Le 4 avril dernier, GRDF tenait sa conférence de presse annuelle. L’occasion pour le distributeur de gaz de dévoiler son plan de décarbonation lui permettant d’atteindre la trajectoire «well below 2°C» de l’accord de Paris. GRDF en a également profité pour présenter son bilan carbone complet. Une première mondiale pour un distributeur de gaz.
Selon Laurence Poirier-Dietz, la directrice générale de GRDF « atteindre la neutralité carbone en 2050 n’est pas une option ». Pour GRDF, distribuer du gaz décarboné est donc non seulement possible, mais souhaitable, car l’électrification ne deviendra pas la solution unique.
Objectif : réduire les émissions de carbone sur l’ensemble des scopes
Convaincu de la possibilité de distribuer du gaz décarboné, GRDF s’est fixé plusieurs objectifs de réduction de ses émissions directes et indirectes, en engageant un véritable projet d’entreprise. Dans son communiqué de presse du 3 avril, le distributeur de gaz explique avoir tenu compte, pour son bilan carbone, de l’ensemble des scopes. L’utilisation du gaz par ses clients (Scope 3), qui est le poste responsable de la majorité des émissions, n’est donc pas oubliée.
Si GRDF a déjà constaté une baisse de 18 % de l’empreinte carbone de ses clients gaz entre 2009 (58 MtCO2eq) et 2023 (47,3 MtCO2eq), l’objectif pour 2030 est de passer en dessous de la barre des 39 MtCO2eq.
Trois leviers pour distribuer du gaz et décarboner
Comment GRDF compte-t-il atteindre cet objectif ambitieux ? En jouant sur trois leviers, dont le principal concerne bien entendu la consommation de gaz.
GRDF va ainsi poursuivre sa stratégie d’accompagnement des clients consommateurs vers plus de sobriété en proposant des solutions pragmatiques pour chaque usage. Par ailleurs, les actions de sobriété qui ont été mises en place en 2022 sont désormais acquises, puisque ses effets perdurent d’année en année.
GRDF continuera en outre de s’appuyer sur ses compteurs communicants, dont la campagne de déploiement vient de prendre fin en 2023, faisant de GRDF le distributeur de gaz le plus en avance au monde sur le sujet. Lors de la conférence de presse, Laurence Poirier-Dietz a notamment souligné toute l’importance des données de comptage qui « permettent aux gestionnaires de parcs (bailleurs et collectivités locales) de connaître les consommations sur l’ensemble d’une résidence et de prioriser leurs choix en matière de rénovation des bâtiments. »
La performance des équipements jouera aussi un rôle essentiel dans la décarbonation, la France étant en retard par rapport à d’autres pays d’Europe sur l’amélioration de leur efficacité énergétique. Comme moins de la moitié des chaudières françaises sont efficaces d’un point de vue énergétique (contre 85 % voire 90 % pour l’Allemagne et les Pays-Bas !), la marge de progression est significative, l’installation de chaudières à très haute performance énergétique (THPE) pouvant faire économiser jusqu’à 30 % de gaz !
GRDF, confiant sur l’avenir des gaz verts
Le second levier de décarbonation proposé par GRDF porte sur l’utilisation de gaz verts, avec un objectif de 20 % de gaz verts dans les réseaux en 2030, en majorité du biométhane.
Laurence Poirier-Dietz semble confiante et en a profité pour rappeler que l’objectif de 6 TWh par an de capacité qui avait été fixé par la BPE pour 2023 a été largement dépassé, puisque 12 TWh (de biométhane) ont déjà été injectés, soit l’équivalent de deux réacteurs nucléaires. Selon GRDF, cette trajectoire va se conforter dans les années à venir, permettant d’atteindre l’objectif de 60 TWh de capacité en 2030, soit cinq fois plus qu’actuellement.
Pourquoi une telle confiance ? D’une part, la méthanisation, qui est actuellement le principal process de production de gaz vert, est en plein développement, puisque la France dispose du plus grand parc au monde de sites de méthanisation en injection. Entre décembre 2018 et décembre 2023, le nombre de sites est en effet passé de 76 à 652 et la France devrait compter plus de 740 sites à la fin de l’année 2024, selon GRDF.
Le développement de la méthanisation « à la Française », qui est essentiellement agricole, devrait donc permettre d’atteindre les objectifs pour 2030, grâce à la filière agricole autonome (423 unités en 2023), mais aussi par la mise en place d’une filière territoriale (136 unités en 2023) avec de gros porteurs de projets, énergéticiens, coopératives agricoles, etc.
D’autre part, GRDF pourra également compter sur la montée en puissance de la méthanisation des boues et des eaux usées issues de stations d’épuration urbaines, qui présente un fort intérêt pour le monde de l’eau, mais aussi sur la méthanisation territoriale, le biogaz issu des ISDND¹ et la filière biodéchets.
Et au-delà de 2030 ? Pour atteindre ses objectifs à très long terme, c’est-à-dire 100 % de gaz vert en 2050, GRDF compte aussi énormément sur d’autres technologies de production de biogaz, actuellement peu développées ou encore à l’échelle pilote : la pyrogazeification, la gazéification hydrothermale, le Power-To-Méthane et l’hydrogène.
Décarbonation de l’industrie : quelles sont les actions à mener ?
En ce qui concerne l’industrie, GRDF rappelle que 70 % des procédés thermiques industriels ne pourront pas être électrifiés (29 % au maximum seront électrifiables à l’horizon 2035). Disposer d’équipements industriels au gaz toujours plus performants est donc une nécessité.
GRDF souligne ainsi que le remplacement des brûleurs d’ancienne génération permet de gagner jusqu’à 60 % d’énergie et que l’amélioration des rendements de process représente un potentiel de chaleur fatale valorisable supérieur a 109 TWh !
L’intégration de gaz vert dans la consommation des industriels via le recours au Biogas Purchase Agreement (BPA) va également se développer, sur l’exemple de deux gros consommateurs de gaz, Arkema et Saint-Gobain.
Enfin, l’avenir est aussi aux technologies de captage, de stockage et de valorisation du carbone, à l’instar de la chaudière CH0C, un démonstrateur basé sur la technologie d’oxycombustion dont la mise en route est prévue pour septembre 2024.
¹ Les Installations de Stockage des Déchets Non Dangereux récupèrent et valorisent le biogaz émis naturellement par les déchets stockés.
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