« La transition énergétique permettant notamment un approvisionnement en électricité sûr, abordable et pauvre en émissions de CO2 doit être mûrement réfléchie », introduit la note d’orientation stratégique du gouvernement belge. Le pays abrite sept réacteurs nucléaires, totalisant près de 6 000 MW de capacité installée, qui ont produit 38% de l’électricité consommée en 2015 dans le Royaume. C’est pourquoi la ministre de l’Énergie, Marie Christine Marghem, a demandé à deux reprises (en avril et en septembre 2016) au gestionnaire du réseau, Elia, de réaliser une étude décrivant, pour la période 2017-2027, les besoins électriques de la Belgique en termes d’adéquation et de flexibilité.
4 piliers
« Pour compenser la perte de production d’énergie nucléaire à partir de 2022, il importe de créer un climat d’investissement propice à la construction de nouvelles installations de production d’énergie et au maintien dans le marché de suffisamment d’unités », a expliqué Marie Christine Marghem. Pour autant, les premiers retours d’expérience sur le développement massif d’énergies renouvelables ont montré une hausse de la variabilité et des incertitudes sur l’équilibre du système électrique. Pour y faire face, le réseau aura besoin de davantage de flexibilité. C’est pourquoi la stratégie belge s’appuie sur 4 piliers : améliorer le fonctionnement du marché et les échanges transfrontaliers développer la gestion de la demande, développer le stockage, améliorer la réserve stratégique.
Par ailleurs, le Conseil des ministres a également approuvé un avant-projet de loi destiné à favoriser le stockage par l’exonération de la cotisation fédérale. Un autre volet concerne la gestion de la demande : « la possibilité sera donnée au client final de valoriser sa gestion de la consommation d’énergie et donc d’améliorer sa compétitivité », indique la ministre en référence aux divers services d’efficacité énergétique et de domotique qui commencent à se développer, certes timidement, sur le marché des particuliers.
Mauvaise nouvelle pour Engie et EDF
La décision belge est une mauvaise nouvelle pour l’exploitant et propriétaire de ces réacteurs : Engie. L’ex-Electrabel, GDF-Suez, opère tous les réacteurs du pays et en est largement propriétaire (100% de Doel 1 et 2, 89.8% de Doel 3 et 4 et de Tihange 2 et 3 ainsi que 50% de Tihange 1), le reste étant détenu par un autre grand groupe issu de l’Hexagone : EDF (en propre ou à travers SPE). Le nucléaire en Belgique a été l’objet d’un débat qui a abouti en 2003 à un accord multi-partis sur la sortie en deux phases (2015 et 2025) de l’atome au grand dam d’Engie qui militait pour étendre la durée d’exploitation des centrales comme en France. Pire, la compagnie a dû mener une véritable guerre juridique avec le gouvernement qui a doublé en 2012 la taxe sur la rente nucléaire (les réacteurs étant amortis). Après plusieurs jugements, Engie a obtenu partiellement gain de cause mais a dû se résoudre à payer. Pour la seule année 2015, la facture s’élevait à 130 M€.
Cet argent doit financer la transition vers modèle énergétique basé sur les énergies renouvelables où la flexibilité du réseau sera obtenue par les échanges transfrontaliers, une capacité de production flexible, et une gestion accrue de la demande et du stockage.
Romain Chicheportiche
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