À l’occasion du colloque annuel du Syndicat des énergies renouvelables, de nombreuses voix se sont élevées pour poursuivre l’accélération de ces énergies, seule solution pour réduire l’usage des énergies fossiles d’ici 2035. La souveraineté européenne fait désormais partie des priorités.
L’actualité est tombée à pic pour le 24e colloque annuel du Syndicat des énergies renouvelables (SER). La veille, le président Emmanuel macron donnait les grandes lignes de sa politique de transition énergétique après un Conseil de planification écologique, incluant le développement des énergies renouvelables.
Dans les semaines qui viennent, la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, va mettre en place la nouvelle stratégie française. En introduction du colloque, elle a justement rappelé que les ambitions sont fortes, par exemple avec le souhait de multiplier par deux le solaire photovoltaïque et le biogaz, et par quatre la géothermie. Selon elle, une dynamique d’accélération est déjà engagée puisque cette année les nouvelles capacités en photovoltaïque au sol devraient augmenter de 50 % par rapport au gigawatt installé en 2022, et celles d’éolien terrestre devraient atteindre 1,2 GW contre une moyenne de 800-900 MW entre 2020 et 2022.
La ministre a particulièrement insisté auprès des industriels du SER pour qu’ils structurent leurs filières afin d’être collectivement au rendez-vous des objectifs nationaux. Sur l’éolien en mer, elle veut un changement d’échelle et de méthode : une démarche devrait être engagée avec la Commission nationale du débat public pour identifier de nouvelles zones maritimes, en vue d’installer 18 GW au large des côtes françaises d’ici 2035.
Trouver une souveraineté européenne
Au niveau européen, les objectifs sont tout autant ambitieux : atteindre au moins 42,5 % d’énergies renouvelables dans la consommation et réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Pour y arriver, la révision de 75 lois communautaires a été engagée dans le cadre du Green Deal : « C’est un exercice inédit, historique » a rappelé Pascal Canfin, eurodéputé. Vu la courte échéance, les efforts doivent se démultiplier d’où, selon lui, la nécessité de mettre en cohérence le Pacte de stabilité et de croissance, la mobilisation plus large du Fonds d’innovation, et la mise en place d’une vraie politique industrielle permettant de protéger les acteurs européens de la compétition internationale.
L’enjeu de souveraineté était en effet sur toutes les bouches, face aux immenses capacités d’exportation des Chinois dans le solaire photovoltaïque et bientôt dans l’éolien terrestre. Florence Lambert, PDG de Genvia et présidente de la Commission Industrie, emplois et innovation du SER, a reconnu qu’établir la chaîne de valeurs de ces technologies en Europe va prendre plus de temps qu’on imagine. Il est nécessaire de combiner compétitivité économique et production de masse, tout en maintenant une différenciation technologique avec l’Asie grâce à de l’innovation à tous les niveaux, des briques technologiques amont à l’industrialisation des procédés. Elle appelle d’ailleurs les équipementiers à agir de manière concertée sur plusieurs filières industrielles pour trouver des synergies, via des plateformes technologiques regroupant les différentes ETI (entreprises de taille industrielle) concernées.
La nécessité de mieux maîtriser la chaîne de valeurs concerne aussi les matières premières, comme l’a indiqué le directeur de l’Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles (Ofremi). Cette entité, créée il y a moins d’un an, analyse la façon dont tous les chaînons pourraient être complétés pour assurer le plus de souveraineté possible. Les travaux sont immenses, car ils touchent autant la capacité d’avoir de nouvelles extractions minières, des infrastructures de raffinage, des approvisionnements secondaires via le recyclage. L’expert a particulièrement souligné l’importance de veiller à ce que les matières utilisées dans les produits aujourd’hui soient utilisables, une fois recyclées dans 10 ou 20 ans, dans les technologies de demain.
Initiative dans le bâtiment
Même dans le secteur du bâtiment, le potentiel des énergies renouvelables (EnR) est pris très au sérieux. Une semaine avant le colloque du SER, une coalition d’une douzaine d’acteurs a profité du Salon de l’immobilier bas-carbone pour lancer une initiative visant à « booster » leur développement. Parmi eux, on retrouve plusieurs foncières comme BNP Paribas Real Estate, Icade, la société de la Tour Eiffel, Espaces ferroviaires ou La Poste Immobilier. D’ici trois ans, elles souhaitent systématiser l’intégration des énergies renouvelables et de récupération dans leur parc immobilier. Le potentiel est de 40 à 70 % des besoins d’un bâtiment qui peuvent être couverts par ces énergies. Pour y arriver, elles s’appuieront sur un référentiel ENRScore élaboré par l’institut français pour la performance du bâtiment, et sur un outil cartographique digital de l’Observatoire de l’immobilier durable.
Une démarche qui plaira certainement à Jean-Louis Bal, qui a reçu le Trophée des EnR lors du colloque du SER. Le scientifique Jean Jouzel lui a remis ce prix couronnant une vie dédiée aux énergies renouvelables, notamment au sein de l’Ademe et en tant que président du SER de 2010 à fin 2022. « Il y en a marre de la procrastination » a déclaré Jean-Louis Bal, désormais président d’Agir pour le climat, appelant à stopper les projets d’énergies fossiles et à cesser les « controverses jancoviciennes » pour se lancer dans un développement tous azimuts des énergies renouvelables.
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