Le terme « gaz à effet de serre » fait immédiatement penser au CO2, ce gaz étant considéré comme responsable des deux tiers de l’effet de serre provoqué par l’homme. Mais, des gaz à effet de serre, il en existe bien d’autres.
En seconde position vient le méthane (CH4) émis principalement par l’élevage et les processus de fermentation. La troisième position revient au N2O, ou protoxyde d’azote, un composé directement lié à l’agriculture (engrais azotés et effluents d’élevage) et dont les émissions sont en hausse depuis 1980.
Enfin, cette grande famille comporte également d’autres gaz, tout aussi « dangereux », mais émis en plus faibles quantités, en particulier les gaz chlorés et fluorés (HCFC, HFC, CFC, etc.).
La bonne nouvelle : la disparition progressive des HCFC porte ses fruits
Les HCFC ont commencé à être utilisés dans les systèmes de réfrigération et de climatisation à partir des années 1970, en remplacement des CFC, suite à la découverte[1] de l’effet destructeur de ces derniers sur la couche d’ozone.
Cependant, si les HCFC ont moins d’impact sur la concentration d’ozone stratosphérique, ils ont un effet destructeur important. Le protocole de Montréal, signé en 1987, a ainsi acté l’élimination progressive de ces substances. Pour les pays développés, celle-ci a commencé en 1996, avec une élimination totale prévue en 2030. Pour les pays en voie de développement, cette échéance est prévue d’ici 2040.
De ce point de vue, le papier qui vient d’être publié dans la revue Nature Climate Change apporte un éclairage positif sur cette interdiction. En effet, le forçage radiatif des HCFC, c’est-à-dire leur contribution au réchauffement climatique, semble bien avoir amorcé sa diminution dès 2021, avec 5 ans d’avance par rapport aux prévisions !
S’il faut encore 40 ans pour que la couche d’ozone retrouve son niveau d’avant 1980, cela reste néanmoins un signal positif.
La mauvaise nouvelle : les émissions de N2O toujours en hausse
Selon une autre étude, conduite par 58 chercheurs internationaux et publiée dans Earth System Science Data, ce gaz à effet de serre 300 fois plus puissant que le CO2 serait responsable de 6,4 % du forçage radiatif, depuis l’ère préindustrielle.
Avec des milliers de mesures à l’appui, l’étude démontre surtout que les émissions de N2O liées aux activités humaines ont explosé depuis 1980 (+ 40 %), avec un record d’émission avoisinant les 40 millions de tonnes en 2020.
Ces chiffres sont d’autant plus problématiques qu’il faudrait faire l’inverse : diminuer les rejets d’au moins 20 % d’ici 2050 si nous voulons respecter les 1,5 °C de l’accord de Paris !
L’agriculture pointée du doigt : quelles actions mettre en place ?
Ce n’est pas une surprise, la principale source d’émission anthropique de protoxyde d’azote est l’agriculture et notamment l’utilisation massive de produits azotés : engrais chimiques, lisier, fumier.
Mais au-delà du simple constat, est-il possible de réduire les émissions agricoles de N2O et aussi de CH4, sans réduire la productivité ? Des pistes existent en tout cas : des propositions d’action ont d’ailleurs été formulées dès 2013, dans un rapport réalisé par l’INRA.
Les cinq propositions suivantes ont un impact direct sur les émissions de N2O :
- réduire la consommation d’engrais minéraux de synthèse et mieux valoriser les ressources organiques ;
- accroître la part de légumineuses en grande culture et dans les prairies temporaires ;
- introduire davantage de cultures intermédiaires, de cultures intercalaires et de bandes enherbées ;
- optimiser la gestion des prairies ;
- réduire les apports protéiques dans les rations animales pour limiter les teneurs en azote des effluents et les émissions de N2O.
Quels enseignements peut-on tirer de ces deux constats ?
D’après WWF, 99 % des substances qui détruisent l’ozone ont été éliminées, grâce à un engagement collectif et contraignant pour les États. Ce succès prouve donc qu’il est possible d’agir, mais aussi de gagner.
La lutte contre le changement climatique concerne l’ensemble des activités humaines et repose sur des actions qui doivent être mises en place au niveau mondial, pour être efficaces. La production agricole ne peut y échapper, surtout qu’elle est la première concernée par les effets du changement climatique.
[1] En 1974, par Rowland et Molina, deux chimistes de l’Université de Californie à Irvine. Ils ont reçu le prix Nobel de Chimie pour cela !
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