Le développement des écoles d'ingénieurs spécialisées, loin d'être une mise en cause de l'enseignement généraliste historique, répond à des besoins précis en termes de recrutement. Explications.
Aujourd’hui, les écoles d’ingénieurs doivent répondre aux évolutions des secteurs de l’industrie. Ces mutations, importantes, concernent la manière d’appréhender les nouvelles technologies, les enjeux liés à l’environnement et à la mondialisation des échanges. Ainsi, l’exigence en matière de langues étrangères en école d’ingénieur a augmenté ces dernières années, ce qui permet de répondre à l’internationalisation des entreprises, de plus en plus importante depuis 10 ans.
Il existe deux types d’écoles d’ingénieurs. Les écoles dites généralistes. Elles fournissent un enseignement théorique et pratique dans les grandes disciplines scientifiques. Elles donnent une bonne formation scientifique de base et proposent des choix d’options dans les dernières années, mais permettent d’utiliser les compétences techniques et méthodologiques dans tous les secteurs de l’industrie.
Les écoles spécialisées, elles, préparent sinon à un métier, au développement de compétences relatives à un secteur particulier.
D’où vient la multiplication des écoles spécialisées ? La réponse est relativement simple : de la demande des employeurs en termes de compétences sur certains domaines précis. Bien sûr, même une école spécialisée a un aspect généraliste. Mais elle offre l’apprentissage d’une somme importante de connaissances permettant d’acquérir des compétences pointues. L’inconvénient de se spécialiser (moins de choix en termes de diversité d’emplois) s’efface devant le « côté » expert des ingénieurs sortant d’une école spécialisée.
Si les écoles spécialisées se développent, c’est aussi parce que de nouveaux marchés émergent, et souvent à grande vitesse. Par exemple, citons le cas des énergies renouvelables. La croissance, à la faveur des engagements gouvernementaux, des métiers liés à la recherche et à l’exploitation d’énergies renouvelables nécessite des formations spécifiques.
Cet exemple se retrouve dans tous les secteurs : Au niveau automobile, les recherches sur le véhicule électrique. En chimie, la révolution Reach. Au niveau matériaux, les nanotechnologies. Et ainsi de suite. Chaque secteur a besoin de nouvelles compétences, que ce soit pour la recherche ou au niveau technique. D’ailleurs, de nombreuses entreprises coopèrent avec des écoles d’ingénieurs pour proposer des formations spécifiques. C’est ainsi que Renault a développé une formation sur les véhicules électriques en partenariat avec ParisTech.
Des spécialisations verticales ou transversales
On trouve de nombreuses écoles qui forment des spécialistes dans leur domaine scientifique et technique. Ainsi, une thématique comme « l’exploration et la valorisation des matières premières » est tellement transversale qu’elle va trouver une application dans la plupart des secteurs de l’ingénierie (physique, matériaux, métallurgie, énergétique, géophysique, géologie, thermique, mécanique des fluides, environnement). Dans la même veine, les domaines de spécialisations tels que l’ « exploitation des ressources animales et végétales » ou encore les « techniques de l’information et de la communication », par exemple.
On voit donc que la spécialisation des écoles d’ingénieurs a quelque chose de tout à fait relatif : en effet, ces spécialisations concernent soit des techniques propres à un type d’industrie. Dans ce cas précis, l’enseignement balaie alors, au-delà des techniques proprement dites, l’industrie concernée. Après, les écoles abordant des thématiques très ciblées mais transversales proposent des enseignements à la fois très ciblés mais qui ont un côté généraliste, passage obligé puisque ces spécialités touchent tous les secteurs de l’industrie. Par exemple, les ingénieurs d’Itech Lyon reçoivent une formation à la fois généraliste et pointue dans la spécialité textile technique. Cet atout leur permet d’intégrer des entreprises du textile, bien sûr, mais aussi d’autres branches industrielles utilisatrices de matériaux textiles (chimie, luxe, automobile, lingerie, médical, sport-loisirs, construction de machines textiles et grande distribution).
Ensuite, il appartient aux entreprises d’adapter leur recrutement. Dans certains domaines d’activité (informatique, industrie chimique…), les entreprises ont tendance à recruter des ingénieurs généralistes, puis à les former (en les rémunérant), en quelques semaines, quelques mois au maximum. Au contraire, pour d’autres domaines, dont ceux évoqués plus haut, les formations ne peuvent pas être efficaces et courtes en même temps.
C’est là que réside encore la pierre d’achoppement pour les écoles d’ingénieurs spécialisées. Offrir à un étudiant un champ de compétence hyper spécialisé mais relativement étroit, sans le désavantager sur le marché du travail. D’où la multiplication de ces accords écoles-entreprises, et le développement de programmes d’enseignement spécifiques, répondant à une demande de l’industrie.
Le classement des grandes écoles d’ingénieurs généralistes, dans ses grandes lignes, n’évolue pas vraiment. Les écoles classées dans les premières places sont les mêmes depuis de nombreuses années, sans que cela soit contestable. Ces écoles sont d’ailleurs également reconnues internationalement.
Le journal l’Express a établi un classement, pour cette année, des meilleurs écoles. Ce classement s’accompagne d’une appréciation au niveau du « dynamisme de la recherche » (A étant la meilleure note, D la plus basse) pour chaque établissement. Voici les dix premières écoles qui apparaissent dans ce classement :
Etablissement |
salaire brut annuel à l’embauche |
dynamisme de la recherche |
Ecole polytechnique – Palaiseau |
+ de 40 000 |
A |
Ecole des mines – Paris |
+ de 40 000 |
C |
Ecole centrale – Paris |
+ de 40 000 |
C |
Ecole des Ponts |
+ de 40 000 |
B |
Supélec |
+ de 40 000 |
C |
Ecole centrale – Lyon |
37 000 – 40 000 |
B |
ENSTA – Paris |
37 000 – 40 000 |
C |
ENSAE – Malakoff |
+ de 40 000 |
D |
Ecole centrale – Lille |
34 000 – 37 000 |
C |
Ecole centrale – Nantes |
34 000 – 37 000 |
C |
Il est à noter que le salaire à l’embauche ne recule pas. Il est en moyenne de 37 000 euros à la sortie d’une des dix premières écoles d’ingénieur. Au-delà, on remarque que la poussée des écoles d’ingénieurs spécialisées, même elle est non négligeable, n’a& pas encore eu de répercussions notables sur ce classement, ni sur celui considérant les cinquante premières écoles.
Par Pierre Thouverez
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