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E-fuels : la question de la « neutralité carbone » fait débat

Posté le 14 novembre 2023
par Matthieu Combe
dans Énergie

L’Europe voulait interdire totalement la vente de véhicules neufs à moteur thermique en 2035. Mais l’accord trouvé en mars dernier prévoit une dérogation pour les véhicules carburant aux e-fuels. À condition qu’ils réduisent leurs émissions de 100%... ou 70% par rapport aux carburants fossiles ?

L’Union européenne devait interdire totalement les moteurs thermiques carburant aux énergies fossiles en 2035. Mais l’accord trouvé en mars prévoit une dérogation pour les véhicules utilisant du carburant synthétique (ou e-fuels), comme le demandait l’Allemagne. La proposition qui doit être validée d’ici à l’automne 2024 prévoit que ces carburants soient « neutres en termes d’émissions de CO2 ». Cela supposerait d’atteindre une réduction de 100 % des émissions par rapport aux carburants fossiles. La réglementation actuelle prévoit une diminution minimum de 70 % des émissions pour les carburants à base de carbone recyclé. Les industriels aimeraient bien garder ce dernier seuil moins ambitieux.

Dans un rapport publié en mars, l’ONG Transport & Environnement estimait que l’essence synthétique pourrait coûter plus de 2,82 euros par litre à la pompe en France en 2030, soit presque 50 % de plus que l’essence ordinaire aujourd’hui. Dans un nouveau rapport, l’ONG estime que les voitures alimentées par des e-fuels émettront près de cinq fois plus de CO2 que les véhicules électriques si l’UE renonce à son ambition d’appliquer aux e-fuels son exigence de neutralité carbone.

61 gCO2/km pour les e-fuels, 13 gCO2/km pour l’électrique

Transport & Environnement a dressé le bilan des émissions de CO2 « du puits à la roue » des e-fuels. Il prend en compte l’ensemble des émissions générées par la production, la distribution et l’utilisation du carburant. L’analyse montre que les voitures alimentées aux e-fuels émettront 61 gCO2eq/km en 2035 si les législateurs se bornent à une réduction de 70 % des émissions et non de 100 %. C’est cinq fois plus que les prévisions pour les véhicules électriques à cet horizon (13 gCO2eq/km), compte tenu de l’évolution du mix électrique européen qui émettra 33 g CO2/kWh Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité. « En France, ces émissions tomberaient même à 3 gCO2/km, en raison d’un mix fortement décarboné », prévient l’ONG.

Les carburants synthétiques peuvent être produits par un mélange entre du CO2 et de l’hydrogène. Pour être totalement neutres en carbone, le CO2 devrait être récupéré dans l’atmosphère ou capturé en sortie des usines, le second produit par électrolyse de l’eau grâce à des énergies renouvelables. La réglementation européenne estime en effet que pour produire les e-fuels, « les émissions en équivalent carbone associées à la production d’électricité renouvelable (éolienne, solaire, hydroélectrique et géothermique) sont considérées comme égales à zéro ».

La Commission a demandé aux États membres de lui faire part de leurs commentaires sur sa proposition d’autoriser les e-fuels neutres en carbone dans les nouvelles voitures après 2035. Les gouvernements de l’UE devraient prendre une décision finale sur les critères retenus avant la fin de l’année.


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