La Commission européenne veut accompagner la transformation du modèle agricole. Si le plan Ecophyto vise une réduction de 50 % de l’usage des pesticides en France, la Commission vise une réduction similaire et une réduction des risques liés aux pesticides au niveau européen à l’horizon 2030. En plus, la nouvelle stratégie “De la ferme à la table” propose une baisse de 50 % des ventes d’antimicrobiens utilisés pour les élevages et l’aquaculture. L’objectif est aussi de réduire d’au moins 20 % l’utilisation de fertilisants et d’atteindre 25 % des surfaces agricoles conduites en agriculture biologique.
L’agriculture est responsable de 10,3 % des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne. Près de 70 % de celles-ci proviennent du secteur animal. Il s’agit principalement de méthane et d’oxyde nitreux. La Commission européenne veut donc réduire l’impact environnemental et climatique de l’industrie de la viande. “Nous examinerons les règles de l’UE pour réduire la dépendance à l’égard des matières premières critiques pour l’alimentation animale (par exemple, le soja cultivé sur des terres déboisées) en encourageant les protéines végétales cultivées dans l’UE ainsi que les matières premières alternatives telles que les insectes, les stocks d’aliments marins (par exemple les algues) et les sous-produits la bioéconomie (ex. déchets de poisson)”, propose la stratégie de la Commission européenne. Elle s’engage dans ce cadre à réviser la législation sur le bien-être animal, y compris sur le transport et l’abattage des animaux.
La transition pour moins de pesticides
L’association Générations Futures se spécialise dans la réduction des risques liés aux pesticides. Elle estime que la réduction de 50 % doit être “une première étape”. “Une élimination progressive des pesticides d’ici 2035 est une exigence centrale de l’initiative citoyenne européenne (ICE) “Sauver les abeilles et les agriculteurs”, déjà signée par plus de 300 000 européens, rappelle François Veillerette, directeur de Générations Futures. Nous appelons tous les citoyens de l’Union européenne à soutenir cette ICE pour que la Commission européenne aille encore plus loin en engageant l’Europe vers la sortie des pesticides de synthèse !”
L’eurodéputé PS Eric Andrieu insiste pour sa part sur l’importance d’une profonde réforme de la politique agricole commune (PAC) pour mettre en œuvre cette stratégie. “Il faut également que les agriculteurs soient soutenus et accompagnés dans ce qui sera un changement important de leur travail et leur quotidien”, avance-t-il. La réforme de la PAC est en effet un enjeu majeur. L’Union européenne travaille à sa réforme pour la période 2021-2027. Elle devra flécher les 55 à 60 milliards d’euros de subventions annuelles aux agriculteurs selon des critères climatiques et environnementaux.
Agriculture de précision contre agroécologie paysanne
Dans le cadre de cette nouvelle stratégie et la réforme de la PAC, l’Union européenne mise sur l’agriculture de précision et ses technologies numériques. La FNSEA appelle à renforcer cet aspect. Le syndicat agricole demande dans un communiqué des “investissements innovants, en particulier dans le numérique. Ne nous trompons pas de chemin et prenons la voie de la croissance durable et faisons confiance à l’innovation”, avance la FNSEA..
Les Amis de la Terre ne partagent pas du tout cet avis. “L’agriculture 4.0 ne nous affranchit pas du recours aux intrants chimiques qui contribuent fortement à la crise climatique et à de multiples pollutions mais surtout, on ignore volontairement l’empreinte environnementale de ces nouveaux équipements, dont le coût exorbitant va accroître l’endettement et donc la disparition des paysans et paysannes : il s’agit d’un non-sens social et environnemental”, alerte Anne-Laure Sablé, chargée de campagne Agriculture aux Amis de la Terre.
En ajoutant les géants du numérique aux géants de l’agrochimie, Les Amis de la Terre craignent que l’agriculture de précision aille à contre-courant des objectifs poursuivis par la stratégie. Loin d’augmenter la souveraineté alimentaire indispensable pour surmonter les crises, elle entraînerait une dépendance grandissante de notre alimentation aux multinationales. L’association appelle au “soutien de l’agroécologie paysanne, pour notamment s’affranchir des intrants chimiques”.
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