Le béton a beau être un matériau de construction solide, il reste cassant. Les recherches s’orientent donc sur l’amélioration de sa résistance à la fracture et de sa ductilité, c’est-à-dire sa capacité à se déformer sans se rompre. Dans la nature, certaines coquilles de mollusques, comme l’huître, présentent un revêtement intérieur irisé et hautement résistant : la nacre. Celle-ci est constituée de plaques polygonales de cristaux d’aragonite (CaCO3) arrangées en larges feuilles et liées les unes aux autres en un motif 3D de type brique-et-mortier par un biopolymère hyper-élastique. Quand elle se retrouve soumise à une forte tension, deux mécanismes principaux viennent renforcer la nacre : le glissement des plaques d’aragonite les unes par rapport aux autres, lui-même permis par la capacité de déformation viscoélastique du biopolymère. Une équipe de recherche du laboratoire du professeur assistant Reza Moini, au sein du Département d’ingénierie civile et environnementale de l’Université de Princeton (États-Unis), a voulu s’inspirer de cette nacre naturelle pour réaliser son propre composite cimentaire, à la base d’un tout nouveau type de béton…
La résistance du ciment associée à la déformabilité du PVS
Les différentes étapes de fabrication du nouveau matériau sont détaillées dans l’article paru en juin 2024 dans le journal Advanced Functional Materials. Tout d’abord, les chercheurs ont soumis la pâte de ciment à un rayonnement laser afin d’y tailler des plaques individuelles et d’y graver des contours hexagonaux. Les couches ainsi formées ont ensuite été laminées – amincies par déformation plastique – et additionnées d’un élastomère adapté. Reza Moini et ses collègues ont opté pour du polyvinylsolixane (PVS), un liquide visqueux qui durcit rapidement en un solide caoutchouteux prenant la forme de la surface où il a été déposé. Les différentes couches de ciment ont alors pu être apposées en décalé les unes sur les autres, avec l’élastomère toujours bien intercalé entre elles.
Par la suite, les scientifiques en sont venus à la phase des multiples tests. Comme espéré, le matériau composite a montré des capacités prometteuses. Déjà, ses valeurs de résistance à la fracture étaient particulièrement élevées (73,68 MPa/mm2), équivalant à celles relevées pour un béton à ultra-haute performance. L’association du glissement des plaques hexagonales et de l’élasticité du PVS a montré une résistance finale à la fracture 17,1 fois supérieure à celle d’une pâte de ciment conventionnelle, ainsi qu’une ductilité 19 fois supérieure. Une fois mêlé à du sable et du gravier, ce nouveau matériau ciment-élastomère devrait donner vie à un béton sensiblement renforcé par rapport à ses versions précédentes.
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