L’enjeu pour les mois à venir va être la migration des processus basés sur le papier vers une nouvelle mouture totalement dématérialisée, ou plutôt non-matérialisée, incluant la production de documents ou de données nativement numériques, la dématérialisation des échanges et le traitement automatisé des opérations qui en découlent. Des chantiers incontournables pour maintenir la compétitivité selon Gilles Moujeard, responsable de l’offre dématérialisation chez Micropole.
La dématérialisation est maintenant définitivement ancrée dans le monde professionnel, à la fois du côté des métiers et dans la fonction informatique. Les entreprises n’en sont plus à évangéliser sur ce thème et de nombreux projets ont été menés à bien dans la grande majorité des secteurs d’activité. Toutefois, la signification du terme même prend un sens distinct selon les acteurs, et recouvre des domaines radicalement différents : dématérialisation des documents (numérisation du papier et captation des informations), des échanges (documents nativement numériques avec ou sans signature électronique) ou encore des processus (gestion électronique de documents accompagnée de workflows métiers, case management, archivage et autres coffres forts électroniques).
À la fin de l’année 2010, on a pu lire quotidiennement des articles qui vantaient les réussites de projets de dématérialisation, sur des sujets tels que la facture, le courrier, le commerce en ligne, les bulletins de paie ou encore les télé-procédures dans le secteur public. Bien rares sont les organisations qui ne se sont pas lancées dans la mise en place de tels outils. Que penser alors du niveau de dématérialisation atteint ? Que reste-t-il à dématérialiser ? Quelles seront les prochaines étapes en 2011 et pour les années futures ?
La quasi-totalité des entreprises des secteurs banque et assurance possède désormais des « usines à dématérialiser » qui dématérialisent chacun des flux métiers de l’entreprise comme autant de processus. Cependant, alors que ces grands projets d’évolution ont été justifiés financièrement par les gains liés à la transformation du papier en numérique, leur objectif final est bien de traiter des flux numériques. Ce ne sont pour l’instant que des palliatifs qui devraient profiter de l’accélération prochaine de la disparition du papier.
Enjeu : produire directement des documents sous une forme numérique
Toutes les organisations sont concernées par ce fort développement. D’une part, elles vont devoir suivre les nouvelles règlementations sectorielles. D’autre part, elles devront provoquer la transition des usages de leurs clients et salariés vers le nativement numérique pour les projets déjà engagés. Jugés stratégiques, ces chantiers s’avèrent incontournables pour maintenir la compétitivité des métiers et donc au final celle de l’entreprise. Illustration évidente : la conclusion de contrats nativement numériques. N’est-il pas absurde de produire des documents papier, de les signer et de les numériser tout en les conservant également au format papier en raison de leur valeur juridique ? L’enjeu est bien de produire directement des documents sous une forme numérique, en y associant tous les éléments de sécurité qui vont permettre de garantir la validité du document en cas de litige. Ainsi formulé, on perçoit bien les implications juridiques et commerciales complexes qui peuvent en découler. Nouvel eldorado de la dématérialisation, tous les grands « contracteurs » tels que les réseaux bancaires rêvent de ce sujet, et procèdent actuellement à des études, à des prototypes in situ, ou encore aux premiers déploiements de systèmes.
Ces nouveaux processus de contractualisation non-matérialisés sont utilisables en face-à-face (le client face à son conseiller en agence) ou en mode distant. Ils font intervenir de nouveaux terminaux (tablettes graphiques, téléphones portables, lecteurs de cartes) pour identifier les clients, et des outils tels que la génération de certificats à usage unique ou la signature électronique à la volée. Ainsi, le document original qui engage à la fois l’entreprise et son client, devient nativement numérique. Le format papier devient une simple copie sans valeur, imprimée pour rassurer le client dans son mode de fonctionnement habituel. Il va cependant falloir l’accompagner dans cet engagement sur la base d’un document qu’il ne peut pas physiquement toucher et qu’il n’a pas réellement signé de sa main. Gageons que la généralisation de ces nouveaux usages permettra de lever rapidement les difficultés d’adhésion du grand public. Les grandes entreprises à réseau, banques en tête, sont des précurseurs sur le sujet, attirées par des certitudes de gains considérables, directement indexés sur la masse de documents manipulés.
90% des factures toujours sur papier
Autre sujet d’actualité, la facture électronique. Une facture peut être échangée au format 100% électronique, ou directement entre les systèmes d’information EDI (Échange de Données Informatisées) depuis près de dix ans. Cependant, malgré les innombrables projets « Facture » cités dans la presse ou vantés par les éditeurs, près de 90 % des 2 milliards de factures échangées en France en 2010 le sont toujours au format papier. Dans ce cas, seul le papier fait foi au niveau de l’administration fiscale et sa conservation doit donc être maintenue. Malgré cette contrainte, les projets de dématérialisation ont été générateurs de gains très conséquents, gains partagés entre les entreprises qui ont mis en place ces projets, par les éditeurs qui ont conçus les solutions, et par les SSII qui ont fourni les prestations de conseil et d’intégration.
L’offre de solutions « Facture » est à ce jour totalement aboutie. Cependant les solutions restent palliatives puisque le papier subsiste en très grande majorité. La raison ? Les contraintes technico-juridiques (hors plateformes EDI, destinées principalement aux très grands donneurs d’ordres) qui posent de singuliers problèmes de mise en œuvre, par exemple l’obligation de mettre en place une signature électronique pour une facture électronique alors qu’une facture papier n’est jamais signée… Puisque la non-matérialisation des factures constitue un objectif ambitieux, pourquoi ne pas en profiter pour élargir le débat ? Pourquoi se concentrer sur un seul document – la facture – alors que le processus d’entreprise associe la demande d’achat, le bon de commande, le bon de livraison, ou encore les mises en paiement ? D’une vision « papier » limitée à la facture, on peut prendre de la hauteur et mettre en place des solutions de plus grande envergure destinées aux processus purchase-to-pay et order-to-cash. Il s’agit alors de dématérialiser totalement les autres documents associés à la facture.
Les ROI (Return On Investment ou retour sur investissement) annoncés sont de fait supérieurs et constituent autant d’opportunités que les entreprises doivent (et vont) saisir au cours des prochaines années. Rappelons également qu’une nouvelle directive européenne est sur le point d’être entérinée pour réduire à 30 jours le délai de règlement des factures de produits ou de services… Raison de plus pour revoir le processus facture dans son ensemble afin de se conformer aux obligations qui vont en découler et réduire encore ses coûts de traitement.
De nombreux documents papier restent encore à être dématérialisés
La dématérialisation ne saurait se limiter aux grandes thématiques fonctionnelles que nous venons d’explorer. Il reste encore de nombreux documents papier présents dans l’entreprise qui vont faire l’objet d’attentions particulières, et générer de substantielles économies. Parmi les grands axes qui feront l’actualité de 2011, on peut d’ores et déjà identifier :
- les bulletins de salaires, qui ont fait l’objet d’une loi spécifique en 2009 et que l’on peut désormais produire au format numérique avec l’accord individuel de chacun des salariés ;
- le dossier du fonctionnaire en version dématérialisée, sur lequel l’ensemble des ministères et autres organismes publics vont devoir se pencher dès la prochaine publication d’un décret ;
- la dématérialisation des procédures d’exportation (alcool, tabac, produits pétroliers) et des documents administratifs associés pour nombre d’entreprises, dès le début d’année 2011 ;
- le dossier médical personnel dès la fin d’année d’2010, qui comportera de fortes imbrications dans les systèmes d’informations de tous les acteurs du domaine santé ;
- les différents processus du secteur public, dont la transformation est fortement incitée par la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) et ses 150 nouvelles mesures pour les années 2011-2013 ;
- et très probablement de nombreux autres sujets propres à chaque secteur d’activité…
Tous ces thèmes constituent pour les entreprises autant de perspectives de projets à fort retour sur investissement et d’opportunités de poursuivre leur engagement sur la voie du non-matériel !
par Gilles Moujeard, Responsable de l’offre Dématérialisation chez Micropole
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