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Des microplastiques dans l’air du Pic du Midi

Posté le 22 décembre 2021
par Matthieu Combe
dans Environnement

Des chercheurs ont montré la présence de microplastiques dans des zones reculées de l’Arctique, de l’Antarctique et jusqu’au haut du mont Everest. Une nouvelle étude montre leur transport intercontinental et leur présence dans l’atmosphère du Pic du Midi.

Dans une nouvelle étude parue dans Nature Communications le 21 décembre, une équipe internationale de chercheurs décrit une nouvelle étape du cycle de vie des microplastiques. Selon ces chercheurs du CNRS, de l’Université Grenoble Alpes et de l’Université de Strathclyde (Ecosse), la troposphère transporte les microplastiques entre les continents sur de très longues distances. Cette découverte permet d’expliquer leur présence dans des régions reculées du monde.

L’air du Pic du Midi, zone reculée

Durant l’étude, les chercheurs ont aspiré l’air du Pic du Midi, à 2 877 mètres d’altitude, pour y explorer la présence de microplastiques. « On trouve en moyenne un microplastique par 4 m³ dans l’air au-dessus du pic du Midi, détaille Jeroen Sonke, directeur de recherche au CNRS et co-auteur de l’étude. Si on multiplie ce chiffre par le volume de toute la troposphère, on parle de 2 000 tonnes de microplastiques qui flottent à travers notre planète. »

Mais le chercheur se veut rassurant. « Au Pic du Midi, on retrouve régulièrement des poussières du Sahara, des émissions de vallée avec toutes sortes de particules. Par rapport à ces autres particules, présentes en milliers, 1 microplastique par 4 m³, ce n’est pas grand-chose et il n’y a aucun risque sanitaire lié à ces microplastiques au pic du Midi. »

Pomper et identifier

Entre juin et octobre 2017, les chercheurs ont analysé quinze fois pendant une semaine l’air du Pic du Midi. « Notre pompe permettait d’aspirer 1 m³ d’air par minute, explique Jeroen Sonke. Pendant une semaine, on pompait 10 000 m³ à travers un filtre en quartz. » De retour au laboratoire, les technologies de microscopie ont permis d’identifier la taille, la forme et le type de polymère prélevés. Résultat :  les chercheurs ont mesuré, selon les analyses, entre 0,09 et 0,66 microplastiques par m³ d’air, avec une moyenne de 0,23 microplastiques par m³ .

« Le plus petit microplastique mesure 3 µm, le plus grand 53 µm et la majorité des microplastiques se situent entre 10 et 20 µm. Il s’agit à 70 % de fragments et 30 % de fibres », détaille Jeroen Sonke. Les microplastiques relèvent des polymères suivants par ordre d’abondance : le polyéthylène (44 %), le polystyrène (PS, 18 %), le polychlorure de vinyle (PVC, 15 %), le polyéthylène téréphtalate (PET, 14 %) et le polypropylène (PP, 10 %). « Ces plastiques sont ceux utilisés dans les emballages », précise Jeroen Sonke.

Des microplastiques en provenance d’où ?

En s’appuyant sur des modélisations mathématiques et les trajectoires des masses d’air, l’étude a permis d’identifier la provenance des masses d’air contenant des microplastiques. « Certaines masses d’air viennent d’Afrique, d’autres d’Amérique du nord ou de l’océan Atlantique, ajoute Jeroen Sonke. Cela signifie que l’océan va transmettre à l’atmosphère les microplastiques contenus dans l’océan. Par l’action des vents et des vagues, les microplastiques peuvent en effet se retrouver en suspension dans l’atmosphère, au-dessus de la mer. C’est le même processus de formation que la brume océanique. »

Pour avoir une provenance plus fine, il faudrait pouvoir analyser la composition de l’air en l’associant à des masses d’air dont l’origine est connue à une résolution plus fine. « Avec un filtre de quartz par jour au lieu d’une semaine, on pourrait peut-être remonter à des zones plus précises, des zones urbaines ou des régions spécifiques dans l’océan Atlantique », imagine Jeroen Sonke.


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