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EPR de Flamanville : démarrage en vue

Posté le 11 juillet 2024
par Stéphane SIGNORET
dans Énergie

Le réacteur de l’EPR de Flamanville a chargé son combustible mi-mai et devrait diverger en juillet. L’ASN continue de surveiller de près les différentes phases de ce démarrage étalé sur plusieurs mois.

Le feuilleton de la construction de l’EPR de Flamanville semble toucher à sa fin. La nouvelle centrale nucléaire, dont les travaux ont démarré en décembre 2007 et ont été émaillés par plusieurs écarts et non-conformités, a vu le chargement de son combustible radioactif commencer en mai dernier. S’ensuivent plusieurs phases qui mèneront à l’exploitation des 1 630 MW du 57e réacteur du parc nucléaire français.

Initialement prévue pour 2012, la mise en service de l’EPR devrait être effective d’ici la fin de l’année. Mais on ne démarre pas une centrale nucléaire aussi facilement qu’un parc éolien. Plusieurs mois de montée en puissance et d’essais spécifiques sont prévus pour vérifier la bonne atteinte d’environ 1 500 critères de sûreté.

La première phase du démarrage a concerné le chargement du combustible dans la cuve du réacteur. 241 assemblages contenant l’uranium – chacun mesure 5 m de haut et pèse 800 kg – ont été ainsi placés dans la piscine du réacteur, depuis la piscine d’entreposage. Réalisée du 8 au 15 mai, cette étape a été contrôlée et validée par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Fermeture de la cuve… éphémère

Cette première étape a été rendue possible grâce au feu vert de l’ASN le 7 mai. Avec sa décision de mise en service, le gendarme du nucléaire a entériné la capacité d’EDF à mener le démarrage de l’EPR, suite à plusieurs contrôles menés précédemment : inspections sur la préparation des essais, notamment ceux sur l’instrumentation du cœur du réacteur et sur ceux préalables au chargement du combustible, inspections sur la préparation des équipes d’exploitation, évaluations de conformité des équipements sous pression nucléaires, etc.

Après le chargement du combustible, la première phase du démarrage a été complétée par la mise en place, dans la cuve, des mécanismes de commandes de grappes et de l’instrumentation du cœur, équipements nécessaires à la maîtrise de la réaction nucléaire. Le couvercle de la cuve (145 tonnes) a ensuite été posé et fixé par le serrage de 52 goujons. On se rappelle néanmoins que ce couvercle, ayant subi des anomalies de fabrication, aurait dû être changé dès cet été, et que l’ASN a autorisé le report de ce remplacement au premier arrêt pour rechargement du réacteur, soit 15 à 18 mois après sa mise en service.

EDF a poursuivi avec la deuxième phase du démarrage : les essais précritiques à froid à 55 °C. Le circuit primaire a été mis sous vide, les tuyaux en épingle du générateur de vapeur ont été remplis par l’eau du circuit primaire, ainsi que la cuve et le pressuriseur. Le démarrage des quatre pompes primaires a permis l’éventage du circuit primaire, c’est-à-dire la suppression d’air résiduel dans le circuit. Les essais à froid sont complétés par des tests de l’instrumentation du cœur nécessaire aux mesures des températures, du niveau d’eau dans la cuve et du flux neutronique. Les 89 grappes de commande sont également testées, notamment leur temps de chute dans la cuve, dispositif crucial en cas d’urgence pour un arrêt automatique du réacteur.

Arriver à la divergence

La troisième phase du démarrage est celle des essais précritiques à chaud. Elle a pu démarrer le 20 juin, avec la montée en pression (155 bar) et en température (304 °C) du circuit primaire. Ce palier d’arrêt à chaud a conduit à faire passer le pressuriseur en état diphasique, ce qui permet de maintenir l’eau du circuit primaire à l’état liquide. Le passage de la température de 110 °C a fait l’objet d’une non-objection de l’ASN, nécessaire pour continuer, car c’est la température réglementaire pour déclarer la mise en service des circuits primaires et secondaires. La montée en température a d’ailleurs donné la possibilité de faire des essais sur les générateurs de vapeur.

Lors de tous ces essais, plusieurs événements significatifs pour la sûreté dont trois au niveau 1 de l’échelle INES ont été déclarés par EDF à l’ASN. Début juin, cela a conduit l’énergéticien national à suspendre momentanément les opérations de démarrage. La mise en place d’actions correctives montre qu’EDF est encore en phase d’apprentissage et que la vigilance reste de mise.

Par la suite, le flux neutronique va être augmenté en diluant le bore contenu dans le circuit primaire, induisant la divergence du réacteur, c’est-à-dire le lancement de la réaction en chaîne nucléaire. Celle-ci doit advenir courant juillet. Elle devra être approuvée par l’ASN, tout comme la poursuite des essais à une puissance supérieure à 25 % de la puissance nominale, ainsi que le passage à 80 %.

Après la divergence, EDF pourra coupler la turbine au réseau électrique cet été. Et délivrer enfin des électrons aux Français, presque 20 ans après la loi d’orientation du 13 juillet 2005 qui donna officiellement naissance au projet, et pour un coût total de 19 milliards d’euros, frais financiers inclus. Une augmentation des délais (+ 12 ans) et des coûts (+ 15,7 milliards d’euros) qui n’auraient été tolérés dans aucune autre industrie…


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