Personne ne peut aujourd’hui affirmer quand et dans quelles conditions sera mis sur le marché un véhicule autonome de niveau 5. Ce qui est certain, c’est que ces véhicules seront sur le marché dans les décennies à venir. La généralisation de ce mode de transport entrainera avec elle la nécessité de collecter les données relatives au fonctionnement des véhicules autonomes. En incluant en plus les données directement liées aux utilisateurs.
Les défis autour de la génération de ce volume de données extrêmement important sont de différentes natures.
La collecte et l’interprétation
Les caméras, radars, LiDARSs et même sonars sont utilisés pour permettre au véhicule d’appréhender au mieux son environnement, afin d’assister le conducteur dans sa tâche, et à terme de l’en décharger complètement.
Ces capteurs génèrent des données qui sont collectées, analysées et interprétées pour développer des algorithmes capables de traduire la perception du capteur en action au niveau du véhicule. Les innovations technologiques autour des capteurs permettent d’obtenir des données de plus en plus nombreuses et précises. Il y a donc un enjeu fondamental pour les équipes informatiques qui travaillent sur le développement des véhicules autonomes, celui de produire des algorithmes permettant d’exploiter au mieux ces données. Cela est nécessaire pour arriver à produire un véhicule autonome fiable.
En termes de collecte, l’enjeu est également de taille. Et probablement encore sous-estimé à l’heure actuelle, tant la technologie évolue vite. Ainsi, Intel, qui prévoyait un taux de collecte moyen de 4 To (tera octet) par véhicule et par jour en 2017, a revu sa copie, et projette aujourd’hui un volume de 20 To par véhicule et par heure !
Enfin, et il s’agit là également d’un véritable défi technologique, le véhicule autonome doit utiliser, en temps réel, les informations de différents capteurs pour parvenir à générer des informations fiables. Ces données, qui sont parfois de natures différentes, doivent donc être fusionnées et intégrées, en temps réel. Toutes ces problématiques reviennent sur la table à chaque niveau d’autonomie supplémentaire, car les marches technologiques entre chaque palier d’autonomie sont très importantes.
La composante stockage relève également du casse-tête: Tesla l’a appris à ses dépens, en sous-estimant le poids du firmware qui équipe plusieurs de ses modèles. Ce dernier, qui pesait 300 Mo dans sa première version, dépasse aujourd’hui 1 Go. Cela a obligé le constructeur à rappeler toute une série de véhicules pour changer leur carte MCU (Media Control Unit), avec au passage 3 000 dollars de frais pour les propriétaires concernés.
La monétisation et les services associés
On l’a dit, la masse des données générées par le véhicule autonome sera très importante. Ainsi, les constructeurs vont devoir évoluer et développer des compétences pour la gestion de ces données. La gestion technologique, on vient de l’évoquer, mais aussi la gestion économique, qui va devenir un enjeu capital.
Le sujet de la monétisation des données générées par le véhicule autonome, via le développement par exemple de services associés, est vital pour développer un modèle économique viable autour de ce mode de transport.
A l’heure actuelle, les constructeurs mettent en place des partenariats avec des acteurs du cloud, du numérique, et de l’IoT pour construire des offres de services directement liées à l’utilisation de ce nouveau service de mobilité, et aussi une bibliothèque de services et d’applications diverses, que le passager pourra « consommer » durant son trajet.
Dans un premier temps, il s’agit pour les constructeurs d’imaginer des écosystèmes compatibles avec les outils existants, principalement les smartphones et le cloud. Actuellement, les constructeurs imaginent développer des interfaces compatibles avec les smartphones actuels, pour que le passager connecte son smartphone au véhicule pour profiter de différents services. Le smartphone jouerait alors le rôle d’interface.
Le développement d’un cloud extrêmement performant sera également nécessaire pour donner au véhicule autonome la capacité de proposer un éventail d’applications le plus large possible.
Au final, le développement du véhicule autonome va probablement bouleverser de nombreuses industries et activités, grâce à l’exploitation de toutes les données collectées : par exemple, le suivi de l’usure des pièces mécaniques du véhicule va changer la manière d’en imaginer la maintenance. Les assurances également vont devoir réviser leurs modèles, puisque les véhicules autonomes sont amenés à devenir de plus en plus fiables. De manière transversale, ce sont donc toute une panoplie d’acteurs qui évoluent dans la sphère d’activité autour du véhicule autonome qui vont devoir s’adapter à ce nouveau paradigme progressivement.
Par Pierre Thouverez
Cet article se trouve dans le dossier :
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