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En Allemagne, la CDU fataliste quant à une relance du nucléaire

Posté le 4 mars 2025
par Pierre Thouverez
dans Énergie

Les élections législatives en Allemagne ont accouché de la victoire de la CDU/CSU, relançant en partie les questions sur la politique énergétique de nos voisins.

Alors que le fait marquant des élections législatives anticipées en Allemagne reste la percée historique de l’AfD, le parti allemand d’extrême droite, qui récolte 20% des suffrages, la question énergétique émerge depuis quelques jours outre-Rhin.

L’Allemagne, qui a fermé ses dernières centrales nucléaires le 15 avril 2023, est aujourd’hui confrontée à des prix élevés de l’électricité, et doit massivement importer son énergie, de France – énergie nucléaire – ou de Pologne – charbon -. D’où la tentation de relancer l’industrie nucléaire, en commençant par stopper le démantèlement en cours des centrales existantes ? C’est ce qu’a d’abord annoncé Friedrich Merz, le nouveau chancelier, jugeant nécessaire de revenir rapidement sur les démantèlement en cours, et de mettre en œuvre la construction de nouvelles centrales, même si cela ne « pourra pas être fait au cours de cette seule législature ». En cela le nouveau chancelier est sur la même longueur d’onde que ses électeurs, qui n’étaient que 15% à être favorables à la fermeture des trois derniers réacteurs encore en activité outre-Rhin.

Peu après ces déclarations, Friedrich Merz, s’il n’a pas fait machine arrière, s’est montré fataliste sur la possibilité de relancer réellement une activité nucléaire en Allemagne. En effet, alors que les géants du secteur, E.ON et RWE en tête, ont affiché leur scepticisme face aux difficultés techniques et politiques d’une relance du nucléaire, le chancelier allemand a concédé que les réacteurs sont aujourd’hui « démantelés et décontaminés. Il n’y a très probablement aucun moyen d’y remédier », et la probabilité d’une réactivation du nucléaire « diminue de semaine en semaine », selon lui.

Ainsi, bien que le retour du nucléaire constitue un point important du programme qui a permis à la CDU de recueillir près d’un tiers des suffrages lors de l’élection anticipée de la semaine dernière, les chances réelles d’un retour de l’atome dans le mix énergétique allemand sont quasi nulles. 

Reste les petits réacteurs nucléaires modulaires, même si l’implémentation de ces derniers dans le mix électrique reste aujourd’hui hypothétique. 

Cela dit, après avoir investi plus de 600 milliards d’euros dans sa transition énergétique – la fameuse Energiewende – l’Allemagne se retrouve aujourd’hui dans une situation tendue, entre incapacité à tenir ses engagements écologiques, et un prix de l’énergie ayant fortement augmenté, avec un impact désastreux sur la compétitivité industrielle du pays. 

Si le développement d’une filière SMR représente une solution, l’Allemagne se tourne aujourd’hui notamment vers l’hydrogène pour décarboner sa consommation d’énergie, en investissant massivement sur les technologies de production et de stockage. Mais comme c’est le cas en France, reste à savoir si nos voisins parviendront à développer des moyens de production d’hydrogène vert suffisants pour répondre à la demande. Car aujourd’hui encore, l’immense majorité de l’hydrogène est produite via des énergies fossiles.

Si la transition énergétique allemande soulève encore de nombreux points d’interrogation, les choix technologiques devraient révéler peu à peu leur pertinence. Comme par exemple celui, initié en Allemagne, de miser sur le transport aérien propulsé à l’hydrogène, sur lequel Airbus vient de faire marche arrière. Et valider – ou invalider – la trajectoire allemande vers la neutralité carbone, prévue pour 2045.


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