Le microscope optique et le microscope électronique à balayage sont les deux outils majeurs utilisés pour caractériser les microstructures des matériaux métalliques. Sauf qu’ils atteignent leurs limites en termes de résolution, lorsqu’il s’agit d’étudier les matériaux fabriqués par fabrication additive ou par soudage, ainsi que par tous les nouveaux procédés qui s’éloignent de la métallurgie traditionnelle et présentent des microstructures complexes. Il est alors possible de faire appel à l’EBSD (Electron backscatter diffraction), une technique d’analyse cristallographique, qui permet d’aller encore plus loin dans la caractérisation. Son utilisation est longtemps restée cantonnée au monde de la recherche académique, face à ses contraintes de mise en œuvre. Grâce aux dernières avancées technologiques, ce procédé est devenu plus accessible et le Cetim a décidé de le mettre à disposition des industriels.
« En moins de dix ans, l’EBSD a fait un bond en avant, analyse Mathilde Labonne, ingénieur d’études au Cetim. Auparavant, la lourde préparation de l’échantillon était rendue difficile par le travail sur des échantillons de petites dimensions, non enrobés, car il faut que l’état de surface du matériau soit presque parfait. Il fallait au minimum 4 à 5 heures pour réaliser une cartographie. Aujourd’hui, grâce aux progrès réalisés par les fabricants de caméras pour notamment maximiser la récupération du signal, les exigences de préparation des échantillons sont moins élevées, et il est même possible d’analyser des échantillons enrobés, ce qui n’était pas possible avant. Et grâce à de nombreuses améliorations, le temps d’acquisition pour réaliser des cartographies peut être inférieur à une heure. »
Chaque grain peut être étudié séparément
L’EBSD repose sur l’utilisation d’un microscope électronique muni d’une caméra équipée d’un écran phosphore. Le procédé consiste à faire percuter un faisceau d’électrons à la surface d’un matériau inclinée avec un angle très important (70 degrés) afin d’obtenir un phénomène de diffraction, à l’image de la diffraction de la lumière dans l’eau. Ce faisceau d’électrons est en partie réémis par la surface du matériau, après interaction avec les atomes, et permet d’obtenir une figure de diffraction, appelée figure de Kikuchi. Un logiciel calcule ensuite quelle est l’orientation cristalline du matériau à partir de cette figure afin de visualiser sa structure atomique, et cela en chaque point.
Il en résulte une cartographie où chaque grain est représenté par une couleur, ce qui permet de les étudier séparément, alors que cette analyse est très difficile à réaliser grâce aux microscopes traditionnels. Il est par exemple possible d’observer leur localisation, leur taille, ou comment les grains s’organisent entre eux. Des informations sur les contraintes résiduelles du matériau, via l’observation des désorientations locales, sont également visualisables dans le but, par exemple, de savoir à quel endroit précisément il pourrait se fissurer. Quant à la résolution, elle se révèle bien meilleure, puisqu’avec un microscope électronique à balayage standard, elle est limitée à la dizaine de micromètres, tandis qu’elle peut atteindre quelques dizaines de nanomètres avec l’ESBD.
« Obtenir des informations sur la taille des grains est une problématique à laquelle nous faisons face depuis longtemps, complète l’experte du Cetim. Ici, en une seule cartographie, toute la distribution est accessible. Cela signifie qu’en plus des matériaux possédant des microstructures complexes, cette technique est également pertinente pour un grand nombre de matériaux classiques. Avec l’EBSD, on peut également distinguer les différentes phases des alliages biphasés, comme le laiton, et ainsi connaître la proportion entre la phase alpha et bêta. Il est aussi possible de le faire avec les techniques habituelles de microscopie, mais il est très complexe d’obtenir un résultat satisfaisant et quantitatif. »
Aider les industriels à préparer leurs échantillons
Depuis la fin de l’année dernière, le Cetim propose aux industriels de caractériser leurs matériaux métalliques à l’aide de cette technique. Cette prestation est disponible sur une large gamme de matériaux, même ceux de faible dureté, comme le laiton. Même si la préparation de l’échantillon est plus facile à mettre en œuvre que dans le passé, elle nécessite malgré tout un savoir-faire en matière de qualité de surface du matériau à obtenir avant analyse. Ce centre technique souhaite notamment se spécialiser dans cette préparation pour rendre encore plus accessible l’EBSD.
« Cette technique d’analyse n’est pas très connue dans l’industrie et a encore la réputation d’être un moyen académique, déclare Mathilde Labonne. Notre ambition est de la démocratiser, car elle peut donner des informations plus rapidement, et avec des niveaux de détails meilleurs que ce obtenus avec les techniques traditionnelles. Nous ne doutons pas qu’elle réponde à un besoin, car c’est la meilleure connaissance de la matière que l’on puisse obtenir actuellement. »
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Dans les ressources documentaires
- Analyse EBSD - Principe et cartographies d’orientations
- Texture et anisotropie des matériaux polycristallins - Cartographie par diffraction de Kikuchi
- Imagerie par contraste de canalisation des électrons (ECCI) et défauts cristallins
- Analyse EBSD - Déformation et recristallisation des matériaux métalliques