C’est une étrange dynamique qui s’est installée au Brésil. Alors qu’un peu partout dans le monde, les gouvernements organisent des appels d’offres pour installer des parcs éoliens ou photovoltaïques notamment, le ministère brésilien lance des concours pour leur abandon.
557 MW en moins
Suite à cet appel d’offres historique, quelque 16 parcs éoliens (307,7 MW) et 9 fermes solaires (249,7 MW) ont été écartés de la liste des projets auparavant sélectionnés et disposant d’un droit à rémunération. De plus, les détenteurs desdits projets ne pourront pas participer aux deux prochains appels de réserve. Ironiquement, Brazilia a récupéré au passage 106 millions de Real (27,8 M€) de la part des participants. Pas moins de 1 462 acteurs ont participé à cet appel d’offres. Que des entreprises payent pour ne pas avoir à réaliser des projets peut sembler pour le moins surprenant. Mais la crise qui sévit au Brésil depuis 2014 a remis en cause les bases de la croissance de la première économie sud-américaine. Le pays a vécu la pire récession de son histoire (-3,8% du PIB en 2015 et -3,6% en 2016).
Demande d’énergie en baisse
L’initiative brésilienne répond à une problématique globale : la baisse de la demande d’énergie. Elle est passée de 305 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) à 298 Mtep en 2016, selon de BP Statistical Review. Or, à l’instar de ses voisins, le Brésil avait organisé des appels d’offres visant à ajouter des capacités éoliennes et solaires. La conjugaison des deux phénomènes a généré une situation de surcapacité qui met en danger la rentabilité du secteur, ce qui a poussé les autorités brésiliennes à organiser ce concours historique.
Le Brésil est plongé depuis 2014 dans une crise politique, institutionnelle, économique et énergétique. Le scandale de corruption Petrobras (la compagnie pétrolière nationale) a secoué toute la classe politique brésilienne, emportant Dilma Roussef destituée en 2016. La figure politique préférée des Brésiliens, Lula, est lui aussi inquiétée par des enquêtes. Entre-temps, les investisseurs ont gelé voire abandonné leurs projets, ce qui a accéléré le décrochage du pays, entamé par une surchauffe économique et une forte inflation. La crise énergétique était alors inévitable.
Privatisations
Pour sortir de l’impasse et attirer de nouveau les investisseurs, chinois notamment, le président brésilien Michel Temer, très contesté (5% d’opinions favorables), a lancé un grand plan de privatisations qui devrait inclure Electrobras, l’électricien national qui opère de nombreuses centrales hydroélectriques. Il espère en retirer 40 milliards de réais (10,7 milliards d’euros) d’ici fin 2018, pour combler en partie le déficit public estimé à 159 milliards de réais (42,5 Mds €).
Romain Chicheportiche
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