A l’origine des radiateurs-ordinateurs QH-1 et QC-1, l’entreprise francilienne Qarnot a dévoilé ce lundi 2 décembre sa chaudière numérique QB-1. Le principe, identique, consiste à utiliser la chaleur fatale dégagée par des serveurs informatiques, dont la puissance de calcul est mise à disposition au travers d’une fibre optique. Mais la finalité diffère : les calories ainsi récupérées ne servent pas à chauffer les logements cette fois, mais à leur fournir de l’eau chaude sanitaire à 60°C.
A destination des bailleurs sociaux ou des promoteurs immobiliers, cette chaudière atypique contient 24 cartes-mères et autant de processeurs AMD Ryzen 7 2700 à 3,2 GHz, lesquels constituent la source de chaleur. Des plaques de refroidissement transfèrent les calories à l’eau froide entrant dans la chaudière. A la sortie, le débit d’eau chaude est de 6 litres par minute et le rendement serait de 96%.
Ce système modulaire – deux unités au minimum pour une puissance combinée de 4 kW – fonctionne en complément d’une chaudière classique, capable d’assumer les pics de consommation, et d’un ballon d’eau chaude. Son apport énergétique sert alors à relever la température dans la boucle de retour de l’eau chaude sanitaire ou à maintenir la température du «talon» (ce qui correspond aux périodes creuses, comme la nuit).
Du logement à la piscine
Des initiatives similaires se sont fait jour ces dernières années. Dans le but de produire de l’eau chaude sanitaire, Dalkia a par exemple équipé en juillet 2018 le centre hospitalier régional de Metz-Thionville d’un système de refroidissement à eau pour récupérer la chaleur d’un datacenter hébergé dans l’établissement. Dès 2013, la société grenobloise Stimergy avait également mis au point une chaudière à base de serveurs informatiques, avec de l’huile comme fluide caloporteur et des échangeurs thermiques en lien avec un ballon d’eau chaude. Plusieurs installations fournissent de l’eau chaude sanitaire à des bâtiments résidentiels à Nantes, Lyon et Lille et couvrent de 20 à 60% des besoins en eau chaude des immeubles. A Paris, ce sont les bassins de la piscine de la Butte aux Cailles qui sont chauffés par ce biais.
Ces techniques de valorisation de chaleur fatale se développent dans les gros datacenters, dans l’objectif d’amoindrir leur impact écologique. L’idée de Qarnot et Stimergy consiste à les appliquer à l’échelle du micro-datacenter. Le modèle économique de Qarnot, en particulier, en dit long sur son activité, à la croisée des métiers de la thermodynamique et du numérique. Par l’intermédiaire d’un contrat de services, l’entreprise s’engage pendant 10, 15 voire 30 ans à prendre en charge tous les frais d’exploitation de la QB-1, incluant la maintenance, le renouvellement des processeurs et le remboursement de la facture d’électricité.
En contrepartie, elle s’apparente à un opérateur de micro-datacenters distribués qui vend de la puissance de calcul à des salles de marchés financiers (BNP Paribas, Société Générale, Natixis). Le client qui souhaite faire l’acquisition d’une chaudière QB-1 paie certes l’investissement initial, qui peut se chiffrer à plusieurs dizaines de milliers d’euros, mais rien de plus. Malgré le coût élevé du kilowatt produit, soit 7 €, l’équipement serait amorti au bout de six ans, d’après les estimations de Qarnot.
Le modèle paraît convaincant, puisque trois bailleurs sociaux ont déjà signé : Elogie-Siemp, Aiguillon et Ozanam. La filière du logement social s’intéresse en effet de près aux solutions technologiques réduisant les charges des locataires et valorisant leur patrimoine.
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