Que faire des déchets nucléaires français et comment les gérer ? Ce sont des interrogations auxquelles devront répondre les participants au débat public sur l’avenir de la gestion des déchets nucléaires. La Commission nationale du débat public (CNDP) a annoncé que la concertation nationale se tiendra du 17 avril au 25 septembre prochain. Cette dernière fait suite à la demande formulée par l’ancien ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, auprès de la CNDP, en février 2018.
Au programme, plusieurs dossiers brûlants, à commencer par la saturation des actuels espaces de stockage des déchets nucléaires. La question est d’autant plus pressante que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a révélé qu’il y a en France 1,54 million de mètres cubes de déchets nucléaires, soit l’équivalent de 400 piscines olympiques. Ils sont disséminés dans 950 sites répartis sur tout le territoire national.
Un débat qui reviendra sur Cigéo
Pour les associations de lutte pour la préservation de l’environnement, cette concertation est capitale. « Ces déchets sont tous toxiques et présentent un risque de contamination pour la santé mais aussi les sols, les nappes phréatiques, l’air, les cours d’eau ou la mer en cas de fuite » considère Greenpeace France. Pour l’ONG, il est capital que la concertation aboutisse à un cinquième Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) qui permette d’assurer pleinement la sécurité des citoyens.
L’épineux sujet du projet Cigéo à Bure sera, à ce titre, l’un des incontournables de ce débat public. Pour rappel, l’État prévoit de créer un centre de stockage des déchets nucléaires les plus dangereux sous ce petit village de la Meuse, dans une couche d’argile, à 500 mètres de profondeur. Ces déchets sont classés dans les catégories MA-VL (moyenne activité à vie longue) et HA-VL (haute activité à vie longue). S’ils ne représentent qu’une toute petite partie des déchets nucléaires français (3%), leur radioactivité est quant à elle estimée à plusieurs centaines de milliers d’années.
Les piscines de refroidissement interrogent
Cependant, le projet Cigéo est loin d’être le point le plus chaud de cette concertation, car il n’est pas nécessairement le plus urgent. « Même si le projet de Cigéo se fait, on ne pourra pas y mettre les premiers déchets HA-VL et MA-VL avant 2075. Il y a plein d’autres problèmes en amont » rappelle Yannick Rousselet, porte-parole de Greenpeace France sur les sujets nucléaires, à 20 Minutes. Il considère en effet que le sujet principal du débat est le traitement des sites dont la capacité de stockage est au bord de la saturation.
En novembre dernier, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) avait estimé que la situation des piscines de refroidissement – où sont placés les déchets en sortie de réacteurs – était « globalement très tendue ». Cela concerne notamment le site d’Orano à La Hague dans la Manche, où les piscines risquent d’atteindre leur stade de saturation à l’horizon 2030. De son côté, le Centre industriel de regroupement d’entreposage et de stockage (Cires) dans l’Aube risque d’être saturé, selon l’Andra, dès 2025.
Des solutions qui divisent
Pour pallier le problème de stockage des déchets les moins radioactifs, à l’instar de ceux présents sur le site de l’Aube, des voix prônent le recyclage. « Pour les [déchets] TFA (très faible activité), la réglementation française nous impose aujourd’hui de les mettre en stockage, bien qu’ils présentent une très faible radioactivité et que nous savons les recycler », déclare Valérie Faudon, déléguée générale de la Société française de l’énergie nucléaire (Sfen). Elle ajoute que cette pratique est répandue en Allemagne, au Japon et en Suède, et propose que la France puisse en faire de même.
L’une des autres pistes suivies par EDF est la création d’une nouvelle piscine de refroidissement. Le projet, qui pourrait potentiellement voir le jour vers 2030, se situerait dans la commune de Belleville-sur-Loire (Cher). Cette nouvelle structure aurait une capacité de 5000 tonnes. Initialement, le projet a été pensé pour être un site de traitement du Mox usé (un mélange d’oxydes composé d’uranium et de plutonium). Mais les associations opposées au nucléaire désapprouvent cette option. « Le recyclage des TFA pose ensuite la question de la traçabilité de ces déchets, avec le risque qu’ils finissent par se retrouver dans des biens de consommation grand public », indique Charlotte Mijeon, porte-parole du Réseau Sortir du Nucléaire.
Des associations, dont le Réseau Sortir du nucléaire, ont d’ailleurs annoncé qu’elles ne participeraient pas à ce débat public. « À quoi bon débattre des options de gestion de ces substances ingérables, si la seule solution réellement existante, à savoir l’arrêt de leur production, est exclue par les pouvoirs publics ? », interrogent-elles dans un communiqué commun.
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