Aux Etats-Unis, l'éventualité d'un incendie dans une piscine de stockage de combustible usé est clairement sous-estimée C'est l'alerte donnée par une nouvelle étude de l'Université de Princeton et de l'Union des scientifiques concernés dans Science. Les retombées radioactives seraient désastreuses.
Les Etats-Unis ont 99 réacteurs nucléaires répartis sur leur territoire. Le pays n’a pas opté, comme la France, pour le retraitement de ses assemblages de combustible. Une fois usés, ils s’accumulent donc dans les piscines de refroidissement à proximité des réacteurs avant envoi pour stockage final. Comme le pays a décidé de prolonger la durée de vie de la plupart de ses réacteurs de 40 ans à 60 ans, ces piscines sont surchargées.
Selon une étude publiée le 26 mai dans Science, le risque d’incendie d’une de ces piscines est clairement sous-estimé. « Les bassins surchargés sont très vulnérables au feu et peuvent libérer d’énormes quantités de matières radioactives dans l’atmosphère », préviennent les auteurs. Ces conséquences dramatiques pourraient notamment être déclenchées par un séisme important ou une attaque terroriste.
Inaction de la Commission de réglementation nucléaire des États-Unis
L’étude dénonce l’inaction de la Commission de réglementation nucléaire des États-Unis (NRC). Suite à la catastrophe de Fukushima, le NRC a bien étudié une proposition pour interdire la surcharge des piscines de stockage du combustible usé. Elle visait à transférer tout le combustible usé stocké dans ces piscines depuis cinq ans vers d’autres sites de stockage temporaires.
Le NRC a alors estimé qu’un incendie dans une piscine de stockage de taille moyenne entraînerait des dommages évalués à 125 milliards de dollars. Un montant exhorbitant comparé au surcoût d’une telle disposition, évalué à 50 millions de dollars par piscine. Néanmoins, la commission américaine a estimé qu’un tel incendie était hautement improbable. Elle n’a donc pas jugé nécessaire d’obliger les centrales nucléaires à désemplir leurs piscines.
Les auteurs de l’Université de Princeton dénoncent une analyse biaisée. Selon leurs travaux, l’analyse coût-bénéfice de la NRC a jugé qu’un incendie n’engendrerait pas de contaminations radioactives au-delà de 50 miles (80,5 km). L’agence a aussi affirmé qu’une zone contaminée pourrait être nettoyée en un an. « Ces deux suppositions sont incohérentes avec l’expérience accumulée grâce aux accidents de Tchernobyl et de Fukushima », dénoncent les scientifiques.
Un incendie radioactif qui pourrait coûter 2000 milliards de dollars
Les auteurs estiment qu’un incendie dans une piscine surchargée pourrait libérer suffisamment de matières radioactives pour contaminer une zone deux fois plus grande que celle du New Jersey. Ils évaluent le montant d’un tel accident à 2.000 milliards de dollars. C’est 16 fois plus que les évaluations de la NRC ! La responsabilité de l’industrie nucléaire étant limitée à 13,6 milliards de dollars, les contribuables américains devraient assumer la quasi-totalité des coûts. Cet accident pourrait aussi forcer environ 8 millions de personnes à déménager pendant plusieurs années.
Pour éviter le pire, les auteurs appellent le Congrès américain à mettre en oeuvre l’interdiction de surcharger les piscines. Ils suggèrent aussi que les Etats qui subventionnent les réacteurs nucléaires réagissent pour ne délivrer ces subventions qu’aux réacteurs qui acceptent de transférer leur combustible usé.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
Je pense que cs chiffres sont toujours exagérés. Tout comme ceux donnés par l’IRSN sur les conséquences financières d’un accident nucléaire en France qui ne tenaient pas compte de la mise en place des recombineurs d’hydrogène dans le bâtiment réacteur et des filtres à sable sur le circuit de décompression enceinte pour arrêter les aérosols et notamment ceux du césium 137.
Néanmoins, j’ignore comment le combustible en piscine peut prendre feu mais imaginons que la chose soit possible. Cela prouverait que l’accumulation des assemblages usés dans un pays qui a abandonné le retraitement pose un problème effectif difficile à nier. Ma position est que quand on fait du nucléaire, la position responsable consiste à fermer le cycle par une usine de retraitement qui trie, recycle, sépare les différentes catégories de déchets et les met dans les conteneurs appropriés en fonction de leur dangerosité. C’est le cas de l’usine française de la Hague et ensuite de l’Agence Nationale des Déchets Radioactifs qui est chargée du stockage des déchets par catégorie dans des centres dédiés et surveillés.
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