France Stratégie publie un document de travail sur l'évolution globale de la consommation énergétique du numérique. L’institution rattachée au Premier ministre veut agir pour éviter un doublement de cette consommation d’ici 2025.
« Si rien n’est fait pour contenir la croissance du parc d’équipements et l’explosion du trafic, un doublement de la consommation énergétique du numérique devrait être constaté entre 2017 et 2025 », s’alarme France Stratégie dans un nouveau rapport. L’institution reprend à son compte les projections du Shift Project. Selon elles, la consommation énergétique mondiale liée au numérique est passée de 2 000 à 3 000 térawattheures (TWh) par an, entre 2013 et 2017, pour s’établir à 14 % de la consommation électrique et environ 2,7 % de la consommation globale d’énergie finale au niveau mondial. Il s’agit d’une hausse de 50 %, contre +10 % pour la consommation électrique mondiale sur la même période. La croissance de la consommation du numérique devrait rester sur le même rythme pour atteindre entre 5 700 et 7 300 TWh en 2025, soit entre 4,7 % et 6 % de la consommation globale d’énergie finale. Fin 2017, le numérique représentait déjà 3,4 % des émissions totales de gaz à effet de serre et pourrait atteindre 7,6 % en 2025.
De quelle consommation parle-t-on ?
La consommation considérée comprend l’intégralité de l’infrastructure du numérique. Le principal poste est la production des équipements : 45 % de la consommation totale du secteur en 2017. On trouve ensuite les data centers (20 %), les équipements terminaux (19 %) et les réseaux (16 %). L’explosion du trafic global des data centers, multiplié par 4 entre 2011 et 2016 et porté par l’essor du cloud, en fait le segment qui progresse le plus rapidement. Sa consommation augmente de 16,4 % sur la période.
La société Cisco attend encore une multiplication par trois du trafic des data centers sur les cinq prochaines années. Dans la projection médiane, la production reste le principal segment de consommation en 2025, autour de 39 %, suivie par les data centers (30 %), les équipements terminaux (14 %) et les réseaux (16 %).
Les usages en question
Relevons quelques chiffres importants pour comprendre l’évolution des usages. La société Cisco estime que l’ensemble des équipements connectés à Internet, comprenant les objets connectés devrait passer de 18,4 milliards en 2019 à 29,3 milliards en 2023. Le trafic mobile représente environ 9 % du trafic mondial d’Internet mais augmente rapidement : il devrait représenter 20 % en 2022 prévoit Cisco. La vidéo représente déjà 75 % du trafic en 2017 et devrait atteindre 82 % en 2022. À lui seul, le service de vidéos Netflix représente 15 % du trafic Internet mondial, 24 % en France. L’essor de la haute définition, très consommatrice en bande passante participe activement à la hausse de la consommation.
En plus de la multiplication des vidéos, les experts craignent les effets de l’essor de l’Internet des objets sur les consommations énergétiques du numérique. Si la consommation énergétique de l’Internet des objets est encore peu étudiée, la multiplication attendue de ces objets devrait avoir un impact important. « Cette croissance devrait être essentiellement portée par la consommation des dizaines de milliards d’objets attendus, tandis que la consommation supplémentaire qu’ils induisent en amont dans les réseaux télécoms et les data centers devrait rester faible, analyse France Stratégie. La consommation liée à la production qui risque d’être élevée, n’est à ce stade pas documentée. »
De nouveaux moyens de maîtrise de l’énergie à déployer
Face à ces projections, France Stratégie assure que la réponse traditionnelle reposant uniquement sur les gains énergétiques liés au progrès technologique sera insuffisante. Les efforts se concentrent actuellement sur les grandes infrastructures numériques, à savoir les réseaux télécoms et les data centers. Certes, les réseaux en fibre optique consomment beaucoup moins que les réseaux cuivre, et la 5G consommera moins que la 4G à débit équivalent. Mais France Stratégie identifie trois facteurs qui empêchent une maîtrise efficace de cette consommation.
Tout d’abord, l’institut fustige la mauvaise gestion des infrastructures, via l’existence en parallèle de plusieurs générations de réseaux télécoms et le manque d’optimisation du taux d’utilisation des équipements dans les data centers. En plus, il constate un accroissement constant des usages et du trafic Internet. En particulier, la multiplication du trafic de données liées aux vidéos et la hausse des connexions Internet ne permettent pas de maîtriser la consommation globale. Fin 2018, 51,2 % de la population mondiale disposait d’une connexion Internet selon l’Union internationale des télécommunications (UIT), chiffre qui est amené à augmenter rapidement. Enfin, France Stratégie observe que le progrès technologique influe peu sur la consommation énergétique liée à la production des équipements et laisse donc de côté un poste majeur de consommation.
Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE