif des zones littorales les plus vulnérables. A l’inverse, les États les plus pauvres n’anticiperont pas les changements littoraux. Les mégalopoles côtières se développeront toujours et leur vulnérabilité s’accroîtra. Cette logique duale se maintiendra et s’accentuera durant le siècle avec de nombreuses variantes intermédiaires.
Pour les experts de cette étude, la gouvernance sera un levier majeur pour limiter la remontée du niveau de la mer. Ils restent neutre vis à vis du scénario le plus probable en l’état car de très nombreux paramètres rentrent en jeu dans le réchauffement climatique et la remontée du niveau de la mer. Sans être alarmiste, ils avertissent qu’en l’absence de politiques publiques volontaristes au niveau global d’ici 2040, des situations graves ou extrêmes pourront se développer.
Source : d’après le rapport d’étude réalisé par l’Alliance nationale de recherche pour l’environnement
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