Fissure dans le réacteur 2
L’engagement militaire de la France en Afrique a éclipsé dans les médias français les suites de la catastrophe nucléaire japonaise, de même que le débat sur l’écologie et le futur du nucléaire. Samedi pourtant, une importante fissure d’une vingtaine de centimètres dans une fosse de maintenance en béton du réacteur 2 a été détectée, confirmant les hausses significatives de la radioactivité au large, et près du rivage de la centrale.
De cette fissure, se seraient échappés, jusque dans l’océan, des composants radioactifs ainsi que de l’eau contaminée, sans plus de précisions de la part des autorités japonaises ou de l’exploitant de la centrale, la Tokyo Electric Power Company (TEPCO). La TEPCO annonçait un taux de radioactivité près du rivage de 1000 mSv/h, et d’importants taux d’iode radioactifs (l’iode 131) détectés en mer. Précisons que l’iode radioactif a une demi-vie, à savoir la capacité à diminuer son activité de moitié, bien moins élevée que le césium radioactif.
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Pour enrayer les fuites radioactives et colmater les fissures, la TEPCO a tenté, en vain, de couler du béton dans le puits de la fosse, sans atteindre la fissure ni parvenir à la boucher. Les liquidateurs ont ensuite tenté de combler la brèche à l’aide de polymères absorbants formant un gel au contact de l’eau, combinés à de la sciure et à du papier journal, mais sans plus de succès. Du colorant blanc a été ajouté à l’eau contenue dans la centrale, pour mieux cibler la fuite de l’eau ayant servi à refroidir les réacteurs en catastrophe.
Que faire de cette eau ?
Cette eau, qui a permis de pallier, plus ou moins efficacement, la panne des systèmes de refroidissements des réacteurs, pose actuellement problème. Initialement salée, puis remplacée par de l’eau douce moins corrosive, cette eau s’est infiltrée partout, dans les cuves, jusque dans les galeries. Le degré de radioactivité de l’eau dépend de sa fonction (elle sera très radioactive si elle a servi à refroidir les barres de combustible). La TEPCO a commencé le rejet de 11 500 tonnes d’eau « faiblement radioactive » dans le Pacifique, c’est-à-dire plus de 100 fois supérieur à la normale, afin de vider progressivement des réservoirs qui serviront à recueillir de l’eau très fortement contaminée par des éléments radioactifs, et qui empêche les liquidateurs de travailler près des réacteurs. Ce rejet, qui doit s’étaler sur cinq jours, est supposé être sans grandes conséquences pour l’environnement, ce qui est sujet à caution.
C’est une plate-forme en acier de 136 mètres, située à proximité de la centrale, et disposant de réservoirs d’une capacité de 10 000 tonnes, qui pourrait servir à stocker une partie de l’eau « faiblement radioactive ». Elle sera installée dans les jours qui viennent, au mouillage de la centrale, indique le gouvernement japonais. Il est à signaler que cette situation pourrait prendre un certain écho en France, où le géant du nucléaire Areva déverserait de l’eau faiblement radioactive à l’aide d’une canalisation au large de La Hague selon Greenpeace, au mépris des règles internationales.
Colère à l’intérieur, embargo à l’étranger
À l’heure où la discrétion et la retenue toute japonaise ont fait place à l’inquiétude et la colère, la transparence et la capacité de la TEPCO à gérer cette crise sanitaire, énergétique et environnementale, semblent toujours faire défaut. Bien que la situation ne soit plus inquiétante pour deux des six réacteurs de la centrale, la situation dans les quatre autres réacteurs semble toujours très préoccupante.
En parallèle de l’aide internationale (la France a proposé d’envoyer des robots), un certain nombre de pays a annoncé le maintien et le durcissement de l’embargo sur les produits japonais, notamment le lait, les poissons et les légumes. Un embargo qui ne devrait pas faiblir avec l’annonce du rejet d’eau contaminée dans l’océan Pacifique.
Signe de désespoir, le Japon chercherait de nouveaux « liquidateurs » prêts à intervenir dans des zones sensibles et très contaminées…
M.R.
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