Après sa validation par le Conseil constitutionnel le 7 novembre, la loi énergie-climat a finalement été publiée au Journal Officiel le samedi 9 novembre. Le Conseil n’a modifié que quelques dispositions de l’article 62, en lien avec le mode de calcul de l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (Arenh), mais a validé son augmentation de 100 à 150 térawattheures par an.
La loi énergie climat entérine les nouveaux objectifs énergétiques et climatiques de la France. En 8 chapitres et 69 articles, elle regroupe les dispositions du Plan climat de Nicolas Hulot, de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens ».
De grands objectifs marqués dans la loi
Les grands objectifs sont là : baisser de 40 % la consommation d’énergies fossiles d’ici 2030 par rapport à 2012 (contre 30 % auparavant) et « atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six » (contre une division par 4 auparavant). Cette neutralité est définie comme « un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre », conformément à l’Accord de Paris, sans avoir recours aux crédits internationaux de compensation carbone.
La loi valide la fermeture des quatre dernières centrales à charbon françaises d’ici 2022. Mais elle valide aussi le report de la réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité de 2025 à 2035. Elle souhaite en revanche « encourager la production d’énergie hydraulique, notamment la petite hydroélectricité » et développer progressivement l’éolien offshore pour porter à 1 gigawatt l’installation annuelle de nouvelles capacités d’ici 2024. L’hydrogène « bas-carbone et renouvelable » et ses usages industriel, énergétique et pour la mobilité vont se développer pour atteindre « 20 à 40% des consommations totales d’hydrogène et d’hydrogène industriel à l’horizon 2030 ». Et pour mieux piloter la production électrique, l’objectif est d’installer au moins 6,5 gigawatts de capacités d’effacement en 2028.
La valorisation de la biomasse devra pour sa part se « concilier » avec « les autres usages de l’agriculture et de la sylviculture, en gardant la priorité à la production alimentaire, ainsi qu’en préservant les bénéfices environnementaux et la capacité à produire, notamment la qualité des sols ». Avant le 1er septembre 2020, le Gouvernement remettra un rapport au Parlement sur les « modalités de prise en compte des externalités positives du biogaz dans la détermination des conditions d’achat ou du complément de rémunération ».
Répondre à l’urgence écologique et climatique
L’article 1er reconnaît « l’urgence écologique et climatique », décrétée par le Président Emmanuel Macron. À cette fin, elle prévoit avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, une nouvelle loi pour déterminer les objectifs et fixer les priorités d’action de la politique énergétique nationale afin de répondre à cette urgence. Elle comprendra les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation d’énergie finale, de développement des énergies renouvelables, de diversification du mix de production d’électricité, de rénovation énergétique et d’autonomie énergétique en outre-mer pour une à trois périodes successives de 5 ans.
La loi crée le Haut Conseil pour le climat au 27 novembre 2018, organisme indépendant, placé auprès du Premier ministre. Composé de treize experts élus pour 5 ans, renouvelable une fois, il rend chaque année un rapport d’évaluation de l’action climatique de l’État et des collectivités territoriales. Le Haut Conseil pour le climat est chargé de l’évaluation de l’action climatique du gouvernement. Ses missions consistent à analyser annuellement la mise en œuvre et l’efficacité des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, développer les puits de carbone et réduire l’empreinte carbone. Il évalue les dispositions budgétaires et fiscales ayant un impact sur le climat et calcule l’impact socio-économique de ces politiques publiques. Ses travaux sont transmis au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental (CESE). Le Gouvernement est tenu de répondre à ce rapport sous 6 mois devant ces deux instances.
Une évolution du DPE pour mettre fin aux passoires thermiques
Le texte met en place un dispositif progressif de rénovation énergétique des passoires thermiques. Sont ainsi nommés les logements consommant plus de 331 kWh d’énergie primaire/m2/an. Objectif : les éradiquer d’ici 2028. Un rapport sera remis chaque année au Parlement sur l’atteinte des objectifs de rénovation. Il donnera une estimation du nombre de passoires thermiques rénovées l’année précédente et du nombre de celles devant encore être rénovées.
Une première phase incitative visera à inciter les particuliers à la rénovation. Ainsi, pour toutes les passoires thermiques, le diagnostic de performance énergétique (DPE) sera accompagné d’un audit énergétique. Il proposera des bouquets de travaux pour atteindre « un très haut niveau de performance énergétique » et au moins une proposition pour passer sous le seuil des 331 kWh d’énergie primaire. Cet audit fournit des ordres de grandeurs des gains sur la facture d’énergie et du coût des travaux, avec les aides existantes. Entre 2022 et 2027, les travaux deviendront obligatoires, l’obligation étant mentionnée dans les annonces immobilières. À partir de 2028, le non-respect de l’obligation sera rendu public dans les annonces immobilières, et d’autres sanctions graduées seront mises en place.
D’autres dispositions pour plus d’efficacité
Le texte prévoit pour les stratégies bas-carbone un « budget carbone spécifique au transport international » à partir de 2022, alors que les émissions de ce secteur ne sont pas intégrées dans les objectifs nationaux.
La loi renforce la lutte contre la fraude aux certificats d’économies d’énergie (CEE). À cette fin, elle accélère les procédures de contrôle et facilite les échanges d’information entre les services de l’État.
La loi énergie-climat supprime les tarifs réglementés de vente d’électricité pour les entreprises et collectivités publiques ayant plus de 9 salariés et celles ayant un chiffre d’affaires, ou recettes, ou bilan annuel de plus de 2 millions d’euros d’ici fin 2020. Elle précise enfin les conditions visant à la suppression des tarifs réglementés de vente (TRV) du gaz naturel d’ici 2023. La première étape : la fin de la commercialisation des TRV du gaz. « L’arrêt de la commercialisation du tarif réglementé de vente de gaz naturel prend effet au plus tard trente jours après la publication de la présente loi », indique le texte. Soit au plus tard le 10 décembre prochain.
Cet article se trouve dans le dossier :
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