Sur les rails depuis quelques années, la compensation carbone volontaire voit son marché soumis à une plus forte demande. Les entreprises souhaitant utiliser ce mécanisme doivent être vigilantes à choisir des projets de qualité.
Plusieurs compagnies aériennes telles qu’Air France, Finnair ou British Airways proposent un système dit de « compensation carbone » afin de participer à la lutte contre le réchauffement climatique. Dans le cadre de leur stratégie climat, ces compagnies donnent ainsi la possibilité à leur client de payer un coût additionnel au billet afin de compenser les émissions de CO2 émises au cours de leur voyage et qui servira à financer des projets de stockage du carbone, par exemple via la préservation de forêts ou la création de projets solaires. Un moyen pour les voyageurs de prendre en compte leur impact sur le climat, et pour les compagnies de montrer leur engagement à aider le financement de projets de lutte contre le dérèglement climatique.
Ce système a été rendu possible par le protocole de Kyoto, élaboré en 1997 et réellement entré en vigueur en 2005. Ce texte international, complété par l’accord de Doha en 2012 et renouvelé fin 2020, engage les pays à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES). Il ouvre aussi la possibilité d’utiliser des mécanismes de marché pour que les plus vertueux échangent des crédits carbone avec les moins vertueux. À ces mécanismes obligatoires (mécanisme de développement propre, mise en œuvre conjointe, échange de quotas d’émissions) s’ajoute un marché de la compensation volontaire. « Il s’est vraiment développé depuis l’Accord de Paris en 2015 quand les entreprises ont été appelées à agir. Non encadrée légalement, la compensation carbone volontaire a créé ses propres référentiels de qualité, ses codes de bonnes pratiques, afin d’éviter le greenwashing », explique Mathilde Mignot, responsable des partenariats et du portefeuille de projets de compensation au pôle « Solutions fondées sur la nature » d’EcoAct, une société du groupe Atos. Chaque crédit carbone correspond à une tonne de CO2 captée ou évitée : il est noté dans un registre quand le projet est effectif, et il en est retiré quand une entreprise l’achète pour compenser son émission d’une tonne de CO2.
Pousser les projets ayant le plus d’impacts positifs
La qualité des projets (voir encadré) va être d’autant plus cruciale que la demande de crédits carbone est en train d’exploser. 2021 a été une année charnière dans le monde, selon les professionnels de la compensation carbone volontaire. Beaucoup d’entreprises anticipent des besoins en crédit carbone pour satisfaire leurs objectifs climatiques : la demande pour 2030 a ainsi été multipliée par 15. Le prix spot du crédit carbone, auparavant à moins d’un dollar, s’affiche désormais entre 3 et 6 $. On est certes loin du marché des quotas européens qui s’est envolé depuis le début de l’année entre 70 et 80 €/tCO2, mais c’est tout de même une importante accélération portée par une offre plus grande que la demande désormais.
Comment s’y prendre alors ? « Les entreprises doivent d’abord faire leur bilan carbone pour identifier leurs émissions directes (scopes 1 et 2) et indirectes (scope 3). Elles peuvent le compléter par des analyses de cycle de vie de leurs produits ou d’impacts environnementaux, notamment sur la biodiversité. Ensuite il faut définir une stratégie de réduction de ces émissions sur plusieurs années (économies d’énergie, approvisionnement en énergies renouvelables, moyens de transport décarbonés, etc.). Pour les émissions les plus difficiles à réduire, la stratégie peut intégrer la compensation carbone volontaire », détaille Mathilde Mignot.
Des sociétés accompagnent les entreprises dans ce type de démarche, comme EcoAct qui appuie le choix de ses propres projets sur des standards de qualité (Gold Standard, Verra) afin d’être sûr de leur pertinence en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur plusieurs années. « C’est particulièrement vrai des projets forestiers dont il faut vérifier, par des audits réguliers, qu’ils se développent comme prévu. Plus globalement, l’intérêt des solutions fondées sur la nature est de fournir de vrais puits de carbone, mais leur suivi est plus complexe que d’autres solutions de type technologique », ajoute l’experte.
La valeur des crédits carbone issus des solutions fondées sur la nature est d’autant plus grande que les projets génèrent d’autres bénéfices : création d’emplois (par exemple par la plantation de mangroves), plus grande égalité femme/homme, amélioration de la qualité de l’air en installant des foyers de cuisson plus efficaces, retour de la biodiversité, etc. « Les entreprises doivent donner du sens à leur stratégie de compensation volontaire, d’où l’intérêt de choisir des projets avec une forte plus-value sociale et environnementale. Chez EcoAct nous identifions de tels projets en travaillant avec les populations locales » signale Mathilde Mignot.
Quels projets pour la compensation carbone volontaire ?
Les projets ont d’abord été développés dans les pays en développement pour aider les populations ayant moins de ressources et souvent les premières victimes du changement climatique. Les solutions privilégiées sont par exemple le reboisement en forêt, la plantation de mangroves, le déploiement de moyens de cuissons efficaces, la production d’énergies renouvelables, l’accès à l’eau. Certains projets de captation du CO2 dans l’air commencent même à émerger.
Des approches domestiques, au niveau national, ont été également lancées via le Label Bas Carbone et ouvrent de nouvelles pistes comme des modes de gestion des exploitations agricoles captant plus de CO2.
Parmi les bonnes pratiques relevées par l’Ademe, le choix de projets labellisés est essentiel, ainsi que le recours à des solutions qui ont des impacts positifs sur les objectifs de développement durable.
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