Des échantillons d’aérosols ont été collectés pour l’Institut Weizmann des Sciences lors de l’expédition Tara Pacific, durant la traversée de l’océan Atlantique Nord en 2016. Leurs résultats, publiés dans la revue Communications Earth & Environment, montrent que des microplastiques se trouvent dans l’air marin.
« Une fois que les microplastiques sont dans l’atmosphère, ils sèchent et ils sont exposés à la lumière UV et aux composants atmosphériques avec lesquels ils interagissent chimiquement. Les particules qui retombent dans l’océan sont susceptibles d’être encore plus nocives ou toxiques qu’auparavant pour toute vie marine qui les ingère », explique Miri Trainic, auteure principale de l’étude et chercheuse à l’Institut Weizmann des Sciences. « De plus, certains de ces plastiques deviennent des supports pour la croissance bactérienne de toutes sortes de bactéries marines, de sorte que le plastique en suspension dans l’air pourrait permettre à certaines espèces de partir en balade, y compris les bactéries pathogènes qui sont nocives pour la vie marine et les humains », ajoute Assaf Vardi, co-auteur du même institut.
Une première étude qui cache la forêt
Cette étude est la première à détecter et identifier des particules microplastiques en suspension dans l’air marin, loin des côtes. 43 échantillons ont été analysés par les chercheurs. Des microplastiques ont été trouvés dans neuf d’entre eux, soit 20 %. Dans ces échantillons, les microplastiques représentent entre 1 et 10 % du nombre total de particules d’une taille supérieure à 10 µm.
Les auteurs postulent que ces résultats sous-estiment grandement la concentration réelle de microplastiques dans l’air marin en raison des défis techniques actuels. En effet, ils n’ont pas pu analyser les particules de microplastiques en suspension dans l’air d’une taille inférieure à 5 micromètres (μm). « Dans une distribution granulométrique d’aérosol marin typique, la plage de diamètres entre 10 nm et 1 μm constitue plus de 99 % de la concentration totale de particules en suspension dans l’air », rappelle l’étude.
L’équipe a ensuite identifié les types de plastiques par spectroscopie portable Raman. Elle a ainsi détecté du polystyrène, du polyéthylène, du polypropylène et du polysilicone. Du polyéthylène et du polypropylène ont également été retrouvés dans l’eau de mer échantillonnée aux mêmes sites que les échantillons d’aérosols, suggérant une possible production locale de particules microplastiques en suspension dans l’air.
Des microplastiques locaux ou transportés sur de longues distances
Les particules de microplastiques ont des temps de résidence dans l’air marin de quelques minutes à plusieurs jours. Les chercheurs avancent donc l’hypothèse que certains microplastiques pénètrent dans l’atmosphère via l’éclatement de bulles à la surface de l’océan. D’autres sont ramassés par les vents et transportés par les courants d’air vers des régions éloignées. « Les microplastiques en suspension dans l’air que nous avons trouvés peuvent rester dans l’atmosphère pendant environ 2 jours, et être transportés sur une distance de 100 à 1 000 km pour une vitesse de vent marin typique de 8 mètres par seconde », partagent les auteurs.
« L’éclatement des bulles injecte le microplastique dans l’atmosphère dans un processus associé à la formation d’aérosols des embruns marins, ce qui implique que l’océan peut être une source mondiale constante de microplastiques en suspension dans l’air, qui peut être transportée vers les régions côtières et des endroits éloignés, explique l’étude. Cependant, nous ne pouvons pas écarter la possibilité que certains aérosols microplastiques puissent provenir d’autres bateaux, continents ou îles, et être transportés dans l’atmosphère marine éloignée. »
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