Avions, satellites mais aussi sous-marins peuvent avoir besoin de se localiser sans signal de référence de type GPS. Ils embarquent alors des centrales inertielles dotées d’horloges, de capteurs d’accélération et de rotation permettant de déterminer de manière autonome une position à partir de la mesure de forces inertielles. Situé à l’Observatoire de Paris, le laboratoire SYRTE (Systèmes de Référence Temps-Espace) étudie les possibilités offertes par l’interférométrie atomique afin de réaliser des systèmes de guidage d’une grande précision. Il développe en particulier des capteurs inertiels à atomes froids sur une puce. Cette technologie quantique pourrait ouvrir la voie à de nouvelles applications, notamment pour le secteur de la défense.
Pour ce travail de recherche, les chercheurs utilisent un interféromètre atomique qui fonctionne sur le même principe que l’interféromètre optique. En effet, à l’image des photons pour la lumière, les atomes possèdent également une onde associée et peuvent donc interférer. À partir d’une onde atomique, un laser va en générer deux ; ces ondes vont alors effectuer des trajets différents, puis se recombiner, créant ainsi des franges d’interférence. Ce mécanisme est à la base du mode de fonctionnement du capteur inertiel en cours de développement. « La source laser va émettre un faisceau qui est réfléchi par un miroir et les atomes vont se propager librement entre les interactions lasers dans une chambre à vide, explique Carlos Garrido Alzar, chercheur au SYRTE. Les atomes vont nous fournir ainsi un référentiel inertiel à partir duquel on va mesurer les déplacements des faisceaux laser ». Les scientifiques utilisent des atomes refroidis par laser, en l’occurrence du rubidium, afin de disposer de temps de mesure très longs.
Une technologie compacte pour intégrer des applications embarquées
Pour rendre cette technologie opérationnelle pour la navigation, il est nécessaire de l’intégrer sur une puce microélectronique. L’équipe de recherche est parvenue à créer des microcircuits à atomes froids de sorte à rendre cette technologie compacte et pratique pour des applications embarquées. « Pour franchir cette étape, une des difficultés est de réussir à fabriquer des microfils ayant des largeurs très différentes sur un même substrat, c’est-à-dire allant de quelques millimètres au micromètre, confie le chercheur. Nous y sommes parvenus en laboratoire, maintenant il faudrait réussir à le faire grâce à un procédé industrialisable. »
Le principal avantage de ce capteur inertiel à atomes froids sur puce réside dans ses très grandes sensibilité et stabilité. Elle s’explique par l’utilisation d’un nuage d’atomes préparé dans un état quantique bien défini. Contrairement aux capteurs inertiels actuellement en service, il est donc inutile de calibrer périodiquement ce nouvel instrument à l’aide par exemple d’un signal GPS afin de vérifier qu’il est sur la bonne trajectoire.
Ce nouveau capteur devrait trouver des applications dans le secteur de la défense, il est d’ailleurs développé en collaboration avec Thales Research & Technology (TRT). Il pourrait par exemple être embarqué dans des avions afin que leur positionnement reste précis même en cas de brouillage des radars. « Une autre application potentielle concerne la réalisation de centrales de navigation autonomes hybrides pour des satellites impossibles à contrôler en temps réel depuis la terre. »
Une quinzaine d’années sera nécessaire avant de voir un nouvel instrument opérationnel sur le terrain ; il reste pour l’instant au stade de la preuve de concept. « En plus du microcircuit à fabriquer de manière industrielle, nous devons rendre compact tout l’environnement autour comme l’optique utilisée pour le laser, le système de détection ainsi que celui de contrôle et traitement de données », ajoute Carlos Garrido Alzar.
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