Des chercheurs ont conçu un dispositif pour détacher des gouttes d'eau ainsi que des boues à la surface de matériaux, et qui est adaptable sur tous types de supports rigides. Un partenariat est déjà engagé avec un industriel de l'automobile.
Vitres, pare-brise, optiques de phares, de caméras, de capteurs… La surface de nombreux matériaux doit rester propre en permanence pour conserver sa fonctionnalité. Face à ce constat, l’IEMN (Institut d’électronique, de microélectronique et de nanotechnologie) développe un dispositif qui génère des ondes acoustiques afin de faire glisser les liquides et les salissures présents sur la surface de certains matériaux. « De nombreux laboratoires et startups travaillent sur cette problématique, confie Michaël Baudoin, enseignant-chercheur à l’université de Lille, rattaché à ce laboratoire de recherche. L’originalité de notre travail est d’utiliser des ondes de surface et de faire osciller les gouttes pour qu’elles glissent et non pas de chercher à les atomiser ou évaporer. »
Le dispositif est actuellement basé sur du niobate de lithium (LiNbO3), un matériau piézoélectrique qui se déforme lorsqu’on le soumet à une tension électrique et donc produit une onde acoustique. À l’avenir, la technologie devrait être efficace sur tous types de matériaux, pourvu qu’ils soient rigides et qu’ils propagent bien les ondes, telles que des surfaces vitrées ou des métaux. « Seuls les matériaux qui absorbent ces ondes comme le PDMS (polydiméthylsiloxane), un polymère très utilisé en microfluidique, ne pourront pas être utilisés avec notre technologie », ajoute le chercheur.
Le système est totalement invisible
Le principe de fonctionnement est simple : les ondes acoustiques se propagent à la surface du matériau puis se transmettent au liquide. Chaque goutte va alors se mettre à osciller progressivement, ce qui va libérer la goutte et lui permettre de glisser naturellement selon le sens de gravité du matériau. « L’onde sonore libère les gouttes piégées dans des aspérités de la surface du matériau, précise Michaël Baudoin. Malgré la différence de densité et de vitesse du son entre le solide et le liquide, l’énergie se transmet très bien entre ces deux milieux ». Le système se révèle totalement invisible puisque les vibrations restent inférieures à quelques dizaines nanomètres.
L’équipe de recherche travaille avec des fréquences supérieures au mégahertz et le dispositif est efficace sur toutes sortes de liquides ainsi que des boues parfois très visqueuses. Le système se montre adaptatif c’est-à-dire qu’il suffit d’augmenter la fréquence de génération des ondes selon le niveau de saleté ou des quantités d’eau sur la surface. « Nous avons démontré que l’on pouvait également retirer le givre, quel que soit son niveau, et même de la glace, révèle le chercheur. Ce résultat nous a d’ailleurs surpris. »
Jusqu’ici, de nombreux laboratoires de recherche ont travaillé à rendre des matériaux superhydrophobes, notamment en créant à leur surface des micro- ou nanostructures qui empêchent l’eau d’y adhérer. Si ces technologies fonctionnent bien lorsque les surfaces sont propres, elles perdent progressivement leur efficacité au fur et à mesure de la pollution des matériaux en condition réelle d’utilisation. « Notre technologie fonctionne bien quel que soit le niveau d’aspérité ou d’irrégularité du matériau, même en présence de pollutions chimiques ou de chocs mécaniques à sa surface », précise Michaël Baudoin.
Un partenariat avec un industriel de l’automobile
Sur le plan de la consommation d’énergie, la puissance demandée est comprise entre le milliwatt et le watt en fonction des fonctionnalités. Pour certaines applications comme pour des voitures, la puissance n’est pas un facteur limitant, par contre pour d’autres applications portables comme des systèmes optiques mobiles, elle peut devenir critique. C’est pourquoi, les chercheurs travaillent actuellement à optimiser le système dans ce domaine.
Cette technologie est déjà rentrée dans une phase de maturation. Un partenariat a été conclu entre l’IEMN et la SATT Nord, un organisme qui facilite et accélère les transferts technologiques de la recherche publique vers les entreprises, ainsi qu’avec un industriel du secteur de l’automobile. « Nous travaillons sur des démonstrateurs que l’on pourra intégrer à des systèmes industriels et qui devraient être finalisés d’ici la fin de l’année. L’un des défis technologiques sera ensuite de fiabiliser et d’améliorer la robustesse de notre système », conclut Michaël Baudoin.
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