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COP28 : L’encadrement des énergies fossiles au cœur des enjeux

Posté le 5 décembre 2023
par Matthieu Combe
dans Énergie

Encadrer l’usage des énergies fossiles constitue l’un des défis clés de la COP28. L’accord final mentionnera-t-il la réduction ou la sortie des énergies fossiles ? Ou simplement la réduction des émissions de gaz à effet de serre ? Les négociateurs sont à l’œuvre pour se mettre d’accord.

La COP28 qui s’est ouverte à Dubaï le 30 novembre est celle de tous les enjeux pour combattre la crise climatique. Au cœur des négociations qui devraient durer jusqu’au 12 décembre se joue l’encadrement de la production des énergies fossiles. En ouverture de la COP28, le Sultan Ahmed Al Jabeb, président de l’événement, a invité les participants à « s’assurer de l’inclusion du rôle des énergies fossiles » dans le Bilan mondial de l’Accord de Paris. Reste à savoir quels mots seront utilisés.

L’AIE appelle à la fin des énergies fossiles sans CSC

Dans sa feuille de route « Net Zero » visant à maintenir l’objectif de 1,5°C à notre portée, publié en septembre 2023, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) mise sur le développement de dispositifs de captage et de stockage de CO2 (CSC). En particulier, l’agence prédit une chute de 40 % d’ici 2030 de la production énergétique issue des combustibles fossiles sans CSC. Et d’ici 2050, il n’y aura presque plus aucune centrale sans un tel dispositif. La production mondiale d’électricité sans CSC à base de charbon et gaz passerait ainsi de 17 636 TWh en 2022 à 11 066 TWh en 2030 et 158 TWh en 2050.

La demande en combustibles fossiles baisserait ainsi de 25 % d’ici 2030, et de 80 % d’ici 2050. Pour concrétiser ce scénario, l’AIE l’assure : « Aucun nouveau projet pétrolier et gazier en amont à long terme n’est nécessaire. Les nouvelles mines de charbon, les extensions de mines ou les nouvelles centrales à charbon sans CSC ne le sont pas non plus ». Seuls des investissements dans certains actifs pétroliers et gaziers existants et dans des projets déjà approuvés devraient se poursuivre. Pour concrétiser cette vision, l’AIE invite à tripler les capacités en énergie renouvelable d’ici 2030, et à doubler le rythme annuel d’efficacité énergétique. Il s’agira aussi d’augmenter fortement les ventes de véhicules électriques et de pompes à chaleur et diminuer les émissions de méthane du secteur énergétique de 75 %. En plus, l’AIE estime que « le CSC, l’hydrogène et les carburants à base d’hydrogène, les bioénergies durables sont critiques pour atteindre le zéro émission ».

Réduire, sortir des énergies fossiles ? Atténuer les émissions ?

Toute la question sera de savoir quelle place sera donnée aux technologies de CSC dans le Bilan mondial de l’Accord de Paris. Pour cela, le choix des mots retenus sera important. Les négociateurs inscriront-ils le terme de « phase down » (réduction) ou de « phase out » (sortie) des combustibles fossiles ? Utiliseront-ils le terme d’« unabated fossil fuels », désignant les énergies fossiles sans dispositif de CSC, ou préféreront-ils parler de tous les combustibles fossiles ? La mention ou non d’une échéance, plus ou moins lointaine, déterminera également l’ambition du texte.

Vendredi 1er décembre, António Guterres, le secrétaire général de l’ONU, a clairement invité les délégués présents à inscrire la sortie des énergies fossiles dans le texte. « La science est claire : la limite de 1,5 °C n’est possible que si nous arrêtons finalement de brûler tous les combustibles fossiles. Ni réduire, ni diminuer. Suppression progressive, avec un calendrier clair ».

Le secrétaire espère ainsi que l’Accord final ne repose pas largement sur le CSC pour atténuer les émissions, dans tous les domaines. La position européenne adoptée en Conseil de l’environnement est de ne pas faire de pari à trop large échelle sur les technologies de CSC. Celles-ci devraient rester cantonnées aux secteurs difficilement électrifiables, comme l’industrie lourde. L’Europe recommande d’éviter un déploiement massif dans le secteur électrique, où les énergies renouvelables permettent de faire une transition énergétique compétitive. Au contraire, les Émirats arabes unis et les autres pays producteurs de pétrole devraient pousser au développement de ces technologies.


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