Faire la pluie (mais pas le beau temps !) pourrait devenir une réalité grâce aux travaux de chercheurs américains. En perturbant l’électricité statique des nuages, l’utilisation de deux faisceaux laser permettrait de provoquer pluie ou éclairs. Ces travaux ont été publiés le 23 mars 2014 dans la revue Nature Photonics, sous le titre « Externally refuelled optical filaments ».
Des chercheurs du Collège d’optique et de photonique de l’Université centrale de Floride et de l’Université d’’Arizona veulent pouvoir déclencher la pluie quand bon leur semble. Comme dans les nuages, la pluie et les éclairs sont provoquées par une forte accumulation d’électricité statique, il serait possible de stimuler ces particules chargées avec le bon laser pour déclencher la pluie au « bon » endroit et au « bon » moment.
Des chercheurs ont auparavant tenté leur chance dans la quête de « faire pleuvoir à la demande ». Globalement, tous les projets reposaient sur l’émission d’une seule impulsion laser très puissante, pendant un temps très court. « Quand un faisceau laser devient assez intense, il se comporte différemment qu’habituellement – il s’effondre sur lui-même », explique Matthew Mills, étudiant ayant participé à cette nouvelle étude sur le site de l’Université centrale de Floride. « L’effondrement devient si intense que les électrons dans l’oxygène et l’azote de l’air sont arrachés créant un plasma – une sorte de soupe d’électrons », poursuit-il.
Le plasma nouvellement créé tente alors de propager le faisceau, provoquant une lutte entre sa diffusion et son effondrement. Cette dualité provoque un « filament » de lumière, une sorte de « guirlande lumineuse » constituée d’air ionisé (c’est-à-dire constituée de particules chargées), qui conduit l’électricité. Cependant, ce filament ne se propage que sur de faibles distances, le faisceau laser s’effondrant trop rapidement. D’où l’objectif jusque-là non atteint de maîtriser la formation de ce filament pour créer de la foudre ou de pluie de façon contrôlée !
Pour résoudre le problème, les chercheurs proposent dans leur étude d’entourer le faisceau principal à haute puissance d’un second faisceau, moins puissant, qui agirait comme un réservoir d’énergie permettant d’alimenter continuellement la première impulsion. Ce second faisceau permettrait de maintenir le faisceau principal sur de plus grandes distances.
Emettre sur de longues distances pour ne pas se faire foudroyer
Si l’on veut provoquer des éclairs à distance, il faut que le faisceau laser puisse être émis d’une distance suffisamment éloignée pour ne pas risquer de se faire foudroyer. « Ce qui serait bien, c’est d’avoir une manière détournée qui nous permet de produire un filament arbitrairement long. Il s’avère que si vous enveloppez le filament d’un faisceau creux, en forme de donut, de faible intensité et que vous le faites avancer doucement vers l’avant, vous pouvez obtenir cette extension arbitraire », explique à nouveau Matthew Mills.
« Comme nous pouvons contrôler la longueur du filament avec notre méthode, on pourrait provoquer les conditions requises pour provoquer une averse à distance. Au final, vous pourriez contrôler artificiellement la pluie et les éclairs à grande échelle grâce à ces idées », ajoute-t-il.
Si l’équipe a réussi à multiplier la longueur de son faisceau par sept, celui-ci ne dépasse pour l’instant les deux mètres de long. Mais ces filaments habillés pourraient se propager sur 50 mètres ou plus ! Le ministère de la Défense américaine s’intéresse donc fortement au projet aux vues de ses applications géostratégiques et a accordé une subvention de 7,5 millions de dollars au projet pour développer cette technologie.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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