« L’élan politique lancé à la COP21, contrairement à beaucoup d’attentes, se poursuit bien », estime David Levai, chercheur en coopération internationale sur le climat à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Grâce à une ratification rapide, l’Accord de Paris est entré en vigueur le 4 novembre dernier, soit 11 mois après sa signature. A titre de comparaison, le protocole de Kyoto était entré en vigueur huit ans après sa signature ! Cela permet d’aborder cette nouvelle édition avec une bonne dynamique.
La COP22 se veut être une COP de l’action et de la mise en oeuvre de l’Accord de Paris. Car les négociateurs ont encore du pain sur la planche. La COP22 s’attachera à avancer sur les questions d’adaptation, priorité des pays du Sud, confrontés de plein fouet aux conséquences du changement climatique.« Il reste des enjeux techniques avancés, soutient David Levai. Trois sujets clés sont au coeur des préoccupations marocaines et de l’ensemble des pays en développement : l’adaptation, les finances et le renforcement des capacités de formation et d’éducation ». Il faudra en effet assurer un transfert de compétences pour former les pays en développement au reporting environnemental, au calcul des niveaux d’émissions et à la prise en compte de l’environnement dans les politiques publiques (énergies renouvelables, transports, habitats, agriculture…).
Transformer les INDC
En amont de la COP21, les pays avaient transmis des contributions nationales d’engagement de réduction de gaz à effet de serre (INDC, selon le sigle en anglais). Pour le moment, il s’agit simplement d’objectifs, sans mesures concrètes pour les atteindre. « Par rapport aux engagements pris, il va falloir voir quelles sont les politiques publiques et les incitations que les pays doivent mettre en oeuvre, explique David Levai. Concrètement, quels sont les efforts qu’un pays donné doit mettre en place sur son secteur énergétique, sur son offre de transport, sur son agriculture… pour atteindre ses engagements ? ». Il s’agira aussi de définir les règles de transparence pour répondre à ces questions : comment les pays rapporteront-ils leurs émissions, comment pourra-t-on les vérifier et à quelle fréquence ? Quels instruments de coopération internationale mettre en place?
Il est par ailleurs nécessaire de clarifier la manière dont les pays doivent améliorer leurs contributions pour parvenir à l’objectif défini dans l’Accord. Car tous les 5 ans, les pays devront soumettre une nouvelle contribution nationale, la somme des engagements actuels mettant la planète sur un trajectoire de +3°C en 2100, contre un objectif de 2°C, voire 1,5°C selon l’accord de Paris. Suite à l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris, la première réunion des parties à l’accord de Paris (la CMA) sera convoquée le 15 novembre à la COP22. Une soixantaine de chefs d’Etat et de Gouvernement, dont François Hollande, et plus de soixante-dix ministres chefs de délégation y sont attendus. Comme proposé par Patricia Espinosa, Secrétaire exécutive de la CCNUC, il y sera question que les règles de transparence soient définies au plus tard en 2018, pour qu’elles puissent être prises en compte pour la première révision des INDC prévue en 2018.
Financements et Agenda des solutions
A Copenhague en 2009, les pays développés se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020. L’objectif : financer l’atténuation et l’adaptation au changement climatique dans les pays en développement. Mais les pays tardent à définir une feuille de route précise. Selon un rapport de l’OCDE paru en octobre, 67 milliards seraient assurés par les financements publics en 2020. Par effet de levier, l’OCDE estime que, grâce aux financements privés, le montant total pourrait atteindre entre 77 et 133 milliards de dollars en 2020. A la fin de la COP22, une feuille de route claire devra avoir été adoptée.
A l’occasion de la COP21, l’Agenda des solutions a connu un fort engouement. Il regroupe l’ensemble des actions et engagements des acteurs non étatiques – villes, régions, entreprises, investisseurs, organisations de la société civile – pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre et favoriser l’adaptation. Environ 12 000 engagements et 77 initiatives collaboratives ont été pris. Citons par exemple l’alliance solaire internationale, l’initiative africaine pour les énergies renouvelables, la coalition pour le prix du carbone, la coalition pour les transports propres, l’alliance mondiale pour la géothermie… Pour dresser un bilan de ces initiatives, un dispositif de suivi devrait être proposé à la COP22.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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