La communauté scientifique (et industrielle) s’intéresse de près aux astéroïdes pour des raisons très diverses :
- les astéroïdes voyagent et transportent de la matière dans le temps et dans l’espace et sont donc porteurs de réponses concernant la formation de l’univers, de notre planète et de l’apparition de la vie.
- Un intérêt de sécurité car mieux les connaître et être capable de s’en approcher voire s’y poser c’est pouvoir plus facilement trouver des solutions pour éviter une collision dramatique avec la Terre.
- Un intérêt économique, car on commence à imaginer comment exploiter leur richesse minière.
Bon. Sauf que pour le moment la mission Rosetta et l’atterrissage de Philae sur la comète Tchouri en 2014 reste une réalisation exceptionnelle.
En route pour Ryugu et Bennu
Il y a un an, le 8 septembre 2016, la Nasa a lancé Osiris-Rex, une sonde à destination de l’astéroïde 101955 Bennu (Bénou en version française). Hasard du calendrier, Osiris Rex vient de nous rendre visite ce vendredi 22 septembre pour profiter de l’assistance gravitationnelle de la Terre, prendre quelques clichés et repartir plus vite vers sa destination qu’elle doit atteindre en 2020. Pour elle, le retour est programmé en 2023. Son objectif ? Récolter quelques échantillons de roche et les ramener sur Terre. Comment? Grâce à un bras de 3,35m qui crache un jet d’azote qui doit décoller des roches et un aspirateur capable de récolter et stocker 60g de matière. Un système largement inspiré des Japonais qui sont eux en route pour 162173 Ryugu avec Hayabusu 2 dans le but de récolter 1g de matière. Lancée en décembre 2014, Hayabusa 2 doit tenir compagnie à Ryugu de juillet 2018 à février 2019 et lâcher Mascot, un atterrisseur fourni par les Allemands (DLR) et les Français (CNES), avant de revenir sur Terre en décembre 2020. L’agence spatiale japonaise (JAXA) n’en est pas à son coup d’essai, elle bénéficie de l’expérience d’Hayabusa 1 qui a touché le sol de de l’astéroïde Itokawa en 2005 sans réussir à se poser convenablement mais en ramenant quelques centaines de grains de poussières à son bord.
Des plans sur la comète
Ces tentatives ont tôt fait d’échauffer les esprits inventifs et cupides de plusieurs entités économiques prêtes à partir à la chasse aux minéraux, métaux et ressources énergétiques que l’espace peut nous offrir. Après tout, selon son type, un seul astéroïde d’un kilomètre de diamètre pourrait fournir le fer et le nickel mondial pour une année entière. Outre la création spécialement dans ce but de deux entreprises américaines (Planetary Ressources et Deep Space Industries), ce sujet a fait l’objet récemment de la publication d’un livre blanc par le Luxembourg à la suite d’une discussion mondiale entre toutes les parties intéressées en septembre 2016. Notons d’ailleurs que le Luxembourg se veut à la pointe du sujet . Il vient de mettre en place (aout 2017) un cadre législatif favorable pour les entreprises qui envisagent cette activité. Ce cadre se veut un modèle pour un futur droit commercial international de l’espace ; il est calqué sur le droit maritime où il n’y a pas d’appropriation en soi mais un droit à exploiter les ressources.
Le contenu de ce livre blanc de 80 pages a été présenté à l’occasion du congrès européen des sciences des planètes (European Planetary Science Congress) organisé par Europlanet à Riga en Lettonie du 17 au 22 septembre 2017.
Mettant en avant le fait qu’on ne sait pas encore grand chose des astéroïdes : quels sont ceux qui sont « facilement » accessibles depuis la Terre, quel est leur composition ? Comment la connaître ? Comment les exploiter : sur place, sur Terre, sur une base lunaire ? Que nous reste-t-il à développer ? De quoi mesurer que leur exploitation n’est vraiment pas pour demain…
Plus on est de fous…
A l’occasion du Congrès d’Europlanet, le Dr. Pekka Janhunen de l’Institut finlandais de météorologie, est venu présenter son concept pour visiter 300 astéroïdes en trois ans. De quoi s’agit-il ? Simplement d’une flotte d’une cinquantaine de mini-sondes spatiales munies d’une propulsion à base de voiles électriques à vent solaire (E-sails) embarquant télescope, caméras et spectromètre pour évaluer la composition des astéroïdes. Chaque sonde passerait à quelque 1000 km de 6-7 astéroïdes avant de revenir sur Terre délivrer ses données. Les sondes feraient à peu près 5 kg et seraient placées au bout d’une longe d’une vingtaine de kilomètres. Le système d’E-sail inventé par Pekka Janhunen en 2006 fournirait une vitesse de l’ordre d’un millimètre par seconde. Il utilise l’énergie des protons des vents solaires pour créer la rotation d’une tige qui fournit alors un faible courant électrique. L’aller-retour jusqu’à la ceinture d’astéroïdes prendrait donc à peu près 3,2 ans. Comme ces sondes n’auraient pas la capacité d’emporter une grande antenne, elles seraient obligées de repasser vers la Terre pour livrer leurs données. « Le coût total de la mission est estimé à 60M€ (lancement compris), soit 200 000 euros par astéroïde visité, une bagatelle comparativement au coût d’une mission conventionnelle qui se chiffrerait tout de suite en milliards », précise l’auteur. Reste qu’on attend encore la validation du fonctionnement dans l’espace d’une telle sonde.
Par Sophie Hoguin
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