Un extrait de « L’eau à l’ère des transitions numérique, énergétique et écologique », par Jean-Pierre DAL PONT, Sophie ALTMEYER
Les mers et les océans couvrent 71 % de la surface terrestre. Ils sont inséparables de la vie humaine.
L’eau s’évapore des mers et des océans puis se dissipe dans l’atmosphère, avant de retomber sur les continents. Les précipitations peuvent ensuite être stockées dans les sols, reprises par les racines et évapotranspirées par les diverses végétations, ou bien s’écouler dans les rivières, fleuves et nappes. La ressource annuelle d’eau douce renouvelable est estimée à 40 000 km3, soit environ 5 600 m3 par habitant.
Ressources et usages de l’eau
Sous l’effet conjugué de la croissance démographique, du développement socio-économique et de l’évolution des modes de consommation, l’utilisation de l’eau dans le monde augmente annuellement d’environ 1 % depuis les années 1980. La demande mondiale en eau devrait continuer d’augmenter à un rythme similaire jusqu’en 2050 (soit 20 % à 30 % de plus que le niveau actuel d’utilisation), et ce principalement en raison de la demande croissante de l’industrie et des ménages.
Avec 70 % des consommations, l’agriculture est la première source d’utilisation de l’eau dans le monde. Les terres équipées pour l’irrigation couvrent 325 millions d’hectares, soit 20 % des terres cultivées, et fournissent à elles seules 40 % de la production agricole. Entre 1973 et 2013, la superficie irriguée a augmenté de plus de 60 %. La consommation française en eau est de 16 milliards de m3/an, répartie à parts égales entre l’eau potable, l’arrosage, l’irrigation agricole et l’industrie (énergie exclue).
L’industrie est le deuxième plus grand consommateur d’eau dans le monde. Les plus gros consommateurs industriels d’eau sont les secteurs de la chimie, du papier-carton et de l’agroalimentaire. Chaque produit consommé a, en effet, nécessité des quantités non négligeables d’eau lors de chacune des étapes de sa production.
Les menaces sur l’eau
L’activité humaine et les ouvrages construits par l’homme ont souvent des répercussions sur les écosystèmes. Ainsi les grands barrages réduisent, sur le réservoir, le volume d’eau total disponible pour l’évaporation.
Les zones humides ont, elles, perdu au cours du XXe siècle les deux tiers de leur superficie en France.
La pollution de l’eau, essentiellement d’origine anthropique, est également un problème majeur de l’humanité. Les mers et les océans sont ainsi devenus le réceptacle de tous les rejets de notre société de consommation, comme en témoignent ces « continents » qui dérivent au gré des courants marins, constitués de résidus des matières plastiques (pneumatiques, particules issues des machines à laver le linge…).
Plus de 80 % de l’eau provenant des activités humaines est rejetée dans le milieu naturel sans traitement et est donc source de pollution. Les pays riches comme les pays pauvres connaissent des niveaux élevés de pollution de l’eau. Les nappes phréatiques, surexploitées, n’ont plus la capacité de se renouveler.
La pollution diffuse provient de multiples petites sources de pollution. Elle est souvent peu visible et les origines peuvent être difficilement identifiables. Toutefois, elle détériore la qualité des masses d’eau. Les principaux polluants concernés (nitrates, produits phytopharmaceutiques et matières en suspension) rejoignent les milieux aquatiques de façon indirecte, par ou à travers le sol, sous l’influence des précipitations ou des irrigations. Les matières organiques, substances azotées, métaux et métalloïdes présentent également un risque extrême.
Les sources de pollution peuvent rejoindre le milieu, soit par un rejet ponctuel (accident, rejet d’une usine dans un cours d’eau, marée noire…), soit de manière diffuse (engrais et produits phytosanitaires agricoles, médicaments, peintures…).
La rapidité d’une pollution de l’eau varie selon son origine. La pollution atmosphérique mettra ainsi dix jours pour contaminer le sol. En revanche, il faudra un certain temps pour que « le pic » de pollution décroisse et beaucoup plus longtemps pour que l’eau retrouve son aspect originel.
L’eau et le changement climatique
Du fait de sa répartition inégale dans le monde et des effets du changement climatique qui accentuent les épisodes de stress hydrique, l’eau revêt une importance géopolitique qui croît encore avec l’augmentation de la population mondiale. L’accès à l’eau représentera ainsi dans les années à venir une source de conflits frontaliers grandissante.
Une étude estime ainsi que l’humanité ne doit pas dépasser neuf limites pour ne pas compromettre les conditions favorables dans lesquelles elle a pu se développer et pour continuer à vivre dans un écosystème sain. En 2015, trois de ces limites sont déjà dépassées.
Au niveau de l’eau, des défis colossaux se dressent pour les humains :
- pallier les manques d’assainissement et d’accès à l’eau potable ;
- pérenniser l’accès à une eau en quantité et de qualité, en trouvant notamment des solutions pour lutter contre les micropolluants ;
- imaginer des modes de fonctionnement moins gourmands en eau, que ce soit pour l’agriculture ou l’industrie ;
- créer des territoires résilients aux évènements extrêmes pour surmonter des épisodes d’inondations ou encore de canicules, qui se multiplieront avec le changement climatique ;
- préserver les écosystèmes et la biodiversité.
Les progrès récents dans le domaine du numérique ouvrent de larges perspectives dans les modes de gestion des réseaux d’eau et des services urbains et permettent d’envisager des solutions pour répondre aux évolutions des années à venir, notamment la détection et l’identification d’une fuite d’eau dans les canalisations avant compteur. Sur le terrain, les principaux outils de détection des fuites sont la sectorisation et l’écoute acoustique du réseau.
La raréfaction de la ressource entraîne le besoin de trouver de nouvelles sources d’approvisionnement. La réutilisation des eaux sur site industriel est déjà assez couramment mise en œuvre mais la REUSE (réutilisation de l’eau usée traitée) est encore peu pratiquée. En France, moins de 1 % des eaux usées épurées sont réutilisées. En Europe, l’Italie avec 8 % et l’Espagne avec 14 % sont ainsi loin devant. Par ailleurs, certaines zones où la ressource en eau est faible ont déjà largement mis en œuvre des technologies pour réutiliser leurs eaux usées.
Pour sa part, la France devrait connaître un déficit en eau potable de 2 milliards de m3 par an à l’horizon 2050 pour les secteurs de l’alimentation, de l’agriculture et de l’industrie.
Quelles réglementations ?
La directive-cadre sur l’eau fixe comme objectif de rétablir – ou de maintenir lorsque c’est déjà le cas – le bon état des milieux aquatiques, c’est-à-dire des cours d’eau, des plans d’eau, des eaux littorales et des eaux souterraines. Elle vise à protéger la santé des personnes des effets néfastes de la contamination des eaux destinées à la consommation humaine en garantissant la salubrité et la propreté de celles-ci.
La gestion de l’eau est conduite à l’échelle des bassins versants des grands fleuves européens, y compris de manière transfrontalière lorsque ces fleuves traversent plusieurs pays. En France, les plans de gestion prennent la forme de schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE).
Les coûts de l’eau potable et de l’assainissement sont pris en charge par les utilisateurs de l’eau potable. Par ailleurs, les usagers de l’eau et des milieux aquatiques participent financièrement aux actions de préservation et d’amélioration de l’état des milieux aquatiques, en particulier par le biais de taxes.
Enfin, la LEMA (loi sur l’eau et les milieux aquatiques) crée quant de nouveaux outils de lutte contre la pollution de l’eau et l’altération du fonctionnement des milieux aquatiques, en particulier une « police de l’eau » unique, qui renforce le rôle des collectivités dans la gestion des services publics de l’eau et de l’assainissement.
Exclusif ! L’article complet dans les ressources documentaires en accès libre jusqu’au 14 novembre 2024 !
L’eau à l’ère des transitions numérique, énergétique et écologique, par Jean-Pierre DAL PONT, Sophie ALTMEYER
Cet article se trouve dans le dossier :
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