Soupçonnée mais non prouvée, la synthèse de diamants en grande quantité au sein d'Uranus et Nepture vient d'être confirmée de manière tangible par une expérience utilisant un laser sur du polystyrène. Ouvrant, peut-être, par la même occasion, une nouvelle voie de synthèse de nanodiamants.
Une équipe de chercheurs internationaux (principalement allemands et américains) publie dans Nature du 21 août un article relatant leur expérience montrant la formation de diamants à partir de polymères hydrocarbonés dans des conditions semblables à celles régnant dans les profondeurs des deux géantes de glaces que sont Neptune et Uranus. Confirmant ce que l’on soupçonne depuis plus de 30 ans : la présence en grande quantité de diamants solides au sein des deux planètes.
Un résultat prévu de manière théorique
Les théories actuelles concernant Neptune et Uranus considèrent qu’elles sont structurées en trois couches principales : un noyau solide rocheux a priori composé de silicates de fer et nickel entouré d’un manteau de glaces plus ou moins liquides d’eau, d’ammoniac et de méthane et d’une atmosphère riche en hélium, hydrogène, méthane. En réalité, la transition entre l’atmosphère et le manteau est graduelle, il n’y a donc pas à proprement parler de surface sur ces planètes.
Les scientifiques pensent que plus on s’enfonce vers le noyau de la planète, plus des hydrocarbures simples comme le méthane traversent différentes transitions chimiques aboutissant à la perte de leurs atomes d’hydrogène. Sous l’effet de la température et de la pression, ils passeraient d’abord par une phase de polymères puis perdraient leurs atomes d’hydrogène pour voir s’agréger les atomes de carbone sous la forme de diamants notamment. C’est cette dernière réaction, menant à la formation de diamants que les chercheurs ont réussi à recréer.
Quand le plastique devient diamant
Dans l’expérience, des échantillons de polystyrène ( C8H8) sont soumis à des conditions extrêmes comme celles régnant à 10 000 km sous la surface d’Uranus ou Neptune : à peu près 5000°K et 150 gigapascals. Le polystyrène simule les composés polymères qui se forment à partir du méthane, quand on s’enfonce dans les couches les plus profondes de la planète.
Pour atteindre les bonnes conditions, les échantillons de polystyrène sont bombardés par deux ondes de chocs successives provoquées par un laser (dans la lumière visible). L’effet de ces chocs sur le polystyrène a été capturé grâce au laser à électrons libres (XFEL) du SLAC de l’université de Stanford en Californie. Ce dernier permet une diffraction à rayon X avec des impulsions extrêmement brèves de l’ordre de 50 femtosecondes qui fournissent les images de la formation des nanodiamants et les détails sur la réaction chimique qui s’est opérée.
Une nouvelle voie de synthèse pour les nanodiamants ?
Les scientifiques en ont conclu qu’il faut des hautes pressions pour initier la séparation entre le carbone et l’hydrogène et que pour engendrer une précipitation des atomes de carbone sous forme diamantaire il faut que ces pressions soient à peu près 10 fois plus élevées que ce que l’on pensait jusque-là. Ces résultats laissent à penser qu’il pourrait y avoir des phénomènes de convections au sein de ces planètes sous l’influence de la chaleur dégagée lors de la séparation hydrogène / carbone. En outre, si en laboratoire, seuls des nanodiamants sont créés, au sein d’Uranus et Neptune, les chercheurs estiment que les phénomènes sont majeurs et aboutissent à la formation de diamants dont le poids excède plusieurs millions de carats (le carat étant ici l’unité de masse des gemmes). Ils pensent probable que ces diamants coulent dans les couches les plus profondes des deux planètes et s’agrègent, formant une épaisse couche autour du noyau. Par ailleurs, cette expérience ouvre la perspective d’une fabrication via des lasers de nanodiamants, ce qui serait bien plus économique et écologique que les explosions habituellement utilisées. Les nanodiamants sont aujourd’hui utilisés dans le domaine médical, électronique ou encore comme additifs pour des plastiques ou des lubrifiants par exemple.
Sophie Hoguin
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