Nous avons demandé à Gorka Gonzalez Garcia, responsable Activité Retail chez Bpifrance, de nous en dire plus.
Le fonds Bpifrance Entreprises 32 est un Fonds Commun de Placement à Risques (FCPR) agréé par l’Autorité des Marchés Financiers.
Il est géré par la société de gestion Bpifrance Investissement et permet aux particuliers d’investir de manière indirecte dans 1 200 sociétés non cotées en bourse : PME, ETI et startups françaises et européennes. C’est un fonds au rendement non garanti, qui présente un risque de perte du capital investi.
Techniques de l’ingénieur : Quand on pense investissement, on pense généralement « fortune ». Investir dans l’économie réelle, est-ce vraiment accessible ?
Gorka Gonzalez Garcia : L’objectif de la loi industrie verte est clair : « faire de la France la première nation européenne de l’industrie verte ». Mais pour y arriver, elle devra mobiliser au moins 67 milliards d’euros d’ici 2030, c’est pourquoi la loi favorise désormais le fléchage des financements privés vers la transition écologique.
Depuis la loi PACTE de 2019 et encore plus depuis la loi industrie verte de 2024, le private equity (capital-investissement) prend donc une ampleur inédite en France, puisque la loi favorise désormais les actifs non cotés dans la gestion pilotée de l’assurance vie et des PER.
Il faut savoir qu’avant 2019, seuls les particuliers les plus fortunés pouvaient investir, à partir de 100 000 €. Cette époque est désormais révolue ! Le fonds BE3 en est la preuve, puisqu’il est possible d’investir à partir de 500 €.
Ce fonds BE3 a été lancé le 19 septembre. C’est un fonds ouvert à tous les Français qui ont envie d’investir, pour la première fois ou non, dans le capital-investissement. Nous sommes à la fois concepteur, producteur, distributeur et gestionnaire de ce fonds BE3. Par ailleurs, nous avons choisi le partenaire Tylia Invest pour assister les particuliers dans leur souscription en ligne et répondre à leurs éventuelles questions.
Bien entendu, nous ne sommes pas les seuls à proposer des fonds en private equity, mais ce fonds est assez original, de par son accessibilité et sa distribution ouverte et multicanale. Tout a été fait pour que la procédure soit simple et rapide, puisque nous avons créé une plateforme dédiée (fonds-entreprises.bpifrance.fr), qui permet d’investir en à peine 15 minutes, à partir de 500 €.
Pourquoi avoir créé ce nouveau fonds BE3 ? Répond-il à un besoin particulier ?
À l’origine nous avons lancé ce fonds pour deux raisons.
D’une part, le capital-investissement est une classe d’actifs intéressante qui a généré des rendements élevés durant les 15 dernières années. Jusqu’à présent, les particuliers n’y avaient pas accès, ce qui était injuste !
D’autre part, l’enjeu est de capter l’épargne des Français afin de financer l’économie réelle. Car Bpifrance est la banque des entrepreneurs : notre rôle est de soutenir l’économie française, que ce soit via du financement (crédits, subventions…) ou de l’investissement en capital dans les entreprises, ou bien en faisant de l’accompagnement et du conseil. Bpifrance garantit aussi les crédits des entreprises et les soutient dans leurs projets à l’export.
L’économie du pays a plus que jamais besoin de financements, pour investir dans sa transition écologique, pour innover, pour rester compétitive.
Il faut savoir que la totalité de l’épargne des Français avoisine les 6 000 milliards d’euros et que le taux d’épargne en France n’a jamais été aussi élevé, de l’ordre de 18 % à fin 20232. Il paraissait donc logique de développer des outils permettant de flécher une partie de cette épargne vers l’économie réelle.
Actuellement, Bpifrance a investi 54 milliards d’actifs principalement dans le non-coté. Mais il est indispensable de drainer davantage d’épargne vers nos PME, comme le mentionne récemment le rapport « Draghi » !
Nous cherchons donc des catalyseurs efficaces, simples et qui parlent aux Français.
De manière concrète, comment investir dans l’économie réelle avec ce fonds ?
Avec BE3, le particulier investit de manière directe dans un portefeuille de 76 fonds de capital-investissement, et de manière indirecte dans un panel de 1 200 sociétés non cotées, dont 25 % d’industries et environ 70 % d’entreprises françaises.
C’est une classe d’actifs à long terme, qui permet de financer les entreprises de manière concrète. Néanmoins il faut être patient, car le particulier ne peut pas décider quand récupérer son investissement. Par ailleurs, il faut aussi garder en tête que le rendement n’est pas garanti et qu’il y a un risque de perdre tout ou partie du capital investi.
Les Français sont-ils intéressés par ces fonds en capital-investissement ?
Ça parle de plus en plus au grand public. Tous les ans, nous sortons un baromètre du capital-investissement, en partenariat avec France Invest (l’association des professionnels du Capital-Investissement), mandaté à OpinionWay et réalisé auprès d’un panel de 2 000 Français qui détiennent un patrimoine financier de plus de 10 000 €, ce qui représente 70 % de la population.
Selon le baromètre 2024, le principal atout du private equity est son aspect concret, qui tranche avec le caractère abstrait d’autres investissements financiers.
Comment convaincre les Français d’investir dans l’économie réelle dans le climat de morosité actuel ?
Il faut arrêter de dire aux Français que ça ne va pas bien ! Nous entrons dans un cycle de pessimisme qui n’a pas lieu d’être. Or, l’optimisme est l’une de nos valeurs chez Bpifrance.
Et il suffit de regarder les chiffres : sommes-nous en récession ? Non ! Nous n’avons pas une croissance à deux chiffres, mais la France possède de nombreux atouts pour réussir.
Nous avons amorcé notre réindustrialisation il y a quelques années et certains secteurs industriels sont très dynamiques. Néanmoins, pour que cette industrie reste innovante, se développe et soit compétitive, il faudra y injecter du capital dans les prochaines années.
Par ailleurs, on parle d’investissements à long terme, sur dix ans environ, ce qui représente deux cycles économiques. Le particulier qui investit maintenant, alors que la conjoncture n’est pas très bonne, ne décidera pas quand sortir du fonds, c’est le gérant qui le fera. Et ce gérant est un professionnel, qui a tout intérêt à sortir ses fonds lorsque la période est la plus favorable. En dix ans il peut se passer beaucoup de choses !
C’est donc une philosophie d’investissement qui est beaucoup plus durable, car moins soumise aux effets moutonniers et à la volatilité des marchés cotés.
[1] Fonds Bpifrance Entreprises (BE3)
[2] Fédération Bancaire Française ; avril 2024
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