La porte-parole de la SFEN, Isabelle Jouette, a affirmé sur France-Inter : « aujourd’hui en Allemagne comment ça se passe, vous n’avez plus de nucléaire, donc on a remis en route les centrales à charbon, avec du lignite, merci ! ». Est-ce exact ?
C’est une très curieuse intervention d’Isabelle Jouette à laquelle ont assisté les auditeurs du « téléphone sonne » le 10 mars 2016, émission animée par Nicolas Demorand sur France-Inter. A la 33ème minute de l’émission on peut en effet entendre la porte-parole de la SFEN, Société Française de l’Electricité Nucléaire (association Loi 1901), dénoncer la politique allemande, mais avec un argumentaire erroné.
Un EPR de 1650 MW, dans l’hypothèse d’un facteur de capacité de 90%, produit chaque année 13 TWh. Selon les données AGEB (AG Energiebilanzen e.V.) entre 2003 et 2015 la production d’électricité à base de charbon à chuté de 28,5 TWh en Allemagne. Dont 9 TWh entre 2013 et 2015, c’est-à-dire ces deux dernières années. 28,5 TWh, c’est l’équivalent de la production électrique de deux EPR. Ce n’est donc pas du tout négligeable.
Le nucléaire a-t-il si peu d’avantages objectifs pour qu’il faille chercher à salir les renouvelables en les associant au charbon ? Isabelle Jouette était également à l’antenne de France 5 le 7 mars 2016.
La baisse de la production d’électricité à base de lignite en Allemagne entre 2003 et 2015 est en revanche beaucoup plus modeste : -3,2 TWh, soit environ la production annuelle d’un quart d’EPR. Avec des fluctuations durant ces 12 années, à la baisse, puis à la hausse (2010-2013), puis de nouveau à la baisse. Bien sûr c’est la tendance de fond à l’échelle décennale qui est pertinente. Ne focaliser uniquement que sur la période 2010-2013 ne serait pas intellectuellement honnête. La chute de l’électricité à base de gaz naturel (- 5,9 TWh) correspond de son côté à environ la production annuelle d’un demi-EPR.
Non seulement l’Allemagne est parvenue à éliminer l’équivalent de presque 3 EPR de production électrique à base de combustibles fossiles, mais elle a en plus diminué massivement sa production nucléaire : -73,6 TWh, l’équivalent de 5 EPR et demi !
Isabelle Jouette affirme qu’en Allemagne, « il n’y a plus de nucléaire ». C’est de nouveau factuellement faux : en 2015 les réacteurs nucléaires allemands ont délivré 92 TWh d’électricité, l’équivalent de la production de 7 EPR. Les réacteurs nucléaires correspondants seront fermés dès 2022, car l’Allemagne a une politique énergétique très claire. Et ce sont les énergies renouvelables, en premier lieu le solaire PV et l’éolien terrestre, qui prendront le relais.
L’équivalent d’un EPR 100% EnR installé chaque année
L’Allemagne a augmenté depuis 2003 sa production EnR de 148,5 TWh ! C’est équivalent à la production de 11 EPR et demi ! L’équivalent, en volume de production électrique, d’un EPR 100% renouvelable a été installé en Allemagne chaque année pendant 12 ans. La construction d’un véritable EPR prend au contraire de très nombreuses années, comme en témoignent les chantiers en France (Flamanville) et en Finlande.
En 2015 pas moins de 32,5% de l’électricité allemande a été d’origine renouvelable, contre 27,3% en 2014. Ce qui est remarquable dans ce pays où le potentiel hydroélectrique est bien plus faible qu’en France. Comme le souligne le magazine ConsoGlobe, « l’Allemagne bat des records pour les énergies renouvelables, la France l’ignore ».
Ségolène Royal est-elle solaro-sceptique ?
Ségolène Royal a affirmé sur TF1 le 7 mars 2016 que « dans les 5 ans qui viennent il y a aura 10 réacteurs qui vont arriver à échéance de ces 40 ans. Est-ce qu’on peut remplacer 10 réacteurs uniquement par des énergies renouvelables, la réponse est non. Il faut faire preuve de bon sens ».
En réalité ce sont 21 réacteurs totalisant 18,9 GW qui auront atteint leur limite d’âge de 40 ans dans les 5 ans qui viennent (2021) : Fessenheim 1 & 2, Buguey 2, 3, 4 & 5, Tricastin 1, 2, 3 et 4, Gravelines 1, 2 , 3 & 4, Dampierre 1, 2, 3 et 4, Saint-Laurent B 1 & 2, Blayais 1. Tous d’une puissance de 0,9 GW pièce.
Selon RTE (2014) le facteur de charge du parc nucléaire français est de 75%. 18,9 GW correspondent ainsi à environ 124 TWh, soit exactement les 25 points nécessaires pour faire passer la part du nucléaire de 75 à 50% dans le mix électrique français (500 TWh/an).
En partageant l’effort pour moitié entre l’éolien et le solaire PV, cela correspond à la production annuelle d’un parc solaire PV de 55 GW, ceci dans l’hypothèse d’un facteur de capacité de 13%, soit celui de la centrale solaire de Cestas. 55 GW correspondent à 183 centrales de Cestas (300 MW), soit une moyenne d’1,8 centrale par département. Une partie peut être réalisée en toiture de supermarchés, d’usines et de maisons. Une centrale solaire au sol de 300 MW par département, est-ce inacceptable ?
Installer 55 GW de solaire PV en 5 ans correspond à 11 GW par an. Est-ce techniquement impossible ? L’Allemagne a installé 7,4 GW de solaire PV durant l’année 2010, auxquels se sont ajoutés 7,5 GW en 2011 et 7,6 GW en 2012. La Chine a installé 18,5 GW de solaire durant la seule année 2015. La France, pays organisateur de la COP21, n’a installé que 0,9 GW de solaire PV en 2015. La France est-elle condamnée à faire 20 fois moins bien que la Chine ?
Démocratie énergétique
Le « bon sens » dont parle Ségolène Royal ne repose donc pas sur une base solide en matière de potentialités EnR. Et, peut-être pire, ce « bon sens » est en déphasage complet avec la promesse qu’a fait François Hollande à ses électeurs pour pouvoir accéder à la présidence de la République en 2012. Il se pose un très sérieux problème de déontologie politique.
Durant l’entretien sur TF1 Ségolène Royal a proposé de transformer le site de Fessenheim en usine Tesla. Pourquoi pas. Mais où en est le projet d’ « Airbus du solaire » dont François Hollande parlait il y a quelques années ? SolarCity est en train de terminer la construction dans l’état de New-York d’une giga-usine de panneaux solaires qui aura un débit de 1 GW de capteurs solaires chaque année.
C’est uniquement en investissant dans de telles usines que la France pourra baisser les coûts et ainsi tenter de rattraper son retard massif de compétitivité sur l’Asie dans ce domaine clé.
Aux USA, ils agissent.
Olivier Daniélo
Sur l’incident de Fessenheim du 9 avril 2014, je voudrais apporter une correction importante. Il n’y a pas eu d’injection de bore comme cela a été dit par les journaux. Les opérateurs ont arrêté le réacteur conformément aux procédures. Il suffit pour le vérifier de consulter le site de l’ASN.
Je voudrais aussi dire un mot sur les lignes à courant continu en projet en Allemagne pour relier le Nord ouest, les éoliennes et le sud est.
Contrairement à ce que l’on connaît sur le réseau maillé THT alternatif, ces lignes à courant continu ne participent pas au réseau maillé.
Il est dit aussi qu’il faut renforcer toutes les interconnexions de la France avec les pays voisins (Rapport de Monsieur Derdevet au Président de la République). Si on consulte régulièrement le portail clients du site RTE à la rubrique capacités d’interconnexion -flux physiques transitant sur les interconnexions, on peut voir que seules l’interconnexion avec la GB et l’Italie sont saturées.
Si l’on examine la situation à 19 h 00 le 8 juin, les flux physiques transités vers tous les pays voisins étaient très importants en raison d’un anticyclone qui a fait considérablement baisser la production éolienne. Preuve s’il en fallait qu’il n’y a pas de foisonnement. l’Europe vit sous un régime de vent d’ouest, ce qui est bien connu.
Bonsoir Monsieur Fluchère,
RIFKIN – Mon article n’est pas inspiré des réflexions de ce prospectiviste américain, mais de la littérature scientifique mondiale sur les EnR, notamment du MIT (http://mitei.mit.edu/futureofsolar ) et de Stanford (http://web.stanford.edu/group/efmh/jacobson/Articles/I/WWS-50-USState-plans.html ), mais aussi cet excellent rapport (http://www.fondation-nicolas-hulot.org/sites/default/files/publications/151112_ela5_solaire_photovoltaique.pdf) de la Fondation Nicolas Hulot réalisé par Nicolas Ott, ingénieur des MInes.
BIODIVERSITE & PV – Royaume-Uni : Study finds positive link between UK solar farms and biodiversity – http://www.pv-magazine.com/news/details/beitrag/study-finds-positive-link-between-uk-solar-farms-and-biodiversity_100024351/
Engie : « Des associations ont fait des études sur nos parcs solaires et se sont rendu compte qu’en fait ce sont des foyers de biodiversité tout à fait incroyables. » http://bfmbusiness.bfmtv.com/mediaplayer/video/un-monde-en-mouvement-solairedirect-le-specialiste-de-l-energie-solaire-2102-760476.html
D’accord avec vous : le potentiel du solaire PV au niveau des parkings (ombrières) et toitures est colossal.
MIX ELECTRIQUE – 80% de renouvelables ne poseront aucun problème au réseau électrique allemand
http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/80-de-renouvelables-ne-poseront-aucun-probleme-au-reseau-electrique-allemand-34454/
MARCHE de L’ELECTRICITE : je suis d’accord, il y a un problème, les tarifs d’achat ont perturbé le marché. Comme l’a souligné Isabelle Kocher ingénieur des Mines : « Oui, j’y crois (à un mix électrique 100% EnR en France, 2050 ndlr), à condition de mettre en place un écosystème qui le permette. Il ne faut pas que les renouvelables créent une volatilité insupportable sur les prix et des problèmes d’intermittence. Cela demande de développer des solutions de stockage. Si le stockage suit des courbes d’évolution technologique et de réduction des coûts aussi rapides que celle du photovoltaïque, il sera prochainement compétitif à toutes les échelles. En ajoutant des outils de gaz renouvelable, le scénario 100 % renouvelable est peut-être crédible à l’horizon 2050. ».
Subventionner (parfois maladroitement et abusivement, c’est vrai) le solaire PV et l’éolien a permis de faire baisser les coûts, et à présent c’est le monde entier qui bénéficie de ces technologies devenues bon marché. Les dernières statistiques mondiales de BP sur l’énergie viennent d’être publiées : « Solar Is the Fastest-Growing Energy, Says Top Fossil Fuel Major »
https://www.bloomberg.com/news/articles/2016-06-08/solar-is-the-fastest-growing-energy-says-top-fossil-fuel-major
AUTONOMIE – « Mon maître, Marcel Boiteux, dit toujours que l’on compare les planches et le fauteuil Louis XV qu’elles ont servi à fabriquer. » Pour ma part, même si j’apprécie de nombreux intellectuels, universitaires, chefs d’entreprise et politiques, je n’ai de maître autre que moi-même 😉
Réponse à Monsieur Danielo.
Vous finissez votre réponse par la phrase suivante « Nucléaire, charbon, renouvelable : il n’y a pas de solution miracle. Mais nous avons besoin d’un débat objectif.
Sur ce point, je suis entièrement d’accord avec vous.
J’ai réagi à votre présentation parce qu’elle faisait l’apologie des ENR intermittentes en reprenant les théories fumeuses de Rifkin qui applique aux renouvelables intermittentes les mêmes progrès que ceux qui oint été fait en informatique et transmission de données.
Et il se trompe lamentablement et il nous trompe. Augmenter les capacités de transit d’une paire de cuivre téléphonique pour avoir l’ADSL, n’a été possible que parce que les données se stockent et se déstockent en suivant les principes des séries de Fourrier.
Partir d’un signal analogique, le discrétiser en signal numérique, et envoyer des paquets de données qui vont être remises en forme à l’arrivée est le principe des signaux numériques actuels.
Le tout voyageant à la vitesse de la lumière, le spectateur de télé ou l’auditeur de radio et de téléphonie, ne s’aperçoivent absolument pas de cette opération.
L’autre principe de Rifkin est que les éoliennes et les installations PV vont obéir à la loi de More, c’est-à-dire qu’on va voir leur prix être divisé par 2 tous les 8 ans. Tout ceci est vrai en informatique mais pas du tout en appareil de production d’énergie électrique.
Là nous travaillons sur de la puissance et de l’énergie.
Vouloir comparer des ENR intermittentes produites quand il y a du vent et du soleil, qui ne participent en rien aux réglages élémentaires du système électrique, c’est-à-dire la fréquence et la tension, qui n’ont aucune puissance de court-circuit c’est-à-dire l’appel de puissance lors du démarrage d’un moteur, et des productions thermiques, nucléaires et hydro-électriques n’a pas de sens.
Mon maître, Marcel Boiteux, dit toujours que l’on compare les planches et le fauteuil Louis XV qu’elles ont servi à fabriquer.
Leur prix n’a absolument pas baissé pour l’éolien depuis plus de 15 ans. Malgré des fabrications en série et des augmentations de puissance unitaire. Donc elles ne répondent non seulement pas à la loi de More (Rifkin) mais elles ne répondent même pas au constat général fait sur tous les produits industriels. En outre compte tenu de leur facteur de charge, à énergie produite identique, elles immobilisent 12 fois plus de cuivre et quatre fois plus d’aluminium qu’un groupe turbo alternateur.
A noter que le Danemark qui vit en symbiose électrique avec l’hydro-électricité de la Norvège vient d’annuler 5 contrats d’éolien off-shore en raison de leurs coûts.
Les panneaux PV, en revanche, ont vu leur prix baisser considérablement en raison de la production en série et de la délocalisation en Chine de leur fabrication. Mais, autant ils sont acceptables sur les ombrières ou sur les toits des maisons, autant il faut proscrire les centrales au sol qui occupent des hectares de terrain et qui nuisent considérablement à la biodiversité.
Mais le pire est que les obligations d’achats à tarifs imposés atteignent des sommes vertigineuses payées par les consommateurs d’électricité qui voient le montant de leurs factures s’envoler alors que dans le même temps puisque cette énergie étant payé par ailleurs arrive à un coût nul sur le marché de gros qui s’effondre à moins de 30 €/MWh ?
Belle contradiction pour les consommateurs.
Mais surtout grand danger pour les opérateurs électriques qui alimentent le réseau à perte et qui ne sont plus en capacité d’investir pour renouveler le parc de production pilotable.
Résultat des retraits massifs de capacités de production et le black-out Européen qui se profile pour le premier hiver un peu rigoureux.
Et là, il ne faut pas compter sur les ENRF intermittentes pour faire du black start.
Vous pouvez ainsi voir, Monsieur Danielo, que les rentiers sont surtout du côté des promoteurs des ENR électriques intermittentes. Et surtout pas les fameux opérateurs « engoncés » suivant votre expression dans leur nucléaire.
Autre point et non des moindres, payer en France 9 milliards d’€ de surcoût au travers de la CSPE pour des énergies qui font à peine plus d’un Mtep d’énergies finales sur les 165 Mtep que nous consommons et qui ne nous font pas économiser un gramme de CO2 est un peu cher payé.
Le SER ferait mieux de développer le gisement de 25 Mtep d’énergies thermiques renouvelables dont il serait normal qu’il se préoccupe plutôt que pousser des cris d’orfraie chaque fois qu’il est question de toucher aux ENR intermittentes électriques. Il est vrai que ces dernières sont la poule aux œufs d’or et les premières ne leur permettraient pas de tels gains.
Jean Fluchère
Pour les non germanophones, voici la traduction de l’article du Tagesspiegel indiqué plus haut:
“80 percent renewables are not a problem
There is much more flexibility in the German power grid to cope with renewables development than currently needed, said Boris Schucht, CEO of transmission system operator 50Hertz in an interview with Tagesspiegel. “The idea that the integration of renewable energy immediately calls for more system flexibility [is] a myth. We have much more flexibility in the system than we need. […] it will last until 2030 or even 2040.” Schucht is confident that 50Hertz will be able to integrate 70 to 80 percent of renewables “without additional flexibility options” in the future. He said that the company had for the first time succeeded in February to use wind power as control power to balance out generation and consumption.
Read the interview in German here:
http://www.tagesspiegel.de/wirtschaft/energiewende-80-prozent-erneuerbare-sind-kein-problem/13688974.html
See the CLEW dossier The energy transition and Germany’s power grid and the CLEW factsheet
https://www.cleanenergywire.org/dossiers/energy-transition-and-germanys-power-grid
Set-up and challenges of Germany’s power grid.”
https://www.cleanenergywire.org/factsheets/set-and-challenges-germanys-power-grid
Par ailleurs, contrairement à ce que vous affirmez, le facteur de charge du parc électro-nucléaire français n’est pas de 80% mais de 75,2 % en 2015 (Puissance de 63,13 GW, production annuelle de 416,8 TWh en 2015). Valeur similaire à celle de 2014.
Références :
https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/finance/investisseurs-et-analystes/l-essentiel/production-nucleaire
Et:
http://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/parc-nucleaire-francais
La facteur de charge du part éolien français est donc trois fois inférieur à celui du parc électro-nucléaire, et non pas quatre fois.
A noter que le rendement énergétique d’une centrale nucléaire n’est que d’un tiers, ce qui est médiocre: environ les 2/3 de l’énergie contenue dans l’ uranium235 (une ressource épuisable – peak uranium – et intégralement importée de l’étranger) est perdue dans la nature (pollution thermique des eaux des rivières-fleuves et de l’air). Sur Techniques de l’ingénieur j’avais mis en avant le 12 avril 2016 une solution pour réduire ce lamentable gaspillage:
Au lieu de recourir au gaz de schiste, et si on se chauffait au nucléaire ?
http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/au-lieu-de-recourir-au-gaz-de-schiste-et-si-on-se-chauffait-au-nucleaire-1015/
Jean F. a écrit : « Comme beaucoup de Journalistes, Monsieur Danielo confond allègrement, puissance installée et énergie produite. »
Réponse : où avez-vous vu une telle confusion ? Merci de citer le (ou les) passage(s) qui selon vous s’inscriraient dans cette confusion et d’argumenter de manière précise.
Par ailleurs le facteur de charge moyen de l’éolien en France, selon RTE, n’est pas de 20% (ce que vous affirmez) mais de (2015) mais de 24,3 % (page 12 : http://www.rte-france.com/sites/default/files/panorama_des_energies_renouvelables_2015.pdf )
Pour le solaire PV, en 2015, il a été de 16,8% en région PACA (plus haut niveau national) et de 10,8% en Ile de France (plus bas niveau). Source : carte disponible page 41 du rapport susmentionné. Les « 1 000 h par an sur 8760 h » que vous mentionnez correspondent à 11,4%, or seule une région française (IDF) a un facteur de charge aussi bas. Même en région Nord-Pas-de-Calais Picardie il est supérieur (11,7%)
Par ailleurs l’intégration de 80% de renouvelables ne posera aucune problème au réseau électrique allemand selon Boris Schucht, CEO de 50Hertz, l’un des 4 plus importants opérateurs de réseaux électriques en Allemagne: http://m.tagesspiegel.de/wirtschaft/energiewende-80-prozent-erneuerbare-sind-kein-problem/13688974.html?utm_referrer=https%3A%2F%2Ft.co%2FO9vJftjkmp
L’Agence Internationale de l’Energie arrive à des conclusions similaires, nous en avions déjà parlé ici sur Techniques de l’ingénieur: http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/integrer-de-hauts-niveaux-de-solaire-et-deolien-nest-pas-un-probleme-aie-741/
Comme beaucoup de Journalistes, Monsieur Danielo confond allègrement, puissance installée et énergie produite. L’éolien a un facteur de charge de 20 % du temps équivalent pleine puissance. 1000 MW installé en éolien produit 4 fois moins d’électricité qu’une centrale au charbon, au lignite, au gaz ou une centrale nucléaire de même puissance installée.
Quant au photovoltaïque, son facteur de charge est de 1 000 h par an sur 8760 h et il ne produit que lorsqu’il y assez de luminosité. En outre, il produit 5 fois moins en hiver qu’en été. Donc une centrale de 1 000 MW électrique installée en photovoltaïque produit 7 fois moins d’énergie électrique qu’une centrale de 1 000 MW électrique au charbon, au gaz, au lignite ou qu’une centrale nucléaire.
De plus tous les systèmes de rémunération des ENR intermittentes sont des obligations d’achat à tarifs imposés par l’Etat et répercutés, en Allemagne, sur les consommateurs domestiques et assimilés sous la forme de la taxe EEG. Le consommateur domestique en Allemagne paie son électricité 2 fois plus cher qu’en France. En France, c’est la majeure partie de la CSPE qui aurait dû atteindre en 2016, 9 milliards d’€ soit l’équivalent de l’EPR!
En outre, il oublie de mentionner que les ENR intermittentes produisent quand la nature le leur permet, ce qui ne correspond pas forcément à la demande d’électricité. Il leur faut un soutien pilotable que ce soient des centrales thermiques, au lignite, au charbon ou au gaz. Ce soutien appelé aussi back-up est gratuit car assuré par les opérateurs pilotables. Donc les producteurs d’ENR intermittentes n’ont aucune responsabilité vis à vis de la consommation et des services réseaux , c’est à dire la fréquence et la tension. Ce ne sont pas des électriciens mais des rentiers.
En Allemagne, le nucléaire résiduel tourne en bas normalement jusqu’en 2022. Mais sa production totale commencera à baisser bien avant quand les recharges de combustibles ne se justifieront plus pour une production à 100 % jusqu’en 2022 car les taux d’enrichissement des dernières recharges feraient qu’ils rejetteraient du combustible à moitié usé. Donc cette production, s’ils vont jusqu’en 2022 doit commencer à baisser des 2019. Et peut-être avant car les électriciens allemands disent ne plus avoir les moyens financiers d’acheter des recharges de combustibles et par ailleurs, ils ont perdu beaucoup de personnel hautement qualifié qui n’a pas attendu que les centrales s’arrêtent pout retrouver de nouveaux emplois sans problème comte tenu de leur qualification. Ils ne peuvent pas recruter de jeunes car il n’y a plus de formation. Ils ne peuvent plus s’appuyer sur Siemens qui a été leur constructeur car ils ont fermé leur département nucléaire, il y a 3 ans. Un nucléaire sans futur est un nucléaire sans sûreté. Et Mme Barbara Hendrix, ministre fédérale de l’environnement qui se plaint de la présence de Fessenheim, de Cattenom, de Tihange en Belgique devrait se préoccuper de la sûreté des centrales restantes en Allemagne.
Que se passe-t-il quand on injecte un 9 avril 2014 du bore dans un réacteur nucléaire à Fessenheim ? Et bien on perd subitement 900 MW.
http://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/fessenheim-des-journalistes-allemands-accusent-la-france-de-dissimulation_1346417.html
Le scientifique Daniel Cohan (NASA Air Quality Applied Sciences Team): « No longer baseload: #Coal fell below gas capacity factor in 2015. Five months below 50%, trending down. http://linkis.com/www.eia.gov/electric/NR37s »
Source : https://twitter.com/cohan_ds/status/708637070277918721
Comme le souligne Mark Jacobson, directeur du Département énergie et atmosphère de l’Université Stanford, le concept de baseload est en réalité utilisé par les lobbyistes des énergies sales: https://twitter.com/mzjacobson/status/704936233726832640
Le site australien RenewEconomy, spécialisé en énergie vraiment durables, dans un article intitulé “Base load” power: a myth used to defend the fossil fuel industry » rapporte l’analyse du chairman de la très puissante Chine State Grid Corp. Pour lui le seul obstacle est le paysage mental de ceux dont les mentalités sont archaïques :
“(…) the chairman of State Grid Liu Zhenya reportedly said the “fundamental solution was to accelerate clean energy, with the aim of replacing coal and oil.” Gasp number one. And then to more stunned silence, he and State Grid’s R&D chief Huang Han dismissed coal’s claim to be an indispensable source of “base load” generation. As the network operator builds out its clean power sources, they noted, coal-fired generators could only serve as “reserve power” to supplement renewables. “The only hurdle to overcome is ‘mindset’,” Liu said. “There’s no technical challenge at all (…)”
http://reneweconomy.com.au/2016/base-load-power-a-myth-used-to-defend-the-fossil-fuel-industry-96007#st_refDomain=t.co&st_refQuery=/fvOSEUuush
Mark Diesendorf a publié le 10 mars 2016 un article richement documenté (références scientifiques) sur le même thème :
Dispelling the nuclear ‘baseload’ myth: nothing renewables can’t do better!
http://www.theecologist.org/News/news_analysis/2987376/dispelling_the_nuclear_baseload_myth_nothing_renewables_cant_do_better.html
Enfin il est absurde de considérer de manière isolée le solaire PV en France étant donné qu’éolien et solaire sont parfaitement complémentaires à l’échelle saisonnière (voir diapo 49 : http://cf01.erneuerbareenergien.schluetersche.de/files/smfiledata/5/4/1/3/9/6/13ElecFrance2015.pdf ). Le solaro-éolien + outils de flexibilité (dont stockage) peut bien entendu se substituer aux réacteurs nucléaires en France, et ceci n’importe quel mois de l’année. L’ADEME a d’ailleurs publié une très intéressante étude à ce sujet : http://www.territoires-energie-positive.fr/actualites/chassez-un-scenario-100-renouvelables-il-revient-au-galop
Comme vous l’appelez de vos souhaits, soyons en effet honnêtes, et reconnaissons enfin que le concept de baseload est obsolète. Il appartient au XXème siècle. Bienvenue en 2016.
Le débat sur le nucléaire souffre malheureusment d’une interprétation partiale des chiffres de la part des 2 parties. Je ne deffendrai pas l’intervention d’Isabelle Jouette mais le raisonnement mené ici souffre également de quelques approximations. J’en citerai 2 qui me semblent essentielles :
– Il est fait une équivalence, en termes de puissance installée, entre le nucléaire d’un coté et le photovoltaïque + éolien de l’autre en ne raisonnant que sur le facteur de charge qui constitue une moyenne annuelle. Or une différence fondamentale est que pour le nucléaire la période de production est maitrisée et planifiée. On peut avoir 200GW de photovoltaique installé, ils ne seront d’aucune utilité lors d’un pic de charge à 19h en hiver, or il faut bien produire à ce moment là ! On produira certes nos GWh en été à midi…quand la demande est faible (il n’y a malheureusmeent pas encore de solution miracle de stockage de l’électricité). Le problème est donc bien plus complexe.
Cette réflexion m’ammène à mon second point :
– Le graphique présenté dans l’article illustre très bien le problème de la non-maitrise de la production renouvelable associée à un facteur de charge faible : on remarque que la production totale allemande a significativement augmentée alors que la demande domestique reste stable (augmentation des exportations). C’est particulièrement visible à partir de 2011 (début de la fin du nucléaire en allemagne). Cette augmentation est correllée à l’augmentation du renouvelable. Pourquoi ? L’Allemagne augmente sa puissance installée en renouvellable pour compenser le faible facteur de charge. Les renouvelable contribuent autant que possible en période de demande (si le vent et le soleil sont de la partie) mais produisent beaucoup en période de faible demande (cf. été+midi pour le solaire). Cette surproduction est exportée à très bas prix (voire à prix négatif !) aux voisins de l’Allemagne => c’est le contribuable allemand qui en paie la facture.
Nucléaire, charbon, renouvelable : il n’y a pas de solution miracle. Mais nous avons besoin d’un débat objectif !
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