Marraine des Ingénieuses 2019 et vice-présidente du groupe Altran, Corinne Jouanny encourage la mixité en entreprise pour améliorer la performance et l’innovation.
Pour leur 9e édition, les Ingénieuses 2019 ont choisi pour marraine Corinne Jouanny, une figure importante de l’engineering en France. Vice-présidente du groupe Altran en charge de la technologie et de l’innovation pour l’Europe, elle insiste sur l’importance de la mixité en entreprise, sur son incidence sur le fonctionnement de la société et le déroulement des projets d’innovations. Elle a cofondé le réseau international « Women in Engineering » afin de promouvoir le travail des femmes scientifiques tout en inspirant les plus jeunes.
Pourquoi avez-vous accepté d’être la marraine de l’édition 2019 des Ingénieuses ?
Tout d’abord, Altran est l’un des plus gros recruteurs d’ingénieurs en France donc nous avons beaucoup de partenariats avec les écoles et nous connaissons bien les Ingénieuses. Ensuite, de manière personnelle, je me définis comme femme, scientifique, leader et militante positive pour la mixité. Il y a une culture très française qui consiste à dépeindre les situations de manière terrible. Mais même si elles le sont – quand on regarde les chiffres au-delà du domaine scientifique, l’égalité hommes-femmes est toujours un combat-, je n’oublie pas que si nous sommes à nos places actuellement, c’est grâce aux générations de femmes et d’hommes qui se sont battus avant nous. Je ne veux donc pas seulement dénoncer des situations et faire des constats, mais incarner un militantisme optimiste. J’ai compris au fil de ma carrière que nous avions besoin de témoignages et de role model pour faire avancer les choses.
Qu’avez-vous pensé des finalistes et lauréates de cette édition ?
Elles sont toutes bluffantes, autant les écoles et le personnel enseignant que les élèves et ingénieures. Les étudiantes notamment ont des projets originaux et réalisent énormément de choses en parallèle de leurs études avec des projets associatifs et humanitaires. Je trouve cela extrêmement positif et motivant de se retrouver ainsi avec d’autres femmes et hommes qui disposent de la même passion, du même optimisme, avec la volonté de faire qui est la base de notre métier d’ingénieur. Être la marraine d’un tel événement m’apporte une reconnaissance qui me donne énormément d’énergie.
Comment agissez-vous pour favoriser la mixité en entreprise ?
Il y a 6 ans, j’ai cofondé le réseau international « Women in Engineering » à destination des femmes en entreprise. Toutes ont la même problématique : elles sont dans des organisations avec peu de femmes et encore moins de femmes dirigeantes. Notre objectif consiste à montrer l’intérêt de la diversité de genre en entreprise sur deux sujets : la performance de l’entreprise et l’innovation. Beaucoup d’études montrent que la performance est améliorée en fonction du nombre de femmes dirigeantes. Nous tenons néanmoins à ce que notre réseau reste inclusif pour éviter d’opposer le féminin et le masculin. Ainsi, nous faisons en sorte que 20% d’hommes soient présents lors de nos meetings.
Comment les femmes dirigeantes améliorent-elles la performance de l’entreprise ?
Dans le cadre de « Women in Engineering », nous avons réalisé une étude qualitative en 2014 sur la mixité, la performance, l’entreprise et l’innovation. Nous avons étudié les caractéristiques des leaders féminines et il s’est avéré qu’en général, les femmes ont une méthode de management plus inclusive et qui porte plus d’attention aux interactions entre les personnes. Cette méthode est très importante aujourd’hui car pour développer une technologie comme une voiture autonome par exemple, il faut réunir des spécialistes de la mécanique, des sciences sociales, du digital, du télécom, de l’informatique etc. Or chacun a une manière variée d’appréhender les sciences. Le mode de management inclusif permet de mieux gérer ces différents aspects.
Qu’apporte la mixité aux projets d’innovations ?
Intégrer la notion de genre fait progresser l’innovation et apporte davantage d’inclusion et d’accessibilité aux produits et services que l’on conçoit. Aujourd’hui, lorsque l’on réalise une innovation, le biais de genre fait que notre produit peut véhiculer des stéréotypes. Par exemple, les essais de médicaments sont majoritairement réalisés sur des souris mâles afin que les résultats soient plus lisibles. Lors de la commercialisation, il y a donc davantage de risques pour les patientes que pour les patients. Autre exemple dans le secteur automobile, les ceintures de sécurité ne sont pas adaptées aux femmes enceintes. Ces biais sont également présents dans l’informatique, comme l’ont analysé Aude Bernheim et Flora Vincent dans « L’intelligence artificielle, pas sans elles ! ». Elles expliquent que coder, c’est comme écrire un texte donc l’intention et la manière d’aborder le projet vont directement dicter la conception. La mixité des équipes d’innovation permet alors d’éviter les biais et les stéréotypes. Enfin, l’égalité hommes-femmes bénéficie autant aux deux sexes. Si les femmes peuvent accéder à des carrières scientifiques, les hommes ont également la possibilité de faire d’autres choix de carrières, de demander des congés parentaux et de baisser la pression concernant l’implication au travail.
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