Il y a quelques jours, SpaceX effectuait avec succès son premier lancement de l’année. Il s’agissait de mettre en orbite 60 nanosatellites destinés à s’ajouter aux 120 déjà déployés. Ce sont donc désormais 180 nanosatellites qui orbitent pour tisser le réseau Starlink, qui doit permettre un accès à internet dans chaque recoin du monde. A termes ce sont des milliers de satellites – au moins 12 000 – qui permettront à l’entreprise d’Elon Musk d’atteindre ce but. D’ici là, Starlink devra trouver des clients susceptibles d’être intéressés par les offres de services déjà disponibles. On en saura plus dans le courant de l’année 2020, après le 24 ème lancement, à partir duquel Starlink devrait offrir une couverture mondiale d’internet.
Cet exemple illustre ce qui fait réellement la spécificité des nanosatellites : leur taille. Et leur coût, par ruissellement, si on peut dire. Il n’est pas question de concurrence avec les satellites de plus grande taille, car ces derniers offrent des informations – images, données – avec une précision incroyable. Et qui dit précision incroyable dit équipements volumineux. Pour ces usages là – par exemple l’imagerie de précision par satellite – la taille des équipements exclut de fait les nanosatellites.
Par contre, pour couvrir un réseau et proposer des passages de satellites les plus fréquents possible, une constellation de petits satellites sera plus performante qu’un gros satellite. Et moins chère. Et plus facile à améliorer au fur et à mesure des retours d’expériences réalisés lors des lancers précédents. Bref, les projets de constellations de nanosatellites ont cet avantage : ils peuvent être très évolutifs dans le temps, et la facilité croissante pour lancer des grappes de satellites leur permet aussi d’être réactifs dans les réajustements. Pour ainsi dire, ces projets ont une capacité forte à adresser toujours plus précisément une demande client dans le temps.
Localisation, suivi, temps réel… des applications nombreuses et variées
L’autre aspect remarquable des nanosatellites est leur démocratisation dans le secteur du spatial. Aujourd’hui, la plupart des nanosatellites sont constitués d’éléments produits par des fabricants très spécialisés : moteur, antenne, objectifs, charge utile… c’est une particularité du secteur. Quand le phénomène de miniaturisation a impacté les satellites, on a mis en place le standard cubsat, dont l’unité est un cube de 10 cm d’arête. Un nanosatellite peut être constitué d’un ou de plusieurs cubesats. Cette standardisation a spécifié le rayon d’action des nanosatellites, en termes de matériels embarqués en tout cas. Cela a également permis aux fabricants de s’orienter vers la production de matériels adaptés et de s’ouvrir les portes de nouveaux marchés potentiels à l’étranger.
Comme on le voit, un écosystème s’est mis en place autour de la production à bas coûts de nanosatellites. La notion de constellation est toujours un facteur démultiplicatif, puisqu’il permet d’envisager un rayon d’action et une performance à grande échelle.
Mais la baisse des coûts de production et de lancement de nanosatellites aux performances limitées mais dédiées, ouvre un champ d’application sans précédent. C’est là le second avantage des nanosatellites. Le business model développé autour de leur usage autorise aussi bien le développement d’applications à grande échelle – via les constellations – que d’applications (ou des tests scientifiques) hyper spécifiques.
La France n’est pas en reste et va dans les prochaines années remplacer son système Argos actuel par une constellation de satellites, Kinéis. Pour l’instant, un premier nanosatellite a été lancé; le retour d’expérience réalisé sur Angels orientera la suite du programme, dont la finalité est de placer 20 satellites en orbite. Là où Argos est un système de localisation, Kinéis se voit aussi comme un outil destiné au marché de l’IoT, qui devrait être très demandeur dans les prochaines années.
Ainsi, c’est la combinaison entre des coûts de production qui baissent, et une quantité d’usages potentiels faramineuse, qui ouvre des marchés à de nouveaux acteurs hyper spécialisés.
Par P.T
Cet article se trouve dans le dossier :
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