Prévoir le comportement à la rupture de matériaux fragiles tels que le verre qui se cassent par propagation de fissures nécessite en particulier de connaître la vitesse d’avancée de la fissure et de comprendre les facteurs dont elle dépend. Jusqu’à présent, les connaissances théoriques se fondaient sur une vitesse maximale égale à celle des ondes acoustiques de surface dans le matériau, dite « vitesse de Rayleigh ».
Or des chercheurs du CEA-IRAMIS (Institut Rayonnement Matière de Saclay), en collaboration avec leurs collègues de deux autres laboratoires, le Laboratoire « Surface du Verre et Interfaces » ou SVI (CNRS/Saint-Gobain), et le Laboratoire de Tribologie et Dynamique des Systèmes ou LTDS (CNRS/Ecole Centrale de Lyon/Ecole Nationale d’Ingénieurs de Saint-Etienne), travaillant sur des échantillons de plexiglas qu’ils ont cassé en faisant varier la force appliquée pour ouvrir la fissure, viennent de démontrer qu’il n’en est rien et que la vitesse des microfissures engendrées sur des défauts du matériau et observées à une échelle suffisamment fine pour pouvoir être isolées les unes des autres est quatre fois plus faible qu’attendu. Et ce n’est que par un effet géométrique de rencontre de ces multiples microfissures que la fracture globale est finalement si rapide.
Vue au microscope (lumière polarisée) d’un exemple de marque laissée par une microfissure sur une surface de rupture rapide d’un échantillon de Plexiglas. Dimensions de l’image : 128 micro-m – 137 micro-m
Les résultats de ces travaux, publiés dans la revue PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences of the United of America), remettent donc en cause la vision classique de la rupture. En effet, ils montrent que toutes les microfissures se propagnent à la même vitesse d’environ 200 m/s, indépendamment du niveau de force appliquée pour ouvrir la fissure principale.
Un comportement observé à l’échelle microscopique très différent de celui observé à grande échelle, où la vitesse de fracture augmente avec la force, celle-ci pouvant atteindre 500 m/s. La prise en compte du rôle important joué par les défauts microscopiques présents dans un matériau sur le comportement en rupture de ce dernier devrait permettre ainsi de mieux apprécier, voire à terme d’améliorer, la résistance à la rupture des matériaux.
Qui plus est, la méthodologie développée au cours de cette étude pourrait par exemple fournir des indications sur les causes de l’effondrement d’une structure uniquement à partir de l’analyse des empreintes laissées sur les surfaces de rupture.
- En haut : vue au microscope du réseau d’empreintes laissées par la nucléation, croissance et coalescence des microfissures, lors de la fracture rapide d’un échantillon de Plexiglas. Dimensions de l’image : 2,5 mm x 3,5 mm.
- En bas : reconstruction numérique du réseau observé.
Source : Bulletins électroniques
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