Pour Håkan Samuelsson, le PDG du groupe suédois Volvo, la stratégie est limpide: «Bien sûr nous ne devrions jamais dire jamais, mais il est important pour nous d’être clairs. L’herbe est toujours plus verte de l’autre côté et il y a toujours quelque chose de nouveau, mais l’électrification avec les batteries est ce en quoi nous croyons» a déclaré ce dirigeant dans le cadre d’une interview pour le média WardAuto le 20 mars 2017. «Avec l’hydrogène vous auriez besoin, une nouvelle fois, d’une nouvelle infrastructure, donc je pense qu’il y a une limite aux efforts d’investissement que les gens peuvent consacrer. Nous pensons que nous devons nous focaliser sur une seule technologie énergétique principale, et nous pensons que c’est l’électrification car elle est plus flexible.» Avec modestie ce dirigeant conclue: «Bien sûr, nous pouvons nous tromper».
Un projet de gigafactory de batteries mené par des anciens dirigeants de Tesla et nommé NorthVolt est en cours en Suède, ceci avec le soutien de l’ADEME suèdoise et de l’énergéticien suédois Vattenfall. L’énergéticien Fortum, basé en Finlande, met de son côté en place une autoroute de superchargeurs hyper-rapides nouvelle génération entre Oslo, Stockholm et Helsinki.
Le PDG de Tesla, le multi-entrepreneur à succès Elon Musk, dit exactement la même chose que le PDG de Volvo, mais dans une communication plus directe et vraiment percutante. Pour lui, sur la base d’une analyse très rationnelle de l’efficience énergétique, vouloir commercialiser la voiture à hydrogène est «mind-bogglingly stupid» (d’une stupidité époustoufflante), «incredibly Dumb» (incroyablement débile), et pour celles et ceux qui n’auraient pas encore compris et pour résumer en un seul mot, «bullshit» (foutaise). Elon Musk n’est pas un ignorant dans le domaine de l’Hydrogène: il est aussi le PDG de SpaceX.
Pour Daimler, dont Mercedes-Benz est une filiale, la communication est en revanche plus complexe, car le groupe a beaucoup investi dans la R&D sur la pile à combustible ces dernières années. Dans un article publié sur le site spécialisé Smart2Zero le journaliste Christoph Hammerschmidt fait écho de propos tenus le 27 mars 2017 par le PDG de Daimler:
«Lors d’un congrès automobile à Stuttgart le PDG de Daimler Dieter Zetsche a dit que la pile à combustible ne joue plus un rôle central pour l’entreprise. Bien que Daimler soit toujours en possession d’une technologie de pile à combustible haut de gamme, l’avantage de cette technologie sur l’approche reposant sur les batteries se réduit a déclaré Zetsche. Au départ, les véhicules équipés de pile à combustible offraient une bien meilleure autonomie (range) et un meilleur temps de recharge comparativement aux batteries. Cependant les technologies ultra-modernes de batterie ont conduit à la fonte de cet avantage, en particulier si le coût est pris en compte. «Le coût des batteries s’effondre rapidement tandis que que la production d’hydrogène demeure très coûteuse» a déclaré Zetsche».
L’Hydro gène ? Revue de presse
Cet article de Smart2.0 a eu un important écho dans les médias internationaux qui ont tous bien compris le message essentiel: Daimler met à présent le focus sur les batteries. Ce choix technologique de Daimler est hautement stratégique et très révélateur sur la révolution en cours dans l’ensemble de l’industrie automobile.
Pour CleanTechnica, premier média mondial dans le domaine des CleanTechs (repris par Gas2), «Mercedes laisse tomber les piles idiotes»(Fool cell, jeu de mot popularisé par Elon Musk avec Fuel cell, pile à combustible). «Peu de temps après avoir rejoint Toyota et BMW dans une campagne à 10 milliards de dollars pour développer la technologie des piles à combustible (le «Conseil de l’hydrogène» NDLR), Mercedes a renversé la vapeur (…) Il est difficile de dire ce qui a bien pu se passer pour qu’il (le PDG de Daimler NDLR) change son avis en seulement 6 semaines (…) Manifestement Dieter Zetsche est à présent d’accord avec le redoutable Mr. Musk. Mercedes a annoncé cette semaine investir 10 milliards de dollars pour produire 10 nouveaux modèles de voitures électriques à horizon 2022». Soit 3 ans d’avance avec ce qui avait été annoncé peu de temps avant.
Pour Fortune «Daimler fait marche arrière sur son programme de voitures équipées de pile à combustible» et pour CNET «Daimler se découple consciencieusement de l’Hydrogène. Il ne s’agit peut-être pas d’une rupture totale, mais l’hydrogène n’occupe plus une place centrale». Selon HydrogenFuelNews «l’
Pour The Drive «Daimler pourrait réduire la voilure de ses plans sur la voiture équipée de pile à combustible (…) La décision de Daimler de réduire l’échelle de son plan sur la voiture à hydrogène fait suite à l’annonce de Toyota relative au lancement d’un projet de construction d’une voiture électrique à batterie parrallèlement à la Mirai, voiture à hydrogène. Toyota était l’un des moteurs de la promotion des piles à combustible, et auparavant considèrait que les batteries étaient inexploitables». C’est effectivement ce virage majeur de Toyota qui semble avoir conduit Daimler à revoir sa stratégie. Pour le média allemand Die Presse ces turbulences pourraient conduire à la remise en cause de l’alliance formée en 2013 entre Daimler, Renault et Ford sur la pile à combustible.
Selon le média d’ingénierie norvégien de référence Teknisk Ukeblad «Daimler a mis au rebut la quasi-totalité de son programme hydrogène». La Norvège est la championne du monde de la voiture électrique à batterie. Le magazine d’ingénierie danois Ingeniøren a publié un article au titre identique. En France le site spécialisé Automobile Propre a titré «Hydrogène: Daimler lève le pied» et AutoJournal (repris par AutoMotorBuzz), «Daimler dit au revoir à la pile à combustible. (…) Daimler aurait quasiment arrêté le développement de ses voitures à pile à combustible hydrogène. Seuls certains projets seraient conservés comme le Mercedes GLC F-Cell Plug-In, qui est d’ailleurs attendu dès cette année. Cependant, le groupe allemand ne proposera qu’une production limitée et réservée à des flottes d’entreprises.»
Non, ce n’est pas une « fake news »: Daimler met bel et bien le focus sur les batteries
Sur HydrogenToday, site de promotion de la filière Hydrogène, un journaliste engagé affiche son scepticisme: «Mercedes qui renonce à l’hydrogène : fake news ? (…) C’est d’autant plus surprenant qu’il n’a en fait jamais dit ça (…) L’auteur de l’article, qui est le rédacteur en chef, Christoph Hammerschmidt, a pu mal interpréter les propos de M. Zetsche (…) A l’heure des réseaux sociaux et des sites qui propagent des informations erronées, il faut faire attention. C’est à ce genre de détail que l’on mesure l’intérêt de privilégier les sites animés par des journalistes professionnels, plutôt que des sites alternatifs». Smart2.0 est un média d’European Business Press qui diffuse 44 publications dans 24 pays, dont Les Echos, L’Expansion et Capital en France, ainsi qu’Euractiv et The Wall Street Journal Europe.
Contacté par Techniques-ingénieur.fr le service communication de Daimler estime que le titre de l’article Smart2.0 est exagéré et peut éventuellement induire en erreur (« misleading ») les personnes peu attentives qui se limitent à lire ce titre. Mais Daimler estime que le contenu de l’article est en revanche correct: si le groupe n’abandonne pas son programme de R&D sur la voiture à hydrogène, le PDG a en revanche bel et bien tenu les propos rapportés, il a bien dit cela.
Christoph Hammerschmidt a titré: «Daimler dit adieu à la technologie Hydrogène», tout en précisant dans son chapeau introductif: «Après une longue phase de course en zig-zag le constructeur automobile Daimler a décidé de ne pas continuer le développement des voitures équipées de piles à combustible, au moins pas avec une haute priorité (…) Le bon chemin est à présent le développement des voitures électriques à batterie». Si le titre est effectivement incomplet, un brin provocateur et à fort potentiel de buzz (cela a bien fonctionné), le chapeau introductif est en revanche très clair, tout comme le reste de l’article.
En réponse à une demande de Techniques-ingénieur.fr, Mad
Cette professionnelle de la communication est dans son rôle en corrigeant les titres de presse exagérés et en expliquant que Daimler, qui fait partie du Conseil de l’Hydrogène créé fin janvier 2017, n’a pas abandonné son programme de R&D sur l’Hydrogène: «Le plus important d’abord: il n’y a pas de changement dans nos plans sur la technologie des piles à combustible. Cette technologie fait intégralement partie de notre stratégie à long terme sur les chaînes de propulsion. La présentation de notre véhicule de nouvelle génération, la Mercedes Benz GLC F-CELL, est planifiée pour cette année». Christoph Hammerschmidt fait précisément écho de ce nouveau modèle dans son article, modèle qui sera produit en petites quantités.
Madeleine Herdlitschka ajoute les bémols inévitables: «Compte-tenu en particulier du faible nombre de stations de charge à hydrogène, mais aussi en raison des coûts encore relativement élevés, l’introduction dans le marché sera sélective.» Autrement dit les ventes, à petite échelle, ne concerneront que des îlots, comme par exemple le Japon, certaines parties de la Californie et de l’Allemagne, ou encore Londres. Autrement dit Christoph Hammerschmidt a raison de souligner que Daimler renonce à un développement commercial massif de la voiture à hydrogène.
La représentante de Mercedes poursuit: «Il n’y a aucun doute concernant le potentiel de la technologie de la pile à combustible et de l’hydrogène comme une solution de stockage énergétique à l’échelle du système énergétique dans son ensemble. Avec une part croissante des énergies renouvelables, l’Hydrogène jouera certainement un rôle à importance grandissante pour l’ensemble du système énergétique et par conséquent deviendra de plus en plus attractif pour le secteur de la mobilité». Ce joli enrobage, en recourant à des promesses pour le long-terme, est un grand classique chez ceux qui cherchent à verdir l’image de l’Hydrogène.
En réalité une analyse rigoureuse (comme celle-ci de la part d’un expert de l’Agence Internationale de l’Energie) permet de montrer que le Power-to-Gas à partir de surplus de production solaire et éolienne n’a aucune chance de devenir compétitif. L’Hydrogène demeurera donc d’origine fossile (reformage du méthane) et ne s’inscrira donc pas dans une perspective de développement durable compte-tenu de la nature non infinie des ressources fossiles.
Madeleine Herdlitschka termine son message électronique par une information de haute importance stratégique: «Cependant la batterie est actuellement meilleure que la pile à combustible en ce qui concerne un lancement commercial complet, pas seulement à cause de l’équation des coûts et de la construction de l’infrastructure. Mais aussi en termes de densité énergétique, la technologie batterie a réalisé de grands bonds en avant et a ainsi réduit l’avantage de la pile à combustible sur le plan de l’autonomie. Dans les années à venir notre focus sera sur les voitures électriques à batterie et l’expansion de notre plateforme EQ. En dépit de ce focus actuel nous continuons nos activités dans le domaine de la technologie des piles à combustible.» Le contenu de l’article de Christoph Hammerschmidt est donc parfaitement exact.
Voilà des propos pour le moins en contraste avec ceux de Pierre-Etienne Franc, directeur marchés et technologies avancés du groupe Air Liquide, qui a déclaré en septembre 2016 (Minute 9’25 » de cette vidéo): « Il y a des débats sur les technologies. Il y en a qui disent on pourra donner des Tesla a tout le monde et puis cela sera merveilleux. Je ne suis pas sûr que tout le monde sera capable de se payer des Tesla. Et puis faire des voitures à des prix compétitifs avec des batteries, il va y avoir un certain nombre d’endroits où cela va être plus difficile. Donc il faut porter le sujet en débat ». Le groupe Daimler affirme au contraire que les voitures à batterie sont davantage compétitives que les voitures à hydrogène, d’où le focus sur les premières.
Le PDG de BMW, Harald Krueger, a une analyse similaire: «Jusqu’en 2025, les coûts resteront trop élevés et l’infrastructure hydrogène trop rare pour permettre une large pénétration du marché ». BMW investira « lorsque les fondamentaux seront en place». BMW, tout comme Daimler, fait partie du«Conseil de l’Hydrogène» lancé en janvier 2017 à Davos.
Le groupe Volkswagen, embourbé dans le scandale de la fraude sur les voitures diesel, vient de son côté de lancer un grand programme de voitures 100% électriques baptisé «I.D.» Le géant allemand veut commercialiser 30 modèles 100% électriques d’ici 2025 et va mettre en place un réseau de charge similaire à celui de Tesla.
Focus sur le focus…
Le rédacteur en chef de Smart2.0 a choisi de mettre le focus… précisément sur le focus stratégique que Daimler a choisi de mettre sur la voiture électrique à batterie. Ce qui relève du bon sens. Focaliser sur une technologie marginale, très inefficiente et coûteuse serait comme mettre la charrue avant les boeufs.
Ce bousculement des plans initiaux de Daimler est très significatif: il illustre la panique des constructeurs traditionnels face à la puissance de la vague Tesla qui se prépare. Inquiétude bien entendu non avouable. Tencent, géant chinois de l’internet, a rejoint le capital de Tesla. Etape majeure de l’histoire automobile Tesla a dépassé il y a quelques jours Ford dans sa valorisation boursière et tutoie à présent celle du premier constructeur américain General Motors.
Tesla vaut à présent davantage que la somme ENGIE + EDF + AREVA.Cette valorisation est la marque de la confiance que portent les investisseurs envers la stratégie de Tesla qui est celle du 100% batterie. Ceux qui ont le regard tourné vers le passé et non pas vers le futur ont du mal à comprendre le phénomène.
C’est en réalité un véritable tsunami qui se prépare. Dans le segment haut de gamme Tesla, avec ses Modèles S et X, a devancé Mercedes et BMW au niveau des ventes en Amérique du nord. Avec l’arrivée de la Tesla Model 3, au prix deux fois moins élevé, ces groupes allemands ont beaucoup à perdre. La nouvelle stratégie à 10 milliards d’euros de Daimler de proposer une gamme de 10 voitures diversifiées (100% électriques à batterie) permettra d’affronter Tesla qui ne proposera que 4 modèles: S, 3, X et Y. Se disperser dans des méandres hydrogénés aussi douteux que coûteux pourraît à l’inverse être fatal. Daimler vient d’annoncer une alliance avec Bosh dans le domaine de la voiture autonome, manifestement là aussi dans la perpective de faire face au rouleau compresseur Tesla.
Stratégie Hydrogène: une motivation véritablement écologique ?
Selon le Financial Times, si Toyota mise autant sur la pile à combustible, ce n’est pas vraiment pour contribuer à libèrer le monde de sa dépendance envers les combustibles fossiles. Les stratèges du Ministère de l’écononomie japonais (METI), en accord avec Elon Musk, estiment que l’Hydrogène produit par électrolyse à partir de surplus d’électricité solaire ou éolienne n’est pas du tout viable et qu’il proviendra en réalité dans son énorme majorité d’hydrocarbures fossiles. Au Japon, l’hydrogène sera produit à partir de charbon australien. Le METI envisage de produire de l’hydrogène à partir de «vastes dépôts de charbon de basse qualité en Australie, avec séquestration du CO2 dans le sous-sol» révèle le Financial Times. «Ils envisagent des navires-tankers chargés d’hydrogène et navigant depuis l’Australie, apportant le combustible tout comme maintenant, mais laissant le CO2 derrière».
Le journaliste Daniel Cooper (Engadget) a une analyse similaire:«L’industrie du pétrole et automobile veut utiliser l’hydrogène contre la voiture électrique à batterie (…) La raison pour laquelle ces entreprises s’unissent autour de l’hydrogène ce n’est pas de sauver la planète».
Selon le Financial Times «Toyota ne le dit pas trop fort mais la grande difficulté de construire des piles à combustibles explique en partie l’attirance du Japon concernant cette technologie. Le business de la voiture électrique ressemble à celui des téléphones portables: simple, modulaire, facile à assembler et vulnérable aux nouveaux entrants provenant de Chine et de la Silicon Valley.» Si l’industrie automobile suit le chemin de l’hydrogène, le Japon sera bien positionné. Mais dans le cas contraire Tokyo aura commis «une erreur majeure» estime un expert du METI.
Selon un rapport récent du cabinet Lux Research «l’Hydrogen economy évolue d’une façon isolée, spécifiquement japonaise, et manque de soutien de la part d’autres acteurs, ce qui met en question la viabilité du concept».Lux Research estime qu’il s’agit du « syndrome de Galapagos ».
Il semble que les groupes automobiles allemands ont compris ces dernières semaines que le Japon prend un bien trop grand risque: le bouclier hydrogéné est bien fragile dans la bataille face aux batteries qui sont de plus en plus redoutables. Au Japon un point de charge à hydrogène coûte 4,5 millions de dollars. Soit un ordre de grandeur de plus qu’un superchargeur Tesla. Travailler à 700 bars (une pression énorme) est un véritable défi.
Le magazine américain AutoWeek a publié un édito dont le titre s’inscrit dans un style à la Elon Musk: «It’s time to bash hydrogen» (Il est temps de faire de l’Hydrogène-bashing), estimant que la voiture à hydrogène, du fait de son ineficience, est «kafkaïenne». «L’hydrogène c’est du grand n’importe quoi. Encore davantage que des foutaises (bunk), en fait» tonne sans ambages l’éditorialiste. Le média Transport Evolved a réalisé une vidéo véhiculant exactement le même message: vous voulez être écolo ? Mettez des panneaux solaires sur votre toit pour charger la batterie de votre véhicule électrique.
Dans un article intitulé «l’Hydrogène refuse de mourrir» (puis «L’hydrogène n’est pas encore mort») la MIT Technology Review estime que «L’hydrogène a été un flop dans le marché grand public, mais il est encore porteur d’un petit espoir dans les domaines industriel et militaire (…) Les tentatives pour convaincre le public ont échoué. Si certains constructeurs continuent de faire pression, d’autres, de manière croissante, se dirigent vers d’autres pensées». Pour Rembrandt Koppelaar, expert énergie de l’Imperial College London contacté par Techniques-ingénieur.fr et qui a été dans le passé l’animateur de The Oil Drum, si l’hydrogène offre effectivement très peu d’intérêt pour les véhicules légers, «le marché des camions, des bus et des avions reste potentiellement intéressant, pour les longues distances». Mais les bus à hydrogène seront-ils vraiment compétitifs face aux bus électriques comme par exemple ceux du californien Proterra dont l’autonomie peut dépasser les 500 kilomètres ?
Même sur ce marché là, la bataille s’annonce rude pour les inconditionnels afficionados du gaz. L’étrange hype franco-nippon sur l’hydrogène, auquel l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) et le CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) contribuent, est en décalage avec les fondamentaux du monde physique et économique et prend de plus en plus la sonorité d’un chant du cygne face à la puissance des industries chinoises et californiennes.
Le concept de prolongateur d’autonomie embarqué devient obsolète
Le concept de prolongateur d’autonomie embarqué (moteur diesel ou pile à combustible, en plus d’une batterie de taille modeste) conduit à des coûts élevés. Il faut équiper chaque voiture avec ce «range extender». Le concept de prolongateur d’autonomie stationnaire (superchargeur permettant de capturer 300 kilomètres en 20 minutes), compte-tenu de sa nature mutualisée, partagée, est une option bien plus pertinente dans une perspective à la fois écologique et économique. Dans une logique d’économie des ressources il vaut mieux placer les générateurs diesels ou les piles à combustible au pied des superchargeurs, en version stationnaire.
Les trajets automobiles quotidiens font dans leur grande majorité moins de 300 kilomètres et il est possible de recharger à la maison ou sur le lieu de travail la batterie de la voiture: pas besoin de perdre son temps pour aller faire le plein. L’argument d’un plein d’hydrogène entre 3 et 5 minutes n’a donc aucun intérêt pour ce type d’usage très largement majoritaire. A fortiori s’il faut consommer 15 minutes pour aller à la station hydrogène et de nouveau 15 minutes pour la quitter.
Pour les (rares) trajets annuels supérieurs à 300 kilomètres la sécurité routière conseille fortement de faire une pause de 20 minutes toutes les deux heures. Le temps de prendre un café ou une tasse de thé…Mais pas avec l’eau sortant des pots d’échappement des voitures à hydrogène. Une autonomie de 300 kilomètres suffira par conséquent pour réaliser la totalité des trajets en voiture 100% électrique à batterie. Game over.
Selon la banque Morgan Stanley le marché de la batterie stationnaire (parrallèle à celui de la batterie embarquée) va croître bien davantage que ne le pensent de nombreux acteurs, favorisant la baisse des coûts. «Quelle est la nouvelle menace pour l’industrie pétrolière ?» interroge le New York Times. Réponse: «la croissance globale des voitures électriques». En février 2017 The Guardian a fait écho d’une étude de l’Imperial College London dont la conclusion est que «les voitures électriques et le solaire bon marché pourraient stopper la croissance des combustibles fossiles dès 2020».
Olivier Daniélo
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