La multiplication des véhicules électriques sur nos routes pose de nombreuses problématiques techniques aux gestionnaires de réseaux électriques. L’appel de charge de ces VE risquerait de mettre en péril le réseau. Le projet GridMotion vise à donner les clés d’un futur équilibre technico-économique entre réseau et VE.
Imaginez 1 million d’automobilistes branchant la prise de leur véhicule électrique de retour chez eux vers 19h, heure de pointe de la consommation électrique en France. C’est ce qu’ont fait le constructeur automobile PSA, Direct Energie, Enel, Nuvve, Proxiserve et l’Université Technique du Danemark regroupés dans le projet GridMotion. « Intégrer le nombre grandissant de VE, sans que ces derniers aient un impact négatif sur le réseau électrique, tel était notre problématique », explique Nicolas Leclère, responsable de l’optimisation des solutions d’électrification chez PSA. Les membres du projet GridMotion souhaitent développer un modèle fiable d’intégration du véhicule électrique, voire plus encore, en faire un outil de flexibilité au service du réseau.
Cherche partenaire particulier
PSA recherche 75 utilisateurs de véhicules électriques de deux types pour participer à cette expérience qui durera deux ans. La première catégorie (50 VE) concerne les propriétaires particuliers de Peugeot iOn, Partner Electric, Citroën C-ZERO ou Berlingo sortis après le 1er janvier 2015. Ils testeront la recharge unidirectionnelle intelligente. Direct Energie proposera, grâce à des applications mobiles dédiées, aux utilisateurs de VE des offres de recharge plus ou moins économiques en fonction de l’heure pour orienter leurs choix vers les tranches nocturnes. Le fournisseur joue ainsi le rôle d’agrégateur avec le gestionnaire, Réseau de Transport d’Electricité (RTE), en lui offrant un service de flexibilité bien utile pour lisser la pointe électrique.
La seconde catégorie, 15 VE B2B de type Peugeot iOn ou Citroën C-ZERO, expérimentera la recharge bidirectionnelle (charge/décharge) apportée par Enel. Ces véhicules participeront à la phase la plus complexe de l’expérience. Ils fourniront des services d’équilibrage réseau grâce à de courts cycles de chargement et de déchargement. Les batteries des VE disséminés sur tout le réseau offrent une solution pour équilibrer sa fréquence. « L’innovation ne réside pas tant dans notre rôle d’opérateur de flexibilité car nous offrions déjà des services d’effacement et de réserves à RTE. Mais plutôt dans le potentiel que représenterait des millions de VE, comme autant de points diffus de stockage d’énergie, pour créer une chaîne robuste et flexible », indique Louis Duperry, directeur Innovation de Direct Energie. En fonction des besoins du réseau, le fournisseur indépendant peut ajuster du jour au lendemain à la baisse la puissance de ses clients, c’est l’effacement. Être opérateur de réserve primaire consiste à ajuster la consommation en temps réel pour aider RTE à équilibrer la fréquence.
Equilibre technico-économique
Au-delà de l’innovation technique, les partenaires du projet GridMotion souhaitent également valider le modèle économique car comme le rappelle Louis Duperry : « Rien ne pourra se faire sans le client. L’innovation économique résidera dans notre capacité à créer une relation client qui permette de manipuler les consommations d’énergie tout en donnant systématiquement la priorité au consommateur». Direct Energie a élaboré plusieurs modèles d’incitations, inspirés en partie de ses activités existantes d’effacement, pour restituer au client une partie de la valeur générée par les services réseau. « Notre d’expérience de l’effacement dans le chauffage résidentiel par exemple montre qu’une baisse de la facture est moins perçue par les consommateurs, en raison des prix bas de l’électricité en France, que la fourniture gratuite de services ou produits », détaille Louis Duperry.
Cette grande chaîne de valeur intégrée de l’électricité n’est pas sans rappeler la vision d’Elon Musk qui cherche à travers ses différentes compagnies à créer une offre tout électrique verticalement intégrée de la production d’électricité renouvelables (notamment photovoltaïque) à la voiture électrique (Tesla) le tout piloté par un réseau intelligent. Un écosystème viable uniquement à la condition de résoudre la double équation technico-économique.
Romain Chicheportiche
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