Dieu merci, l’invention du stabilisateur d’image a permis de créer des appareils photos numériques garantissant l’obtention d’images proches de la perfection et de manière spontanée.
Mais nous possédons également notre propre stabilisateur, qui se trouve… dans notre œil, et nous permet de ne pas tout voir flou !
Composé de cellules nerveuses appelées axones minces, reliant l’œil au cerveau, il permet à l’œil de stabiliser l’image en déclenchant des mouvements oculaires minuscules qui stabilisent notre champ de vision.
Deux études complémentaires publiées le 7 mai 2015 dans la revue américaine Neuron (USA) se sont concentrées sur l’étude des cellules nerveuses qui corrigent les mouvements lents dans des directions spécifiques : un axe de recherche s’est donc porté sur la direction horizontale et l’autre sur la direction verticale.
Chaque fois que vous marchez, les images qui constituent votre champ de vision se meuvent à travers l’œil, selon Andrew Huberman, professeur adjoint de neurosciences à l’Université de Californie, San Diego et co-auteur de deux études sur le sujet. Contrairement aux images floues qui résultent de la prise d’images via les smartphones, votre cerveau réagit en déplaçant l’œil pour compenser ce glissement visuel, explique-t-il.
« Il s’agit d’un mouvement d’œil correctif : vous avancez, votre œil fait des micros mouvements de recul. Ces ajustements perpétuels et très rapides vous permettent de fixer un objet au loin pendant que vous avancez vers lui. »
Une correction quasi-simultanée
Le cerveau génère le mouvement des yeux après la détection de la lumière. Les ondes lumineuses se fraient un chemin dans l’air, rebondissent sur des objets et ricochent directement dans nos globes oculaires. Finalement, ils frappent une fine membrane à l’arrière de l’œil, la rétine. La rétine est composée de millions de cellules appelées photorécepteurs qui convertissent la lumière en messages électriques.
Les cellules nerveuses spéciales, appelées cellules ganglionnaires de la rétine (CGR), délivrent les messages à partir de la rétine, le long de longs axones minces, en direction des centres visuels du cerveau. Chez l’homme, des millions de ces axones sont emmitouflés au niveau du nerf optique. Ils bifurquent ensuite vers leur destination finale, les neurones.
Le cerveau interprète ces impulsions électriques comme une image et Eureka ! Nous pouvons voir.
« Différentes catégories de CGR sont accordées à des fonctions spécifiques d’un type particulier de composant d’image, comme la couleur ou le mouvement. Les chercheurs ont étudié une petite catégorie de détection de mouvements CGR qui aide nos yeux à compenser les mouvements lents dans les directions verticale et horizontale », comme le rappelle Alex Kolodkin, professeur de neurosciences et auteur principal de l’une des deux études. « Si par exemple vous faites un tour de grande roue, le champ visuel se déplace de haut en bas et votre cerveau opère essentiellement des corrections verticales.
Les scientifiques ont compris où les axones RGC se connectent dans le cerveau, mais pour l’instant nous savons très peu de choses sur la façon dont les axones s’y prennent pour cibler ces zones précises au cours du développement embryonnaire », précise Kolodkin.
Pour tenter de comprendre cela, les chercheurs ont testé leur hypothèse à l’aide de souris modifiées avec des gènes dont la particularité est d’entrainer un rayonnement des matériaux marqués, ceci afin de suivre des protéines colorées (en vert) sur les CGR verticale et horizontale. Cela a permis aux chercheurs de retracer le cheminement des neurones à travers le cerveau, a déclaré David Feldheim, qui ne participait pas directement à l’étude proprement dite.
Des protéines responsables du guidage des CGR
Les chercheurs ont ainsi pu identifier le type de protéine qui guide les CGR à un emplacement exact du cerveau.
En développant une lignée de souris déficientes pour ces protéines spécifiques, les chercheurs ont pu tester les capacités des sujets à opérer les corrections visuelles classiques. En traquant les mouvements des yeux des souris alors qu’elles regardaient des lignes bouger verticalement, les chercheurs ont compris que les yeux des rongeurs étaient incapables de faire les ajustements nécessaires. L’équipe du professeur Huberman fit la même série de tests avec et sans les protéines spécifiques permettant les corrections horizontales et obtint les mêmes résultats.
Il s’agit de la première étude qui décrit les molécules responsables du guidage des axones de la rétine à travers le labyrinthe des neurones jusqu’à leur emplacement exact dans le cerveau, dit Feldheim.
Les scientifiques espèrent que leurs résultats aideront le traitement des troubles oculaires résultant de cellules nerveuses « mal câblées ».
« Vous pouvez imaginer un scénario dans lequel quelqu’un a un système visuel endommagé et devient aveugle petit à petit », témoigne Huberman. « La thérapie génique pourrait alors permettre d’activer le gêne spécifique pour « recâbler » la zone affectée et stimuler la production et la croissance de CGR vers la zone correcte du cerveau ».
Traduit par S.Luc
Source : insidescience
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