Recycler des déchets plastiques pourtant considérés comme non recyclables en utilisant… d’autres déchets. Le pari que s’est lancé Cycl-Add pouvait paraître audacieux. Mais cinq ans après la création de la jeune pousse, son président Hervé Guerry l’assure : « Même si, au départ, on ne nous croyait pas trop, aujourd’hui les gens constatent que notre technologie fonctionne et qu’elle fonctionne même très bien ! ». La start-up basée à Maillat, dans l’Ain, est en effet parvenue à développer une technologie particulièrement vertueuse – basée sur la récupération – qui permet de produire des matières plastiques hautes performances.
Récupérer des déchets voués à l’enfouissement ou à l’incinération
« Pour ce faire, nous récupérons d’une part des déchets plastiques qui n’ont pas de solution de recyclage, par exemple des seaux de peinture souillés ou des plastiques en mélange impossibles à séparer, tels que des textiles, décrit le président de l’entreprise. Nous récupérons également, d’autre part, des déchets industriels comme des poudres de peinture ou de toner d’impression, qui n’ont, eux non plus, pas de solutions de recyclage, mais qui peuvent apporter des propriétés intéressantes ».
Tout l’art consiste ensuite à élaborer des mélanges aux proportions précisément définies, afin de produire des matières aux propriétés constantes. Une gageure que Cycl-Add est parvenue à soutenir et qui lui permet aujourd’hui de proposer à ses clients des matières plastiques adaptées à leurs besoins et aux contraintes propres à leurs marchés respectifs.
Des matières adaptées à de multiples usages
« À partir de seaux de peinture, nous sommes par exemple capables de produire des caisses de transport répondant aux normes de transport de produits dangereux », indique ainsi le président de la start-up aindinoise. Autres exemples cités par le dirigeant, celui de plaques de protection pour pipeline, de plateformes de maintenance destinées à la ligne TGV Bordeaux-Paris ou encore d’un polyamide hautes performances produit à partir de déchets textiles en polyamide et élasthanne. « Nous sommes capables de “compatibiliser” ces deux matières pour en faire un polyamide choc utilisable, par exemple, pour fabriquer des fixations de ski », explique Hervé Guerry. Sans pouvoir en révéler la nature précise, le dirigeant indique également produire des pièces utilisées dans le secteur du gaz et qui répondent donc aux normes propres à ce marché.
Une « nouvelle chimie » à explorer
Avec sa technologie de recyclage, c’est une « nouvelle chimie » qu’explore Cycl-Add, comme le souligne Hervé Guerry : « La chimie sur laquelle nous travaillons diffère de celle qui est habituellement à l’œuvre avec des matières et des additifs vierges. Quand nous utilisons un déchet, celui-ci amène souvent plein de propriétés. Nous sommes capables d’apporter des charges pour les modifier, les adapter aux besoins d’un client. Nous parvenons même parfois à de meilleurs résultats qu’à partir de matières vierges ». Une nouvelle approche qui offre en outre à un client la possibilité de réintégrer, dans ses produits, des matières issues de ses propres déchets. Sur le plan environnemental, l’intérêt de la solution développée par Cycl-Add ne s’arrête d’ailleurs pas là : consommation d’énergie et émissions de CO2 sont aussi sensiblement réduites.
Une empreinte environnementale réduite
« Nous avons réalisé des ICV (inventaires de cycle de vie) sur les matières. Ils ont montré qu’un kilo de matière sortant de chez nous permet d’éviter l’émission de deux kilos de CO2 pour un polypropylène et jusqu’à huit kilos pour du polyamide. Les consommations d’énergie sont quant à elles divisées par dix environ », détaille Hervé Guerry. Des arguments auxquels des clients de plus en plus nombreux se révèlent sensibles, selon le président de Cycl-Add, qui vise donc désormais l’industrialisation à grande échelle de son procédé. « Notre process est principalement basé sur un chauffage à basse température et des techniques de granulation standards. Tout se passe en une seule opération et le procédé est donc tout à fait industrialisable avec de grosses quantités », assure Hervé Guerry. Composée pour l’heure de six personnes, la start-up aux 200 k€ de chiffre d’affaires a ainsi lancé une levée de fonds de six millions d’euros. De quoi lui permettre de créer une première usine d’environ 5 000 m² et d’atteindre des objectifs sans doute aussi ambitieux que le pari de départ : 300 embauches et 40 millions d’euros de chiffre d’affaires d’ici six à sept ans. Après avoir relevé le défi de la transformation des déchets en ressources, Hervé Guerry confie désormais voir en eux « une flaque de pétrole en plein désert ».
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